On dit que c’est la couleur des cocus et des traîtres. On l’accuse aussi de donner mauvaise mine. Et s’il s’est imposé sur les murs de notre sweet home dans les nineties, on s’est empressés, l’air de rien, de le badigeonner de tons plus neutres quelques années plus tard. Même les transports en commun bruxellois, pourtant pas à la pointe de la branchitude, ont fini par renoncer au jaune…

Par défi ou par esprit de contradiction, les créateurs ont malgré tout choisi d’en faire la couleur phare de l’été 2008. Chez Pucci, Hermès, Sonia Rykiel, Moschino, Gucci ou Kenzo : du jaune, du jaune et encore du jaune. Même Martine Sitbon, qui nous avait habitués à un vestiaire plutôt dark, fait défiler des robes monochrome couleur soleil pour son label Rue du Mail. Jusqu’à Valentino, fan absolu du rouge, qui – pour sa dernière collection avant de céder le flambeau -, vire sa cuti sans prévenir !

P remier commandement de la modeuse : comme on n’échappera pas à la tendance, autant revoir son jugement. Se répéter comme un mantra que  » oui, le jaune, c’est beau « . Pour les bananes, par exemple. Ou pour les chasubles fluo des cyclistes. Ou, en zeste, dans un verre de coca glacé. Allez, soyons magnanimes, même en petites touches savamment dosées dans une cuisine – une machine à expresso très design et très chère, par exemple. Mais dans la garde-robe ? ! ?

Paris Hilton, Kimberley Stewart et Brittany Snow ont beau l’avoir déjà adopté, il faut bien avouer qu’en dehors des tapis rouges le total look yellow n’est pas facile à porter. Surtout quand on vit dans un pays où on marque d’une pierre blanche les jours où le soleil brille comme dans le Midi…

C’est là qu’intervient le deuxième commandement de la modeuse : détourner la tendance pour se l’approprier. On passe alors en revue les couleurs auxquelles associer ce fameux jaune pour le rendre plus  » easy wearing « . Première proposition : avec du blanc. A priori, on joue placé. Et pourtant… non. Parce que, à moins de pouvoir s’offrir une sublime jupe longue dessinée par Kris Van Assche, on risque vite de ressembler à une patineuse artistique d’une ex- république soviétique. Ou, pis, à une première dame made in USA. Avec du noir, autre couleur qui va soi-disant  » avec tout « , alors ? Trop Pages d’Or. Avec du rouge ? Trop Bozo-le-clown. Avec du rose vif ? Trop lolita. Avec de l’orange, comme le propose Marc Jacobs pour Louis Vuitton ? Tentant au premier abord, mais ce serait oublier qu’il est tout aussi difficile à porter que le jaune. Autant ne pas cumuler les difficultés. Avec du brun, alors, se dit-on dans un dernier effort de conciliation. Mais le brun n’est pas repris dans la palette de l’été…

Reste la solution de repli : le troisième commandement de la modeuse. Quand on n’assume pas son statut de fashionista jusqu’au bout, on adopte un profil bas et on joue la carte des détails. En l’occurrence, les accessoires. Parce que là aussi, le jaune donne le ton. Et que, de ce côté, le risque de faux pas est sous contrôle : le sac, la paire de lunettes ou la sandale couleur soleil, c’est nettement plus facile à assumer. D’ailleurs, il faudrait vraiment être mal luné pour ne pas trouver son bonheur dans la panoplie toute jaune que nous proposent les créateurs ce printemps : du veau velours chez Longchamp, du vernis chez Vuitton ou MaxMara, du Nylon chez Tod’s mais aussi des pois, des plumes, du croco, du vinyle… On va finir par l’aimer, la couleur de l’été. Quitte à rire jaune.

Delphine Kindermans

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