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10 ans d'écart Vif Weekend Cuffing Season DR

La « cuffing season » sonne-t-elle la fin du romantisme?

Kathleen Wuyard
Kathleen Wuyard Journaliste & Coordinatrice web

23, 33, 43, 53 ans: voit-on forcément la vie autrement avec (plusieurs fois) dix ans d’écart ? Positionnés chacun dans une décennie différente, nos journalistes confrontent chaque vendredi leurs points de vue en débattant des sujets dont tout le monde a parlé lors de la semaine écoulée. Cette semaine : la « cuffing season », ou saison du menottage en français dans le texte. 

Appartenant respectivement aux générations Z, Millenial et X, Thibault Dejace, Kathleen Wuyard, Nicolas Balmet et Nathalie Le Blanc confrontent leurs points de vue sur le buzz du moment dans notre chronique « 10 ans d’écart ». Le sujet de la semaine?

La « cuffing season »

Et non, malgré la référence aux menottes (« handcuffs », en anglais) il ne s’agit pas là d’une quelconque pratique liée à la police. Mais plutôt à la propension de certains célibataires à s’attacher, ou « se passer les menottes », donc, durant les mois d’automne et d’hiver, pour ne pas passer la saison froide en solo.

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Malin ou malheureux, ce procédé qui trouve un nouvel écho en pleine flambée des prix de l’énergie? Le verdict avec 10 ans d’écart.

© Thomas Sweertvaegher

Thibault, 23 ans : « Qui sommes-nous pour juger deux adultes consentants se partageant un peu de chaleur? »

Pour être tout à fait honnête, j’admets avoir dû Googler l’expression « cuffing season » pour être certain qu’il ne s’agissait pas d’une étrange pratique flirtant allègrement avec les sphères BDSM. Mais non, évitons la catastrophe, restons polis, courtois et surtout politiquement corrects.  Par « cuffing season », on entend donc le rapprochement entre célibataires pour affronter les températures glaciales de l’hiver. Débutant aux alentours d’octobre et se terminant généralement après la Saint-Valentin (étrange coïncidence ?), c’est très concrètement une relation à court-terme, histoire de se tenir chaud tout l’hiver durant.

Longues nuits hivernales, températures glaciales, prix du gaz qui explose: les raisons pratiquo-pratiques de s’y adonner ne manquent pas. Et puis tant que chacun est au fait de l’échange réalisé, ma foi, qui sommes-nous donc pour juger deux adultes consentants se partageant un peu de chaleur ?

Reste cependant quand même à solutionner la question de la rupture du contrat. Est-ce qu’à l’image des oiseaux migrateurs, nos amants saisonniers s’envoleront vers d’autres contrées ? Plus qu’à espérer que la clé des menottes ne se soit pas perdue entre-temps…

© Clément Jadot

Kathleen, 33 ans : « Une vision cynique de l’amour. Encore que… »

On croit bien fort aux affirmations que « 60 is the new 40 » et donc, suivant cette logique, que 30 ans c’est un peu comme une puberté prolongée, et puis on se confronte à l’évolution du paysage sentimental et on réalise qu’on est plutôt un fossile. Ou suffisamment ancien, en tout cas, pour commencer une phrase par « de mon temps… » En l’occurrence, un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, et où il n’existait pas la pléthore actuelle de termes pour décrire les relations intimes.

Mais aussi un temps où la cuffing season, soit le principe de se mettre en couple pour avoir quelqu’un qui nous tienne au chaud durant les mois froids, n’existait pas. Parce qu’à l’époque, on croyait dur comme fer qu’il valait mieux être seul que mal accompagné ? Peut-être. Probablement, aussi, parce que les prix de l’énergie étaient bien plus accessibles. Notre vision de l’amour serait-elle donc devenue si cynique ? « De mon temps, on était bien plus romantiques ». Même si, en toute honnêteté, je compte bien réchauffer chaque nuit mes pieds glacés contre mon mari jusqu’à ce que le thermomètre affiche des températures un peu plus cléments. « Pour le meilleur et pour le pire », on a dit.

Lire aussi: 10 ans d’écart: appétissantes, les butter boards?

© Thomas Sweertvaegher

Nicolas, 43 ans : « Ma religion me l’interdit »

Désolé, mais pour me tenir au chaud pendant les mois d’hiver, personnellement, ça fait belle lurette que j’ai investi dans une collection de plaids, de chaussettes de Noël (oui, celles avec des petits anti-dérapants) et de whiskys 16 ans d’âge. Mais jamais, ô grand jamais, je ne serai de ceux qui « empruntent » une personne durant une saison entière, puis qui s’en débarrassent sèchement comme on jette aux ordures un vulgaire reste de blanquette.

Mon éducation ultra-catholique (enfin, j’avais un cours de religion à l’école) m’en empêche, désolé. Autre argument, et non des moindres : je partage actuellement la vie d’une personne avec qui je m’entends plutôt bien depuis une quinzaine d’années, et je ne suis pas convaincu que l’argument « Nan, mais t’inquiète, Natacha ne reste ici que quelques mois, dès que les pollens sont de retour, elle se barre » sera reçu avec gentillesse. L’air de rien, ça peut vite se transformer en dispute. Surtout lors du passage où je dois expliquer à ma compagne que Natacha sera menottée. 

© Thomas Sweertvaegher

Nathalie, 53 ans : « Si tout le monde est d’accord, où est le mal? »

En tant que célibataire invétérée, je trouve les vicissitudes romantiques de l’Homme moderne tout simplement fascinantes. Parfois prévisibles, parfois surprenantes, mais à tous les coups intéressantes. Or quand on s’y intéresse de plus près, on réalise rapidement qu’il n’existe pas deux couples (ni individus) identiques et que l’amour est complexe, surtout vu de l’extérieur. D’autant plus que celui-ci est observé par le prisme d’un système de valeurs régi par des hormones volatiles (les lois de l’attraction) et méprisant les relations mues par des raisons pratiques.

Sauf que si vous et votre partenaire particulier(e) êtes d’accord sur les motifs qui vous unissent cet hiver, soit, en l’occurrence, vous tenir chaud respectivement, quel mal y a-t-il à cela ? Et surtout, en quoi est-ce une raison moins légitime que celle invoquée par les couples qui se marient sous la pression sociétale, pour contrer la solitude ou bien tout simplement parce qu’ils souhaitent organiser une grande fête ? Chacun ses raisons, et surtout, un hiver chaleureux et affectueux pour tous.

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