Pour les petits et les grands, jouer est une véritable nécessité

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Les enfants qui jouent ne se contentent pas de passer du bon temps. Ils développent toutes sortes d’aptitudes et stimulent leurs fonctions cérébrales. Les spécialistes nous encouragent à continuer de jouer, même à l’âge adulte.

L’une des premières choses qu’un pédiatre demande à la maman d’un petit malade est: « Joue-t-il encore? » La question n’a rien de surprenant. Un enfant qui ne joue pas/plus ne se développe pas correctement. Ce qui explique l’importance de ne pas interrompre trop longtemps la fonction jeu.

Jouer est essentiel dans l’apprentissage d’un grand nombre de compétences. Des études menées sur des animaux ont démontré que limiter les possibilités de jeu empêche le bon développement du cerveau. Les images poignantes des petits orphelins d’Europe de l’Est, rivés à leur lit, montrent clairement les conséquences d’un manque d’éveil au jeu dans la petite enfance: ces bébés deviennent des enfants apathiques. Tout manque d’espace pour jouer librement, de contact avec autrui et de possibilités d’exploration de l’environnement s’accompagne d’importants retards de développement.

Poser les bonnes bases

Pour les petits et les grands, jouer est une véritable nécessité
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Les bébés qui attrapent des objets et jouent à faire coucou, les enfants en maternelle qui s’exercent à empiler des blocs et courent en rond s’amusent. Mais ils apprennent aussi à se connaître et à explorer le monde autour d’eux, ce qui est infiniment précieux pour plus tard. Le jeu amène les enfants à bouger. Or bouger permet de se détendre après l’effort, en particulier après une longue journée d’école. Le jeu apprend comment se comporter avec autrui et comment gérer ses petits revers ou ses déceptions.

Le simple fait de jouer aux petites voitures est déjà riche d’enseignement: si je fais ceci, il se passera cela. En grimpant inlassablement sur un banc et en tombant, l’enfant apprend à maîtriser son corps et comprend que la persévérance est payante. Chose indispensable pour devenir un jeune adulte patient.

Le bonheur de ne rien faire

Les enfants ont souvent des agendas de ministre. Ils semblent souffrir, comme nous, d’un cruel manque de temps pour rêvasser. Les pédagogues mettent en garde contre la course aux activités extra-scolaires toujours plus nombreuses. « On laisse de moins en moins de place au jeu », regrette Klaar Aerts, ex-enseignante en maternelle et membre de l’équipe pédagogique à la Fédération des écoles Steiner. « Dès qu’un enfant s’ennuie ou tourne en rond, on est tenté de lui proposer une activité. Les jeunes qui traînent en rue risquent une sanction administrative communale. Or c’est précisément quand on ne fait rien ou qu’on joue librement que l’on apprend et que l’on se développe. Le jeu aide l’enfant à se comprendre et à comprendre le monde qui l’entoure. »

« Le penseur allemand Friedrich Schiller disait que l’être humain n’est pleinement humain que lorsqu’il joue, cite Klaar Aerts. C’est dire si l’on fait fausse route en voulant programmer et occuper la moindre plage de temps. On ne supporte plus de faire quoi que ce soit gratuitement, sans but. Les parents participent à cette dérive. Pas toujours consciemment mais ils se sentent vaguement coupables: le peu de temps qu’ils passent avec leurs enfants doit être mis à profit. Alors que l’ennui et une saine frustration aident les enfants à développer leur imaginaire et posent les bases d’un retour sur soi, chose primordiale pour leur vie future. »

Le psychiatre perché

Au cours de l’histoire, on s’est assez peu penché sur l’importance du jeu. A en croire le psychiatre Stuart Brown, les investisseurs potentiels y ont vu un sujet bien trop léger. Pour prendre un peu de hauteur, Brown a installé son bureau dans un arbre et n’hésite pas à se balancer de temps à autre au bout d’une liane. En tant que spécialiste, il connaît l’importance du jeu et s’est passionné pour la question après avoir sondé pendant des années le comportement de meurtriers en série. Il en a déduit un trait de caractère commun chez ces serial killers: l’absence d’espace de jeu et de liberté pendant l’enfance.

En jouant, l’enfant apprend à tenir compte du caractère et de la sensibilité d’autrui. Il apprend à se concentrer et à gérer ses émotions, comme la colère ou la déception lorsque les choses ne se passent pas comme il le voudrait ou qu’un copain ne veut pas jouer avec lui.

Pour les petits et les grands, jouer est une véritable nécessité
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S’amuser, une nécessité

Stuart Brown plaide pour que l’on conserve des plages de jeu à l’âge adulte. Selon lui, le besoin de jouer serait inscrit dans notre nature humaine. Il décrit le jeu comme le type même d’activité sans but. Sa seule finalité: s’amuser. Pour lui, le contraire du jeu n’est pas le travail mais la dépression. Pour l’adulte, jouer, cela peut être danser, voir un film, faire une balade vivifiante, lancer un bâton à son chien, nager, flirter ou organiser des jeux de société. Il est primordial de réserver du temps pour tout cela. Car, assure Stuart Brown, un adulte qui joue se montre plus optimiste, plus empathique, plus souple, moins craintif face à l’avenir.

Un signe de talent

Les spécialistes ont observé la manière dont jouent les enfants souffrant de troubles psychiques : leur façon de jouer ensemble, d’accepter l’échec, d’obéir aux règles, de trouver des solutions, de se montrer imaginatifs… Ils en ont tiré de précieuses informations sur ce qui préoccupe ces enfants, leur manière de se voir et de voir les autres.

Plus tard aussi, la façon dont on joue peut en dire long. Danielle Krekels a travaillé durant des années au sein d’un bureau de chasseurs de têtes et a vu défiler des milliers de postulants. Elle s’est rendu compte que le choix des jeux que fait un enfant de 4 à 12 ans révèle ses talents naturels. S’appuyant sur cette constatation, elle a mis au point la méthode Core-Talents. « Il est difficile de choisir des jeux et jouets à la place d’un enfant », explique-t-elle dans une interview au magazine Klasse. « Pour mon fils, j’avais choisi des jouets responsables, mais je voyais bien qu’il était plus attiré par les armes en plastique. Les enfants décident eux-mêmes quels sont leurs jouets préférés. Et cela peut nous apprendre pas mal de choses. »

Stuart Brown estime, lui aussi, que la manière qu’a un enfant de jouer en dit long sur son avenir. Etiez-vous de ceux qui aiment construire des cabanes, lire pendant des heures ou jouer dehors avec le chat ou le chien? Ces préférences éclairent vos points forts et vos faiblesses. Or quand on les connaît, cela permet d’éviter de se tromper, plus tard, au moment de choisir des études ou d’accepter un emploi.

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