Nicolas Balmet

Il est impossible d’éternuer les yeux ouverts (et autres faits réels pour égayer votre Saint-Valentin)

Nicolas Balmet Journaliste

Dans cette chronique, rien n’est en toc. Chaque vérité, cocasse ou sidérante, est décortiquée par un journaliste fouineur et (très) tatillon qui voit la curiosité comme un précieux défaut.

Je ne vous apprends rien (du moins dans cette première phrase, parce qu’après, vous allez tomber du plafond) : les dîners de Saint-Valentin au restaurant ont souvent un côté coincé qui rend l’événement un brin crispant. On se sent obligé de se montrer à la fois prévenant, drôle, élégant et sensible, tout cela en faisant semblant d’être décontracté face aux prix de la carte des vins. Bref, on a un peu la sensation d’avoir avalé le parapluie de la fameuse expression « t’as avalé un parapluie ou quoi ? », et ce n’est pas fort agréable. 

Bien sûr, je ne vais pas vous laisser comme ça. Ici même, je vous ai concocté un menu qui devrait vous permettre de passer une soirée détendue et emplie de bonne humeur, grâce à des petites suggestions chargées de transformer votre Saint-Valentin en savoureux festin. De l’apéro au dessert, il s’agit simplement de saupoudrer chaque plat de quelques connaissances bien senties, présentées sous la forme d’expériences ou de faits rigoureusement vérifiés. Est-ce que j’exige quelque chose en échange ? Même pas. A la fin du repas, un simple « merci » s’échappera naturellement de votre bouche.

En guise d’amuse-gueule, une fois que vous êtes bien attablé, juste après la conversation sur le fait que « ce n’est quand même jamais facile de trouver une place dans ce quartier », je vous suggère d’épater votre partenaire en lui disant ceci : « Sais-tu qu’un être humain normalement constitué est incapable de se lécher le coude ? » D’emblée, ça devrait faire son petit effet, puisque ensemble, vous allez inévitablement joindre le geste à l’étonnement, en essayant d’atteindre votre coude avec le bout de votre langue. Bien sûr, ne faites pas attention aux regards intrigués des clients du resto. Ce moment n’appartient qu’à vous, il est beau et captivant, pour ne pas dire trognon. Evitez juste qu’il dure trop longtemps.

A l’entrée, alors que le champagne a fait de vous un individu entièrement dévoué à son âme sœur, je vous conseille l’expérience suivante : attrapez le poivrier, sniffez délicatement mais sûrement un peu de son contenu et attendez quelques secondes. En théorie, le poivre devrait très vite vous faire éternuer, ne vous inquiétez pas, c’est un signal tout à fait normal de votre corps qui vous explique que, non, le poivre ne se sniffe pas, surtout quand on est au restaurant. Bien sûr, c’est pour les besoins de l’expérience… et de sa conclusion qui va époustoufler votre moitié : « En fait, il est impossible d’éternuer en gardant les yeux ouverts ! » Il va sans dire qu’en guise de réponse, vous recueillerez des yeux aussi admiratifs que languissants. L’air de rien, votre couple est alors en train de revivre la passion des premiers jours…

Et ce n’est pas tout. Le plat arrive, et là, je vous demande juste d’appeler discrètement le serveur pour qu’il vous apporte une orange. Je sais que ça peut sembler bizarre, mais faites-moi confiance : avouez que, jusqu’ici, je ne vous ai pas déçu. Dès que le fruit est en votre possession, il vous suffit de le poser dans votre verre d’eau, d’observer, de le retirer, de l’éplucher et de le plonger à nouveau dans le verre d’eau. Là encore, ne faites pas attention aux regards dubitatifs des clients qui commencent doucement à s’inquiéter pour vous. Non, contemplez plutôt l’Amour qui envahit le visage de votre partenaire lorsque vous prononcez votre verdict : « Une orange avec sa peau flotte, tandis qu’une orange pelée coule. » Bim !

Tandis que votre merveilleuse soirée touche doucement à sa fin, il vous reste à dégainer une dernière carte, et non des moindres. Les bougies dansent sur la table, tels Patrick Swayze et Jennifer Grey dans Dirty Dancing. C’est le bon moment pour attraper une chandelle et déclarer votre… ultime vérité à votre bien-aimé(e). En manipulant délicatement le cierge, prouvez-lui fièrement que, contrairement au verre, à votre serviette ou à votre tiramisu, le feu n’a pas d’ombre. Et de fait, vous pouvez jouer avec la flamme aussi longtemps que vous le souhaitez, jamais elle ne montrera son sombre reflet. Je peux vous dire qu’avec ça, le reste de la soirée sera torride, pour ne pas dire brûlant. C’est une image, bien sûr : ne faites pas cramer la nappe avec la bougie, sinon, vous allez encore vous étonner qu’on vous regarde bizarrement.

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