Entre Birkin belge et luxe durable, bienvenue au royaume de la néo-maroquinerie
Alors que les tendances se succèdent si rapidement qu’elles devraient s’accompagner d’un avertissement pour les personnes épileptiques, choisir dans quel sac investir n’a jamais été plus complexe, le « it bag » d’aujourd’hui étant déjà démodé demain. La solution? Opter pour la nouvelle garde de la maroquinerie belge, luxe, cool, et surtout, suffisamment niche pour être toujours hype.
Tout le monde peut avoir un Birkin. Enfin, à condition de pouvoir se le payer, et surtout, de posséder la patience nécessaire pour subir une longue liste d’attente. Mais disons qu’à l’image d’un manteau camel Max Mara ou d’une paire d’escarpins Louboutin noirs, il s’agit-là de valeurs sûres qui font l’unanimité. Nul besoin d’avoir un goût affirmé pour s’offrir une de ces pièces jamais démodées et toujours admirées. Et c’est très bien comme ça, ces vêtements et accessoires dont l’élégance transcende les tendances faisant office de valeurs refuge dans le tourbillon toujours plus rapide de la succession des modes. Problème, comme susmentionné: tout le monde ne peut pas se les offrir, loin de là. Et puis tout le monde ne désire peut-être pas non plus le faire, même si le budget le permet. Posséder un classique indémodable, oui, mais immédiatement reconnaissable, et arboré par un nombre incalculable d’autres élégantes? Bof. Raison pour laquelle l’essor fulgurant de la nouvelle maroquinerie belge est des plus réjouissants. Chic mais cool, précieuse tout en restant accessible, la relève est assurée, et assure l’allure.
Dont acte avec un des derniers arrivés dans le paysage des accessoires de luxe, Voort Studio et ses créations qui évoquent tant les modèles cultes d’Hermès que les sacs ultra désirables de The Row. Ce qui n’est pas si étonnant que ça puisque si Claire Vandervoort est bien une de nos compatriotes, c’est depuis sa ville d’adoption, Los Angeles, qu’elle imagine ses sacs au raffinement nonchalant typique de la Californie.
Dior, Chanel, Vandervoort
C’est en 2021, après une première carrière prometteuse dans le secteur des affaires, que Claire Vandervoort décide de réaliser son rêve. Soit la concrétisation de sa passion de toujours pour la mode, avec, en tête, un objectif précis: répondre au besoin d’accessoires durables et intemporels, accessibles mais précieux, et pensés pour être tant à leur place à un brunch décontracté qu’à un de ces meetings tirés à quatre épingles qui étaient autrefois le quotidien de Claire.
Le résultat: une collection compacte, qui préfère la qualité à la quantité. Porte-clefs, portefeuille, mais aussi et surtout, sac, le modèle Elise, qu’on qualifierait bien de « Birkin belge » si on se laissait aller aux comparaisons faciles.
« Je cherche à repousser les limites de la mode tout en respectant l’essence du passé, confie Claire. Chaque création représente un pas en avant, qu’il s’agisse de styles innovants ou de réimaginations artistiques de concepts classiques. Avec chaque accessoire, je veux transformer les moments ordinaires en expériences extraordinaires. Qu’il s’agisse d’une soirée, d’une journée lambda ou d’un voyage important, Voort Studio est le partenaire de tous les beaux moments qui vous attendent. »
Et si le label n’a pas encore soufflé ses cinq premières bougies, sa créatrice lui prédit déjà un bel avenir. Enfant d’un pays célébré tant pour le chocolat et la BD que pour son apport au monde de la mode, Voort Studio a l’assurance des grands. « Notre attention minutieuse au moindre détail garantit que chaque pièce incarne la véritable essence du luxe. Dans un monde souvent défini par l’exclusivité, nous offrons une perspective nouvelle – un doux rappel que des noms emblématiques tels que Dior et Chanel étaient autrefois de simples noms de famille » pointe Claire.
Qui n’est pas la seule à broder un futur des plus prometteurs à la maroquinerie belge.
« Le vrai luxe est conscient et authentique »
Le slogan de Sepi Agari, le tout jeune label de Sepideh Asghari? Creato con amore. Une manière de signifier que ses sacs et accessoires en cuir dessinés à Anvers sont produits en Italie, mais aussi et surtout, de signifier que cette percée dans le secteur est la conséquence de sa décision d’oser suivre son coeur. Comme sa compatriote Claire, Sepideh a elle aussi fait son entrée dans le monde du travail dans un secteur plus « stable », celui de la finance en l’occurence, avant d’opter pour un projet qui la fait vraiment vibrer.
C’est à dire le lancement de sa propre marque, un projet mûri lors d’une formation au travail du cuir en Italie et dévoilé à l’aube de 2024. Déclinée dans une gamme de couleurs neutres de bon ton, avec, ici ou là, un cuir vieux rose ou vert feuillage, la collection inaugurale de Sepi Agari est d’une qualité qu’on retrouve rarement chez les jeunes labels.
C’est que la jeune femme a eu l’intelligence de s’entourer d’artisans habitués à collaborer avec les grands noms de la couture, et de travailler du cuir de première qualité, sans pour autant faire exploser le budget. À 220 euros la pochette, on est en effet loin, très loin, des prix stratosphériques de certains it-bags.
