Pendant longtemps, Jonathan Salomon œuvrait dans l’ombre, livrant ses créations sur commande via son compte Instagram. Depuis avril, ce trentenaire passionné a franchi le pas : il a ouvert sa propre pâtisserie à Uccle, où tout est fait maison, chaque jour, par lui seul. Parmi les créations qui affolent les papilles : un paris-brest au praliné maison, salué par les becs sucrés comme l’un des plus addictifs de la capitale.
On l’avait découvert il y a quelques années comme « ghost pâtissier », le temps d’un portrait publié en ces pages. À l’époque, Jonathan Salomon préparait ses douceurs à la commande depuis son appartement. Le 18 avril dernier, il a troqué la discrétion d’Instagram contre une vraie devanture : 622 chaussée d’Alsemberg, à Uccle. Une pâtisserie de quartier, minuscule et soignée, avec un atelier de 30 m² installé à l’arrière du magasin dans lequel il s’agite tel un homme-orchestre du sucre et de la poche à douille.
Salomon a 35 ans et un parcours atypique doublé d’une vraie obsession du goût. L’envie de pâtisser s’est imposée sur le tard, alors qu’il partageait une colocation avec Milan La Roche, futur chef de St Kilda et Fish Tank. En cuisine, Jonathan observe, aide, apprend. Il commence à faire des cookies pour les amis, puis décide de se former à l’EFP. Un cursus bousculé par des départs et par le Covid, mais qui pose les bases. Il affine son geste à La Fleur du Pain, Saint-Aulaye ou Ginko, avant de tester la vente en ligne, avec un succès immédiat – notamment pour son paris-brest, qui devient rapidement culte.
La suite ? Jonathan Salomon s’arrête un temps pour raisons personnelles, puis reprend comme chef de production chez Hopla Geiss, passe brièvement par Aube, puis se relance, cette fois sans filet. «Je savais que si je n’ouvrais pas maintenant, je ne le ferais jamais.»
Le quartier, celui du Globe, l’accueille à bras ouverts. Les habitués du coin, tout comme les fans de la première heure, s’arrêtent au comptoir. La production suit un rythme soutenu. Cookies, brownies, cannelés, financiers en base fixe ; fraisiers japonais, entremets chocolat-passion ou tarte mangue en rotation saisonnière. Chaque semaine, il renouvelle une partie de la carte pour éviter la monotonie. «Je veux proposer des choses qui changent, sans perdre les fondamentaux.»
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À cela s’ajoutent quelques classiques, comme ce fameux paris-brest, désormais sa signature. Contrairement à la célèbre roue de vélo qui a inspiré la forme traditionnelle du gâteau — ce dessert créé en 1910 pour célébrer la course cycliste entre Paris et Brest — celui de Jonathan Salomon se compose de choux individuels, vendus à 3,50 € pièce, dressés en couronne, plus aériens, plus contemporains.
Ce qui le distingue ? Le praliné, d’abord. Jonathan le réalise lui-même, sans raccourci industriel, au prix d’une bonne dose de travail supplémentaire chaque jour. Le goût est pur, intense, la texture fondante, et surtout : une note saline subtile, parfaitement dosée. Une signature inspirée par Philippe Conticini, à qui il voue une profonde admiration, et dont il partage le principe fondateur : « assaisonner la pâtisserie comme on assaisonne un plat. »
Il résume sa botte secrète ainsi : « Rajouter une pointe de sel dans un praliné, c’est ce qui permet de casser la lourdeur du sucre et de réajuster l’équilibre. Comme dans les brownies au chocolat. Le sel révèle, il ne masque pas. »
Ce sens du détail irrigue toute sa production. Les matières premières sont irréprochables : fruits de chez Rino, chocolat Valrhona, farines Foricher. «Je n’hésite pas sur la qualité, même si je fais attention à rester accessible.»
Aujourd’hui, l’atelier de Jonathan Salomon tourne à plein régime. Il produit chaque jour pour la clientèle du quartier mais commence aussi à développer une petite activité B2B. «Je reste prudent, je veux garder la main sur tout. C’est ce qui me plaît dans ce métier : travailler bien, avec précision, sans m’éparpiller.»
Jonathan Salomon n’est peut-être pas (encore) un nom connu du grand public. Mais ceux qui ont goûté son paris-brest savent qu’un nouveau shérif a dégainé sa maryse en ville.
Jonathan Salomon, 622 chaussée d’Alsemberg, à 1180 Uccle. Ouvert du mercredi au samedi de 11h à 18h, le dimanche jusqu’à 16h. Fermé lundi et mardi.