L’endométriose sort enfin du bois et se raconte en BD

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Comment raconter de A à Z une maladie encore méconnue alors qu’elle touche de nombreuses femmes? Une bande dessinée française foisonnante et piquante propose une plongée édifiante dans l’endométriose.

La journaliste française Camille Grange a exploré pendant trois ans tous les aspects de cette maladie parfois très douloureuse sur laquelle les connaissances demeurent lacunaires, entraînant souvent de l’incompréhension autour des malades et des retards de diagnostic de plusieurs années.

« Pour nous il n’y avait pas d’intérêt à publier un livre pour les femmes qui connaissent déjà le sujet. Le but, c’est que ce soit accessible à tout le monde », raconte l’auteure pour expliquer le choix de cette enquête dessinée par l’illustratrice belge Mathilde Manka.

L’endométriose est caractérisée par la présence dans le corps de cellules similaires à celles de l’endomètre, la muqueuse utérine, qui réagissent aux hormones lors des cycles menstruels. Parfois asymptomatique, elle peut aussi se manifester par des règles abondantes et des douleurs qui peuvent devenir très sévères, dues à des kystes ou des lésions.

En Belgique, la maladie touche plus d’une femme sur dix. 

Violences gynécologiques, échecs professionnels, manipulations de charlatans, isolement social ou effets désastreux de chirurgies et traitements parfois inadaptés, les mésaventures vécues par ces femmes sont nombreuses mais décrites sans pathos, parfois même avec humour.

Les Lésions Dangereuses, ouvrage de 200 pages, relate le doute, l’impuissance, voire la dépression des victimes de cette maladie qui n’a pas de remède définitif et autour de laquelle la recherche patine.

Violences gynécologiques, échecs professionnels, manipulations de charlatans, isolement social ou effets désastreux de chirurgies et traitements parfois inadaptés, les mésaventures vécues par ces femmes sont nombreuses mais décrites sans pathos, parfois même avec humour.

La patte de l’illustratrice opère de subtiles métaphores, tour à tour caustiques ou saisissantes, qui aident le lecteur à digérer la somme considérable de témoignages et d’informations.

« On ne voulait pas que ça soit déprimant ni que cela fasse peur. Souvent on ne savait pas si on devait rire ou pleurer, donc on s’en est sorti avec un ton un peu caustique qui nous correspond », expose Camille Grange.

 Pas mortel

« Cette maladie intéresse peu et reste très méconnue malgré son ampleur », explique la journaliste. « Souvent mes interlocuteurs m’ont expliqué que c’est parce que l’endométriose n’est pas mortelle, contrairement au cancer par exemple. Après, il y a aussi forcément un aspect misogyne et des non-dits dus à la pudeur et aux tabous autour des troubles liés aux règles ».

« Ca emmerde tout le monde et ça ne passionne personne », résume sans ambages un membre de l’académie de médecine dans l’ouvrage. 

Pourtant, le manque d’information autour de la maladie provoque des malentendus, mais aussi parfois un manque d’empathie d’une partie du corps médical, en plus des difficultés dans le diagnostic et la prise en charge. « Quand on vous annonce un cancer, l’annonce est douloureuse, mais on va toute de suite vous orienter vers des médecins disponibles à proximité. Là, les femmes ne sont pas informées, les médecins ne sont pas formés et l’accès aux rares spécialistes a un coût énorme », souligne Camille Grange, évoquant « une course d’obstacles sans fin ».

L’ouvrage permet une plongée historique, anatomique, médicale dans cette maladie méconnue qui a tour à tour été assimilée au fil des siècles à une possession démoniaque, un déséquilibre psychologique, de l’hystérie ou même de la nymphomanie.  Autre enseignement, ce mal néfaste pour la fertilité touche aussi les transgenres. 

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