Pansexuel: aimer sans tenir compte du genre
« Quand je tombe amoureux d’une personne, c’est pour elle-même, pas pour ce qu’elle a sous la ceinture » : un nombre croissant de jeunes s’affirment « pansexuels », une variante de la bisexualité qui « assouplit les définitions » traditionnelles de la sexualité.
Est pansexuel celui ou celle qui est « attiré sexuellement ou sentimentalement par une personne sans prendre en considération son genre », masculin ou féminin, définit Perrine, 16 ans, qui se reconnaît elle-même comme telle. « On ne peut pas s’attendre à être attiré par un genre en particulier. Il m’est déjà arrivé d’avoir un énorme béguin sur une femme trans, mais le temps passant, de trouver un homme cisgenre (un homme qui s’identifie en tant que homme et qui est né avec les attributs sexuels d’un homme, NDLR) particulièrement attirant », ajoute l’adolescente, en couple avec une fille.
Pour Oscar, un étudiant de 19 ans, être « pan », c’est « presque une philosophie, un sentiment de liberté : on ne doit plus faire rentrer les gens dans des cases ». « Je n’ai pas besoin de me couper de la moitié de la population mondiale », analyse le jeune homme, pour qui la pansexualité « n’est pas que théorique », puisqu’il confie avoir eu des « aventures avec les deux sexes », et même avec des personnes « non binaires ».
Selon les militants et spécialistes interrogés par l’AFP, le concept de pansexualité est de plus en plus fréquemment utilisé au sein de la communauté LGBT, et chez les jeunes.
« Il y a dix ans, quand j’ai fait mon coming out +pan+, je me sentais un peu seul. Maintenant, c’est beaucoup plus courant », observe Christophe Madrolle, 34 ans, musicien. « La personne que je rencontrerai, je sais que son genre n’aura pas d’importance. Peu importe ce qu’elle a sous la ceinture », résume le trentenaire, qui milite à l’association « Bicause », regroupant des personnes bi et pan.
Ceux qui se revendiquent « pan » sont majoritairement âgés de moins de 25 ans, note le sociologue Arnaud Alessandrin, spécialiste des questions de genre. Les plus âgés, eux, préfèrent se dire « bi »: « Chacun se façonne avec les mots de sa génération », même si, en l’occurrence, les nuances de vocabulaire renvoient à des réalités légèrement différentes.
Une nuance moins « enfermante »
« Auparavant, la binarité des genres comme des sexualités dessinait un paysage d’opposition : c’était un peu les homos contre les hétéros. Et ne parle-t-on pas du +sexe opposé+? », observe l’universitaire. « Il n’y avait pas d’interstice possible pour les divers parcours de vie et les diverses identités. De ce point de vue, la pansexualité est venue assouplir considérablement les définitions traditionnelles de la sexualité ».
Dans les ateliers qu’elle anime dans les collèges ou lycées, Diane Saint-Réquier, éducatrice et animatrice en santé sexuelle, entend certains adolescents évoquer spontanément le mot « pansexuel », « moins enfermant » que « bi », selon elle.
Les « pan » peuvent s’estimer plus « libres » dans leurs attirances, mais ils sont confrontés à de nombreux clichés, parfois très « vexants », relève la formatrice. « Certains les imaginent comme des gens hypersexualisés, infidèles, à qui il manque toujours quelque chose ». Et même dans les milieux LGBT, les stéréotypes sont fréquents, ajoute Mme Saint-Réquier: « On va dire du bi ou du pan qu’il n’a pas fait vraiment son coming out, qu’il n’assume pas ».
La différence entre « bi » et « pan » peut être vue comme une « nuance », « mais elle m’importe beaucoup », souligne Léticia Berkate, également membre de « Bicause ». A 24 ans, la jeune femme vit en couple avec un homme, et de ce fait pourrait « passer pour hétéro aux yeux de la société ». « Mais ça n’est pas mon ressenti: je pourrais être attirée par une femme. Ce qui ne veut pas dire que j’ai nécessairement envie d’aller voir ailleurs ».
« J’ai aussi entendu que tout ça n’était qu’un prétexte pour avoir un maximum de partenaires », se désole Léticia, qui vit malgré tout son orientation comme une « richesse ».
Dans une « société hétéro-normée » qui exerce une pression pour que chacun « porte un masque de séduction en permanence », « moi, paradoxalement, je ne ressens pas ça avec toutes les personnes que je rencontre : je suis capable d’avoir des amitiés avec les deux genres sans ambiguïté et je me sens donc plus libre dans mes relations ».
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