L’architecte Zoltan Janko a conçu sa maison tel un manifeste ultracontemporain. Réunissant magistralement habitation et lieu de travail, elle a été pensée jusque dans les moindres détails… pour offrir aussi de nombreux aménagements très réjouissants.

Carnet d’adresses en page 162.

Volume parallélépipédique du bâtiment, façade faussement aveugle, habillée de dalles blanches en pierre calcaire… La maison ultracontemporaine de l’architecte Zoltan Janko tranche délibérément avec les habitations voisines, typiques des années 1950. Située à l’extrême gauche du bâtiment, insérée dans une  » tranche verticale « , la porte d’entrée est pivotante. Sa conception s’inscrit parfaitement dans la découpe de l’ensemble de l’édifice en cinq tronçons de 3,50 mètres.

Dans le hall d’entrée, un autre axe s’impose au regard : une percée, perpendiculaire à la longueur de la maison, qui se jette dans la verdure du jardin. Le living paraît gigantesque. Mais sa grandeur réelle de 80 m2 est amplifiée par l’importance de la partie vitrée côté jardin, uniquement interrompue par la cheminée à feu ouvert, et la hauteur sous plafond, qui approche les 6 mètres. Le sentiment d’espace s’accentue encore lorsqu’on se trouve dans le petit bureau ouvert placé au premier étage, au même niveau que la galerie qui dessert les chambres. La linéarité de cette galerie est soulignée par une rambarde blanche en acier massif, composée de deux niveaux de fers plats, reliés par des tronçons verticaux régulièrement posés. Ce large maillage est très sécurisant tout en apportant une touche esthétique à l’ensemble.  » Mon père, qui travaillait dans la construction métallique, m’a appris à aimer l’acier, confie Zoltan Janko. C’est aussi de lui que je tiens cette volonté de mettre en avant le savoir-faire, la maîtrise du métier de chaque artisan.  »

Les cinq sections de 3 m 50 (en tout 17 m 50) extérieures se retrouvent magnifiées à l’intérieur. On pourrait croire qu’une telle systématisation conduit à l’ennui. C’est tout le contraire, car de nombreux aménagements bien pensés font oublier ce principe constructif. Ainsi la cuisine est, elle, légèrement plus large que la maison elle-même. Il y a aussi l’escalier intégré dans le pan de mur quadrilatère qui sépare visuellement le salon de la partie technique de la cuisine. Quant au profil de la tablette à manger suspendue, il est tout simplement prodigieux. Aucun doute n’est permis, tout cela a été dessiné, calculé même, jusque dans les moindres détails, comme l’angle de la fermeture des tiroirs.

Le choix du mobilier du living témoigne, lui aussi, d’un raffinement très exclusif : la célèbre lounge chair, les trois petits tabourets de la forme de pions d’un jeu d’échecs et, dans la cuisine, les chaises blanches Wire (Vitra) portent la signature de Charles et Ray Eames. Antonio Citterio est l’autre designer privilégié, avec un canapé B&B Italia et, surtout une sublime console publiée par XI L’Italia, une marque aujourd’hui disparue. Sur les grandes dalles en pierre blanche polie, une peau de zèbre vient perturber les lignes contemporaines. Comme un tableau ethnique accroché au plus grand mur, elle révèle que le couple Janko aime les grands voyages.

En montant au premier étage, dans la salle de bains, comme dans le dressing immaculé, on retrouve la même jubilation de la précision, celle de la ligne nette, du détail peaufiné. La salle de bains, qui fut conçue, comme les autres pièces de la maison, avec l’aide de l’architecte d’intérieur Stef Paepen, témoigne d’une volonté de jouer avec les matières, couleurs et les plans, tant horizontaux que verticaux. Les murs sont traités comme de grands aplats incrustés de miroirs ou de caissons lumineux. Une longue tablette sombre (en wengé comme le reste des boiseries de la salle de bains et de toute la maison) met en évidence l’évier rectiligne d’Antonio Lupi posé sur elle, ainsi que la robinetterie (KWC X-trend).

La possibilité urbanistique de pouvoir construire trois niveaux a offert à l’architecte une opportunité séduisante : celle d’installer ses bureaux dans le même immeuble. Le deuxième étage, que l’on atteint depuis le hall, soit par un ascenseur, soit par un escalier, est donc entièrement consacré au travail. Dans ce vaste espace panoramique, la présence d’un petit escalier d’une dizaine de marches intrigue. Il est constitué de montants en métal inoxydable et de petites marches en verre.  » De mon père, j’ai hérité la manie de collecter des matériaux qui pourront me servir un jour, souligne Zoltan Janko. Cela fait quinze ans que je m’intéresse au verre. Celui de ces marches d’escalier, comme celui du sol du hall du premier, vient d’anciens guichets d’une banque. Avec ses 2,5 cm d’épaisseur, il est extrêmement résistant.  »

L’escalier conduit à un belvédère entièrement vitré, un lieu destiné aux réunions de travail, aux brainstormings parmi les étoiles. Par temps dégagé, le regard peut s’égarer jusqu’à 10 km, avec un angle de vision de 270°. Sur le toit plat, couvert de galets blancs, on remarque les moteurs et ventilateurs qui actionnent le système d’air conditionné de la maison. Ce n’est pas là le seul élément high-tech de l’habitation. Les stores solaires, par exemple, peuvent se gérer de manière autonome, en fonction de la quantité d’ensoleillement. A noter aussi : la programmation intelligente de la lumière qui peut reproduire, en l’absence des occupants, leur mode de vie des jours précédents. En conséquence, le système informatique est capable d’enclencher la lumière du salon à la même heure que la veille, par exemple. De quoi induire en erreur les éventuels visiteurs indésirables.

Jean-Pierre Gabriel

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content