Seconde main: Pionnières du secteur, les asbl sociales face aux géants de ce business vertueux

L'atelier de Label Jaune, qui redonne un nouveau souffle à ces usagés des Petits Riens. © KAREL DUERINCKX
Aurélie Wehrlin Journaliste

Il aimait les étoffes, quand elles sont belles. Il aimait aussi les fleurs, les chats, les créateurs de mode, Thierry Mugler, Yohji Yamamoto, le design, la plage de Sitges et le vintage. Il n’avait pas attendu que ce soit à la mode pour faire de sa passion son métier. Jan Galand avait l’oeil pour dénicher un vêtement de qualité, bien coupé, il savait qu’un corps paré à sa juste mesure peut parfois être un rempart contre les légers vacillements. Il avait une formation de modiste, a eu un magasin de robes de mariée à Louvain – dont il était originaire – et travaillait depuis plus de dix ans avec Isabelle Bajart, dans sa boutique éponyme enracinée à Bruxelles.

Formant un duo parfaitement complémentaire avec cette précurseuse de la seconde main, il redonnait vie aux atours déjà usités. Sa belle ouverture d’esprit et sa connaissance fine des collections et de l’histoire de la mode faisaient la différence. Et son originalité. Ajoutez à cela son humanité délicieuse et vous comprendrez pourquoi l’homme à la barbe rousse laisse un grand vide derrière lui, depuis ce jour de janvier 2022 où il mit genou à terre devant ce sale virus pandémique. Ayez une pensée pour lui et pour ceux qui l’aiment quand vous shopperez du vintage. Car derrière ce sac patiné, cette jupe comme faite pour vous, cette veste au tombé impeccable, il y a des êtres humains qui ont fait profession de foi, ne l’oubliez pas. Depuis longtemps déjà, ils sont nombreux à prôner une économie circulaire. Et quand en plus elle se double d’une dimension sociale, c’est tout bonus pour la planète, et pour ceux qui la peuplent.

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Il se fait que le business de la mode de seconde main a le vent en poupe. On prédit même qu’il atteindrait 34 milliards d’euros en 2025, d’autant que la numérisation et la création de plates-formes d’e-commerce ont accéléré le mouvement. Fort bien, la dynamique est vertueuse. Il ne faudrait néanmoins pas qu’elle mette à mal les projets sociaux portés à bout de bras par les associations qui misent depuis toujours sur le recyclage pour soutenir et tenter de réinsérer les plus précaires, impitoyablement exclus. « Quand des personnes achètent un vêtement chez nous, précise dans nos pages Julie Lenain, directrice de l’économie sociale chez Les Petits Riens, ils n’achètent pas « seulement un tee-shirt » mais soutiennent toute une série d’initiatives sociales. »

Notre dossier sur le sujet, écrit par le journaliste Thibault Dejace, donne la parole à ces opérateurs sérieusement concurrencés par les géants Vinted, eBay ou Vestiaire Collective et même par les labels du luxe. S’ils applaudissent la prise de conscience générale, massive, ils répètent que la fast fashion fait des dégâts avec son modèle basé sur l’hyper consommation et avec ses monceaux de stocks de vêtements de piètre qualité qui ne résistent pas au passage du temps. Et ils rappellent que la seconde main a pour eux une finalité autre, que l’édifice est fragile, qu’il faut veiller ensemble à ne pas le détricoter. Avec les moyens du bord, la volonté d’une économie solidaire et des outils contemporains, réseaux sociaux et influenceurs compris, ces acteurs de terrain se réinventent. Et rêvent d’inverser la tendance. En toute conscience, rêvons avec eux.

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