« Le vrai luxe est conscient, authentique et intemporel » assure Sepideh Asghari, qui refuse de transiger sur la durabilité. Ainsi, chaque pièce est produite à la main par des artisans italiens, les matériaux utilisés sont biodégradables et leur emballage est labellisé FSC. « En tant que marque de luxe responsable, nous nous engageons en faveur du développement durable et de la promotion des pratiques de slow fashion. Nos produits et nos processus de production sont conçus pour être éthiques, respectueux de l’environnement et atteindre le plus haut niveau de normes de durabilité tout au long de leur cycle de vie. Nous nous approvisionnons auprès de fournisseurs soucieux de l’environnement et nos processus de production locaux donnent la priorité à la réduction des déchets grâce à la biodégradabilité, à l’efficacité énergétique, au respect des droits de l’homme, à des pratiques de travail responsables, au recyclage et à l’upcycling des cuirs usagés » explique encore la jeune femme.
Luxueuse mais accessible, élégante sans être empruntée, et surtout, consciente que le chic ultime est d’être aussi belle que respectueuse de la planète: la néo-maroquinerie belge aurait-elle tout bon?
Grande distinction
Difficile de ne pas l’affirmer en admirant les créations signées Enamoure, le label fondé par Estelle Hanet-De Merode. Tirant son nom du verbe énamourer, soit « inspirer de l’amour, des sentiments très tendres », la marque belge fondée en 2021 tient cette promesse. Puisant son inspiration dans l’esthétique de jadis, Enamoure la fait revivre sans succomber au pastiche, le choix d’un cuir fluorescent ou d’une ligne légèrement incurvée leur insufflant une folle modernité – et une allure immédiatement reconnaissable pour les fans de la marque.
Dont la jeune créatrice fait preuve d’une approche mature et maline du secteur. « Je suis persuadée qu’il faut se distinguer quand on conçoit des sacs à main de luxe. En persévérant dans mes recherches et dans mon travail, je me rapproche chaque jour un peu plus de mon idéal. Avec Enamoure, je veux présenter une collection complète de sacs élégants et qualitatifs, au look à la fois rebelle et rétro chic, pour trouver un écho auprès des élégantes modernes » confie Estelle Hanet-De Merode. Et ici aussi, on est sur un luxe qui reste accessible: compter entre 410 et 730 euros le sac, réalisé de manière artisanale et durable. Pas donné, certes, mais la qualité a un prix, et celui-ci reste bien plus raisonnable que les (dizaines) milliers d’euros demandés pour certains modèles de marques concurrentes. D’autant qu’ici, on s’offre un accessoire à l’approche essentielle.
« Pour nous, la durabilité n’est pas seulement un mot à la mode, c’est un élément fondateur de notre identité. Nous sommes profondément engagés à prendre soin de l’environnement et nous ne faisons aucun compromis sur la qualité, l’artisanat ou le design. En tant qu’entreprise de mode spécialisée dans les sacs à main en cuir, nous sommes conscients de l’influence considérable de la mode sur l’empreinte écologique mondiale. C’est pourquoi nous restons résolument attachés aux principes du développement durable, notamment à l’utilisation de matériaux respectueux de l’environnement et à l’adoption de procédures de fabrication responsables » assure encore Estelle. Qui se dit convaincue que la mode « ne doit pas seulement exprimer une déclaration, mais aussi exercer une influence positive sur notre planète. »
L’affaire est dans le sac
Signe des temps et de la joyeuse émulation qui secoue le royaume de la maroquinerie belge, des marques qui ne se préoccupaient pas encore de ce rayon mettent désormais l’affaire dans le sac. Façon pochon en soie, ou mieux encore, en « scarfbag » à l’allure à la fois moderne et intemporelle, les sacs estampillés La Collection sont ainsi éminemment désirables.
Et produits, comme chacune des pièces imaginées par Florence Cools et Artur Tadevosian, dans le respect des coupes, des matières, mais aussi de l’artisanat et d’une approche consciente et respectueuse de la mode. Moins, mais mieux, et de meilleure qualité: un credo indissociable de la maroquinerie belge.
Mais aussi un parti pris irrésistible, qui séduit une clientèle exigeante et informée ainsi que les créateurs du plat pays. Connue et célébrée pour ses souliers sensuels au possible, Virgine Morobé a lancé à l’automne 2023 sa première collection d’accessoires. Une expansion née de sa collaboration avec le nouveau directeur créatif de la marque, Bernard Tournemenne, qui a vu Morobé proposer bijoux, ceintures… et sacs à main, ça va sans dire.
Dévoilés en exclusivité en plein coeur de l’été, les deux premiers modèles, un ample sac de voyage en raphia et un sac seau au chic espiègle, ont été en rupture de stock en une semaine seulement. Avant d’être relancés sur commande, et accompagnés d’une pochette bouffante et d’un sac à main que ses créateurs décrivent comme étant « intemporel ».
Un qualificatif auquel on pourrait reprocher d’être galvaudé, mais qui semble pourtant être le plus à même de décrire l’enthousiasmant renouveau de la maroquinerie belge. En s’inspirant du passé et de son respect de l’artisanat tout en regardant fermement vers le futur, et la nécessité d’une mode durable et responsable, les nouvelles marques apparues ces dernières années au royaume des accessoires hissent haut les couleurs du drapeau. Noble Belgique, oh que oui.
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