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Les leggings de sport, un danger pour la santé? - Getty Images

Si vous êtes accro aux leggings de sport, lisez cet article (et préservez votre santé)

Remue-ménage dans les vestiaires: ces derniers mois, de plus en plus de yogis ont raccroché leurs leggings de sport préférés. Et selon les chercheurs, ce n’est pas trop tôt, car si faire du sport est bon pour la santé, les vêtements synthétiques qu’on revêt pour s’y adonner, eux, ne sont pas sans danger.   

C’est ainsi que la célèbre marque canadienne de sport Lululemon vient de se prendre les pieds dans le tapis. Selon le magazine économique Bloomberg, les yogis qui étaient jusqu’ici de fidèles ambassadeurs de la marque se sont détournés de leurs leggings préférés, ne considèrant plus qu’il est « éthique » de les porter.

L’empreinte écologique de ces pantalons de yoga à la mode a été vertement critiquée, notamment par l’organisation de défense de l’environnement Stand.Earth, qui a déposé une plainte il y a peu pour écoblanchiment, mais ils sembleraient également être problématiques point de vue santé. C’est en effet ce que révèle une étude américaine à laquelle a collaboré le biologiste belge Chris Callewaert.

Le problème? De plus en plus de fabricants de vêtements de sport, dont Lululemon, promettent que vous ne transpirerez pas ou à peine dans votre tenue. Or les produits chimiques qu’ils utilisent pour y parvenir s’avèrent nocifs pour la peau. Incroyable mais vrai: la marque Lululemon a cofinancé l’étude, mais ses pantalons synthétiques sont clairement en ligne de mire.

À fond la forme l’acné et l’eczéma

À l’heure actuelle, les deux tiers (65 %) de notre garde-robe ne seraient plus composés de coton ou d’autres fibres naturelles, mais plutôt de matériaux artificiels fabriqués à partir de combustibles fossiles. Le polyester représente ainsi à lui seul 54 % de notre penderie, les autres tissus principalement utilisés dans les vêtements de sport étant le polyamide (mieux connu sous le nom de nylon) et l’élasthanne (qui donne l’élasticité nécessaire). Selon les producteurs de vêtements de sport belges (voir encadré ci-dessous), ces tissus synthétiques sont nécessaires pour que les tenues sportives soient agréables à porter durant l’effort. Même si « Les odeurs y persistent et sont bien plus difficiles à éliminer au lavage que sur les tissus naturels », pointe Chris Callewaert.

Les fabricants ont donc cherché assidûment des solutions pour éliminer les odeurs de transpiration du polyester. Pour ce faire, ils utilisent des métaux lourds tels que le nano-argent, qui, selon notre compatriote, est l’agent antimicrobien le plus couramment utilisé sur les vêtements.

« L’idée est de tuer les bactéries présentes sur notre peau. Ainsi, en théorie, nous avons moins de bactéries et nous sentons moins mauvais » explique-t-il. Cependant, le métal a l’effet inverse : il permet aux bactéries les plus résistantes de pénétrer, ce qui a pour effet d’augmenter le nombre de bactéries sur la peau au lieu de le réduire. Et si Chris Callewaert ne qualifie pas cet effet d’extrêmement nocif, il peut toutefois s’avérer gênant, certains participants à l’étude ayant ainsi développé de l’acné dans le dos.

« Le nano-argent est aussi parfois utilisé dans les sous-vêtements », poursuit M. Callewaert. « Les personnes souffrant d’eczéma au niveau des fesses se voient parfois proposer des pantalons contenant du nano-argent comme solution. Les premiers jours, les rougeurs peuvent disparaître, mais ensuite la situation se retourne souvent complètement et les dégâts s’aggravent. Ces bactéries finissent également par devenir résistantes, ce qui provoque des irritations ».

Des produits chimiques interdits

« Les chercheurs soulignent que nous pouvons absorber le nano-argent par la peau », dénonce la journaliste américaine Alden Wicker dans son livre To Dye For, qui traite des substances toxiques présentes dans les vêtements. « Le métal se propage ensuite à divers organes. Cela peut prendre de deux semaines à quatre mois pour que la substance disparaisse de notre corps, mais elle peut aussi s’accumuler de façon permanente dans des organes tels que le cerveau et les testicules, ce qui peut être nocif à long terme ».

