« Le plus grand ennemi de la parentalité positive est le perfectionnisme »: 4 pistes pour éviter le stress en famille
Être jeune parents, c’est une période merveilleuse, mais souvent intense. La psychologue clinique et professeure Marie-Anne Vanderhasselt (UGent) le sait mieux que quiconque. Dans son livre Ouders onder hoogspanning (que l’on pourrait traduire par Parents sous haute tension) elle explique comment durant cette période, le stress vous envahit, vous et votre vie de famille, et pourquoi il est si important de se préserver en tant que parent, dans ce processus.
Nous nous inquiétons sans cesse du bien-être de nos enfants, nous nous tourmentons pour des situations qui échappent à notre contrôle et nous pensons parfois même que les autres nous regardent d’un œil critique. Mais si vous pouviez mieux comprendre et canaliser votre stress ? Marie-Anne Vanderhasselt, psychologue clinicienne et professeure, vous explique exactement comment faire dans son livre: une compilation de conseils, d’idées et de quinze années de recherche.
1 – À l’abordage
Il est bien connu que le niveau de stress dans une jeune famille peut parfois atteindre des sommets. Mais avez-vous déjà pensé à la façon dont le stress se crée dans votre cerveau ? La professeure Vanderhasselt explique ce phénomène par la métaphore du bateau pirate.
Essayez de visualiser que votre cerveau est un bateau. Votre centre des émotions – ou amygdale – est un matelot, qui du haut de mât, depuis son nid-de-pie- observe et guette. Il surveille les dangers potentiels à proximité, explique la professeure. S’il repère un danger, il en informe immédiatement le timonier, à savoir votre cortex préfrontal. «Cela commence par une évaluation critique de la situation. Idéalement, face à des dangers potentiels, ce compagnon devrait se demander: est-ce une fausse alerte ou y a-t-il danger ? Votre cortex préfrontal ne fonctionne pas très bien ? Il aura alors du mal à distinguer les questions principales des questions secondaires et réagira de manière émotionnelle, sans regarder la situation dans son ensemble ».
Ensuite, vous avez le journal de bord : « C’est votre hippocampe – le centre où sont stockés tous les souvenirs – et il est très proche de votre amygdale. Si votre amygdale est active, vous pouvez amplifier les situations stressantes. Par exemple, pensez à la façon dont vous avez pu un jour être bloqué dans un ascenseur. Si vous vous retrouvez une autre fois dans un ascenseur, vous risquez inconsciemment de paniquer à nouveau. Si votre hippocampe fonctionne correctement, alors votre amygdale a moins de chances de l’emporter ».
Votre enfant tombe soudainement très malade, s’est battu à l’école ou crie au supermarché. Vous sentez le regard désapprobateur des autres et vous n’arrivez pas à calmer votre progéniture ? Ces situations incontrôlables, qui sont le lot quotidien de nombreux parents, peuvent déséquilibrer votre hypothétique « navire ». Notre cerveau pensant devient alors moins actif ou parfois même s’éteint. Comment l’éviter ? « En fait, vous devez vous observer en utilisant la métaphore du bateau. Parlez-en à votre partenaire. Notez les événements qui vous déséquilibrent », préconise Marie-Anne Vanderhasselt. Y a-t-il des moments de stress récurrents ? « Planifier s’avère être un bon moyen de gérer son stress et de reprendre un peu de contrôle sur sa vie ».
2. Une dose quotidienne de stress éloigne le docteur
Je vous entends penser : la vie ne serait-elle pas plus facile si nous n’étions pas stressés ? Sûrement pas, pense la professeure. Le stress peut et doit être présent, il n’est pas l’ennemi. Nous avons tendance à vouloir résister obstinément au stress, mais s’efforcer de mener une vie sans stress ne vous apportera rien de bon », précise-t-elle. Il n’y a pas si longtemps, les scientifiques pensaient qu’un niveau de stress relativement stable était optimal pour notre bien-être. Entre-temps, cette idée a été revue : des chercheurs ont découvert qu’il existe une relation entre une réactivité au stress atténuée, la dépendance et les comportements malsains. Il est nécessaire que votre corps soit capable de réagir au stress.
