Le héros de son livre, Paul, est l’unique survivant d’un accident d’ascenseur. Sa vision de la vie s’en trouve à tout jamais bouleversée… Un roman à l’humour doux-amer sur, entre autres, la paternité et la complexité de la vie.

Vos héros  » sont des enfants mélancoliques qui ne veulent pas grandir « . Et vous ?

J’ai du mal à distinguer la réalité de l’enfance de celle du monde adulte. Les mêmes maladresses subsistent…

Petit, vous vouliez devenir…

Prof de tennis, de ski et de rugby. Dépourvu d’ambition, je rêvais d’un métier non contraignant, me permettant de me lever sans réveil. En cela, j’ai réussi ma vie (rires) !

L’écriture,  » chute libre  » ou colonne vertébrale ?

Ni l’une ni l’autre. C’est une manière de vivre très simple, qui m’aide à réfléchir à ce que la vie effacerait. L’écrivain prend le temps de s’arracher au temps. Il voit tout au ralenti. La mémoire est morte, mais elle ne demande qu’à revivre.

Qu’est-ce qui manque à Paul, votre héros ?

Des réponses, des convictions et la compréhension des choses. Il fait partie des maladroits qui cherchent la vie par tâtonnements.

Faut-il un accident pour saisir la réalité des choses ?

L’accident crée une rupture. On bascule dans la douleur totale ou on accède à un recalibrage mental. Statistiquement, un ascenseur n’a aucune chance de s’écraser. Quand ça arrive, doit-on croire au hasard ?

Pourquoi  » l’ascenseur est-il au centre de tout  » ?

L’air de rien, l’ascenseur incarne la clé de notre mode de vie. Si on le supprimait, la verticalité n’existerait plus. Comment imaginer des immeubles et des villes contemporaines sans lui ?

Avec qui aimeriez-vous rester coincé dans un ascenseur ?

(Très ému) Mon père, qui m’a toujours manqué. Quand j’écris un livre, son image revient. Je retrouve le grain des sièges de sa voiture ou l’odeur de son eau de toilette.

Que vous évoque la paternité, qui est au c£ur du roman ?

La paternité est insoluble. Je ne saurai jamais être un fils ou un père, il m’est plus simple d’être grand-père. Il faut servir un minimum d’amour à ses enfants. Or le rôle de guide est compliqué.

La famille, c’est…

Un désordre, une lutte, un conflit. On porte ce fardeau toute sa vie. Tous mes livres présentent un père mal fichu. Le mien ne m’a rien mis entre les mains, mais tout était à ma disposition.

Quel métier auriez-vous aimé exercer ?

Jardinier, parce que ce travail discret part de rien pour aller vers un embellissement au sens puissant.

Comment  » mordez-vous  » la vie ?

En l’aimant ! Ce qui me manquera le plus en mourant, c’est de rigoler de la vie, de sentir l’odeur de l’herbe, de me baigner, de jouer au rugby avec mon petit-fils, de rouler en décapotable ou de fumer un cigare au bord de l’eau. J’aime être au monde en ayant les yeux ouverts.

Quelle est  » votre place dans le monde  » ?

Elle est inutile. Tout tient à un fil, c’est fascinant et terrifiant. Je suis un blagueur qui fait des livres. L’important étant de chercher la lumière.

Le cas Sneijder, par Jean-Paul Dubois, L’Olivier, 222 pages.

Kerenn Elkaïm

Je suis un blagueur qui fait des livres.

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