Et la journaliste de suggérer d’éviter à tout prix les « vêtements de compétition », c’est-à-dire les tissus qui promettent d’être résistants aux taches, aux plis ou aux odeurs -des promesses tenues le plus souvent à grand renfort de produits potentiellement nocifs pour la santé.

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Car les vêtements de sport synthétiques contiennent de nombreuses substances nocives. Sur son site EcoCult, Mme Wicker souligne notamment la présence de perturbateurs endocriniens tels que le bisphénol A dans des marques de sport telles qu’Adidas et Nike. Et si les règles européennes sur les produits chimiques (REACH) sont beaucoup plus strictes que celles des États-Unis en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens et d’autres susbtances, « on ne peut jamais en être sûr », met en garde Chris Callewaert, car les vêtements sont « généralement produits loin de chez nous ».

Et nos douanes n’enquêtent pratiquement jamais sur les vêtements, car cela est très coûteux et prend beaucoup de temps. Lorsque la Commission européenne a dépensé « plusieurs centaines de milliers d’euros » à l’automne dernier pour tester des vêtements en laboratoire, il s’est avéré qu’un vêtement sur six contenait des substances chimiques interdites. Le plus fou? Si, dans les biocides, l’utilisation du nano-argent est interdite au sein de l’UE, pour les vêtements, en revanche, elle est bien autorisée.

Comment les marques de sport belges évitent-elles les produits chimiques nocifs ?

Il n’y a pas de liste d’ingrédients sur les vêtements, contrairement aux aliments transformés ou aux cosmétiques. Pour naviguer un marché parfois trop opaque, on suit donc les conseils des marques de sport belges Pure By Luce et RectoVerso.

« Lorsque je le peux, par exemple pour les hauts et les T-shirts, j’utilise du coton biologique certifié« , explique Loes Vandekerckhove, fondatrice de Pure By Luce. « Mais pour les leggings et les soutiens-gorge de sport, les tissus naturels ne sont pas assez performants. J’opte alors pour le polyester et le polyamide ». Soit de l’Econyl, une forme de polyamide recyclé qui porte le label Oeko-Tex Standard 100. De plus, les tissus sont tous fabriqués en Europe*, ce qui signifie que les fabricants doivent respecter la réglementation européenne.

Labels de qualité

L’un de ces fabricants de tissus européens est Liebaert, basé à Deinze, la société mère de RectoVerso, qui fabrique des vêtements de sport à partir de polyamide et d’élasthanne. « De cette manière, nous gardons un contrôle total sur les produits chimiques », explique Mathieu Liebaert, PDG de l’entreprise. Leurs tissus portent deux labels Oeko-Tex : le Standard 100 et le label STeP, plus strict, qui exige de l’entreprise qu’elle garde la trace de tous les produits chimiques qu’elle reçoit. Pour les fils recyclés, elle s’appuie sur la norme Global Recycled Standard. En ce qui concerne les produits chimiques et les colorants, le label GRS est encore plus strict que le STeP.

Mais il n’est pas facile de se conformer à toutes les réglementations. Si RectoVerso a recours à un certain processus de teinture et qu’une marque de vêtements souhaite produire la même couleur deux ans plus tard, les produits chimiques contenus dans la teinture risquent de ne plus être conformes. L’entreprise doit alors tout recommencer. Malheureusement, de nombreux producteurs extra-européens ne se préoccupent pas de cette question.

Tissus antibactériens

« Aucune marque belge n’ajoute de nano-argent pour éviter les odeurs. Nous utilisons des alternatives biologiques pour rendre les tissus antibactériens« , explique M. Liebaert, bien que ces alternatives ne soient pas mentionnées sur les étiquettes. Elles sont souvent déjà présentes dans les polymères des fils eux-mêmes et ne se détachent pas, ce qui peut arriver avec les revêtements de nano-argent. Et Loes Vandekerckhove a quant à elle son propre remède pour éviter les taches de sueur : « lavez vos vêtements immédiatement après avoir fait de l’exercice. Surtout avec les tissus synthétiques. Avec des fibres naturelles comme le coton et le chanvre, je constate qu’il y a beaucoup moins d’odeurs qui restent ».

*Bon à savoir : le fait que l’étiquette mentionne« made in Europe » ne signifie pas que le tissu a été filé et teint en Europe. L’étiquette indique uniquement le lieu de production ou de finition.

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