Poundbury, le petit village de carte postale sorti de l’imagination du roi Charles

Poundbury angleterre
© Belga Images

Pour comprendre comment le roi Charles III rêve l’architecture de son Royaume-Uni, il faut se rendre à Poundbury dans le sud-ouest de l’Angleterre et déambuler dans les rues de ce village « modèle » qu’il a imaginé de toutes pièces il y trente ans.

Connu pour ses prises de positions écologistes, le roi Charles l’est aussi pour sa croisade de longue date contre l’architecture moderne. Au début des années 1990, il décide de mettre ses idées en pratique en soutenant la construction de Poundbury, un lotissement « modèle » sur ses terres du Dorset où vivent désormais quelque 3.500 habitants. 

Ici, pas de béton ou presque, les grandes maisons et les bâtiments municipaux ont été construits en pierre, donnant l’impression qu’un quartier londonien huppé s’est délocalisé à la campagne.

« Charles tenait beaucoup à ce que le projet soit développé conformément à ses idées passionnées en matière d’architecture », explique à l’AFP Blake Holt, président de l’association des habitants de Poundbury. 

« Il s’agissait de fournir aux gens des logements de bonne qualité, agréables à regarder, et de créer un lieu de vie agréable », ajoute-t-il depuis le Duchess of Cornwall Pub, nommé ainsi en l’honneur à la reine consort Camilla.

Charles et Camilla, avant de devenir roi et reine, étaient les duc et duchesse des Cornouailles, des titres que portent désormais le fils aîné du roi, William, et sa femme Kate. 

Le roi a toujours été fermement opposé à l’architecture moderne, une prise de position qu’il a développée dans un livre en 1989 intitulé « Vision of Britain ». Quelques années plus tôt, il avait fait capoter un projet d’extension de la National Gallery sur Trafalgar Square à Londres, le comparant à une « monstrueuse verrue ».

« Ennemis » parmi les architectes

Construit dans un style géorgien néoclassique, le lotissement qui jouxte la ville de Dorchester est censé refléter la vision architecturale du roi mais est critiqué depuis sa création pour être une sorte de « Disneyland féodal » en raison des styles architecturaux hétéroclites adoptés.

« Au fil des années, (le roi) s’est certainement fait des ennemis au sein des architectes », sourit Matthew Carmona, professeur d’urbanisme au University College de Londres.

Mais il admet que le monde de l’architecture, d’abord sceptique, « a accepté les messages sur la nécessité de construire de manière plus durable et de construire des lieux où l’on peut se promener et où les usages sont diversifiés ».

Pour les défenseurs du projet, l’engagement de Charles pour développer le secteur des hautes technologies à Poundbury montre aussi que le roi ne vit pas complètement dans le passé.

Alun Reece, directeur d’une entreprise locale qui construit des équipements aéronautiques, affirme que le village est « bien-pensé pour l’environnement et pour nos salariés ».

Le roi « est vraiment pour le progrès, mais il faut que ce soit du bon progrès », ajoute-t-il.

Les habitants aussi semblent conquis. « A la base, je m’étais dit que jamais je ne déménagerai ici », raconte Heather Fosdike, 60 ans. « Mais après un divorce, je me sens bien et en sécurité en étant seule ».

Le village n’est pas réservé aux personnes âgées : il y a même une école. On ne trouve en revanche aucun panneau de signalisation, une volonté du roi pour inciter les habitants à faire preuve de discernement.

« C’est un lieu super pour élever un enfant », explique Jenny Janthe, une jeune maman de 28 ans qui vivait avant à Londres.

Certains habitants soulignent quand même le manque d’esprit de communauté dans le village. Pour le pasteur Glynn Barrow, c’est notamment car « il y a un fossé à combler, le coût de la vie est très élevé ici mais il y a aussi des logements sociaux ». « Il n’y a pas d’intermédiaire », affirme-t-il.

Si Poundbury appartient au duché des Cornouailles – désormais propriété du prince héritier William -, l’influence de Charles reste très importante. « Il s’est intéressé de près à la question dès le début », explique Jason Bowerman qui gère le développement du lotissement. « Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il continuera à s’intéresser de très près à la question ». 

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