Nous avons tendance à résister obstinément au stress, mais s’efforcer de vivre sans stress ne vous apportera rien de bon.
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Cela ne veut pas dire qu’il faut se mettre sous pression trop longtemps, car on risque alors la fatigue, la dépression ou l’épuisement (parental) : « Réagissez-vous de manière irritable, distante ou autoritaire avec vos enfants ou votre patience est-elle rapidement à bout ? Ce sont des signaux d’alarme pour vous faire comprendre qu’il est temps de ralentir », précise Marie-Anne Vanderhasselt.
Comme souvent dans la vie, il s’agit de trouver le bon équilibre. « Une bonne dose de stress est tout à fait acceptable. Si vous vous autorisez à être flexible et à « rebondir » en fonction des niveaux de stress changeants, il n’y a rien de mal à cela ».
3. Soyez plus doux avec vous-même
Le message est donc de devenir résilient et de se calmer. Mais comment commencer ? Entrez dans le nerf vague : un long nerf qui traverse tout le corps, reliant votre cerveau à votre estomac et vos intestins, votre cœur et vos poumons. Le lien littéral entre votre corps et votre cerveau, en d’autres termes.
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Le nerf vague joue un rôle important dans votre bien-être mental et votre résilience : « Imaginez un instant que vous descendez une montagne à vélo. La montagne est votre système de stress et la pédale de frein de votre vélo est votre nerf vague. Plus vous descendez rapidement la montagne, plus vous êtes stressé et plus il devient difficile de retenir votre frein. L’astuce consiste donc à s’assurer que vous pouvez maintenir votre frein enfoncé afin de pouvoir rebondir lorsque le pic de stress est passé « , explique la scientifique. La bonne nouvelle est que vous pouvez entraîner et renforcer votre nerf vague. Par exemple, l’activité physique peut être bénéfique : vous pouvez faire des promenades rapides, faire de l’exercice, faire du sport. Il existe également d’autres techniques qui réveillent votre nerf vague, comme le travail de respiration et les douches froides.
Le nerf vague est parfois appelé le nerf de la compassion. Un nerf vague sain vous permet de faire preuve d’empathie et de compassion envers vous-même et vos enfants. Sous une forte pression, nous faisons beaucoup d’autocritique et essayons d’être perfectionnistes. Or c’est là l’ennemi d’une éducation saine », déclare la professeure. « Le perfectionnisme est en fait un cri constant du marin dans le nid de pie qui dit que les choses doivent être meilleures, nous sommes toujours à l’affût du danger, ce qui nous épuise mentalement. Alors si pour une fois on ne parvient pas à rester calme, et une fois qu’on a pris la poudre d’escampette, il s’agit de faire preuve à nouveau d’indulgence envers nous-mêmes et nos enfants ».
4. Moins de rumination, plus de stress conscient
Dans son livre, la psychologue clinicienne partage de nombreux conseils utiles pour relativiser les idées noires, l’anxiété et la panique. Une façon d’y parvenir est de se stresser en pleine conscience : « Soyez conscient de l’effet du stress sur votre cerveau et votre corps, essayez de le ressentir », dit-elle. Tout le monde est vulnérable au stress : est-ce que ce sont vos épaules ? Vous avez mal au ventre ? Ressentez-vous une tension dans votre mâchoire ? Reconnaître et comprendre cette réaction de stress.
Vient ensuite l’étape 2 : comment l’aborder ? Mesurez la variabilité de votre fréquence cardiaque (VFC) le matin, c’est-à-dire la variation de temps entre deux battements de cœur. Une variabilité élevée signifie que vous êtes résilient et vice versa », explique M. Vanderhasselt. Apprenez à canaliser votre stress. C’est une séance avec votre thérapeute ? Un cours de yoga ? Une promenade le matin ? Ou une séance de trampoline ? La prise en charge de soi est différente pour chacun, alors trouvez ce qui vous convient. Si vous apprenez à prendre soin de vous, vous pourrez également prendre soin des autres. Cliché, certes, mais c’est comme ça que ça marche ».
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