La main aux paniers. bio
Nouvelles stars des circuits alimentaires courts, les paniers bio connaissent un succès croissant. Désormais accompagnés de recettes de chefs ou de conseils de nutritionnistes, ils collent à l’air du temps.
àaussi via Facebook ou SMS
» Le déclic a été pour moi une émission de radio sur les aberrations écologiques auxquelles nous contribuons tous sans le savoir. Je me sentais assez peu en cause jusqu’au moment où j’ai appris l’impensable à propos des crevettes grises qui garnissent mes pistolets le dimanche matin : péchées en Mer du Nord, décortiquées au Maroc, pour finalement être ramenées dans les étals des grands magasins. J’avoue avoir été atterrée. Me sentant coupable, je me suis mise à me renseigner sur les circuits alimentaires courts. C’est comme cela que j’en suis venue à m’abonner à un service de paniers bio. » A 34 ans, Claudine a rejoint la communauté des » locavores « , citoyens bien décidés à consommer des produits locaux. Pour ceux-ci, le panier bio est un must qui remplace avantageusement la très contraignante visite à la ferme ou même le déplacement rituel jusqu’à l’échoppe de marché.
Généralement distribués de façon hebdomadaire, les paniers bio proposent un assortiment de fruits et légumes de saison provenant d’agriculteurs établis en proximité. Le concept n’est pas neuf. On l’a vu émerger en France au début des années 80 quand une poignée d’agriculteurs – relayée par des consommateurs conscientisés – s’insurgeait contre la mainmise de la grande distribution sur l’alimentation. Signal d’alarme environnemental et air du temps obligent, nombreux sont les consommateurs qui souhaitent se rapprocher des producteurs et envisager leurs repas quotidiens sous le signe de la traçabilité. Du coup, cette approche connaît aujourd’hui une nouvelle jeunesse à New York, Paris ou Bruxelles. Même si ce phénomène reste marginal dans les statistiques de consommation globale, on constate un engouement réel qui débouche sur un réseau touffu de fournisseurs, qu’ils soient directs ou intermédiaires. En quelques années, les points d’enlèvement de paniers se sont multipliés par cinq – du magasin végétarien à la pompe à essence en passant par les armoires spécialement conçues à cet effet – et de nombreux sites internet consacrés au sujet ont vu le jour.
L’une des raisons de cet essor est que tout le monde s’y retrouve. En aval, les consommateurs ont là une possibilité unique de manger sainement tout en apaisant leur conscience écologique. Tandis qu’en amont du circuit, les agriculteurs y voient une opportunité commerciale de type » fair trade « . Basés sur un système d’abonnement, les paniers bio assurent un volume de vente constant. Certains fermiers se félicitent également d’éviter de nombreuses heures consacrées à vendre sur les marchés. Sans compter que, débarrassés de puissants intermédiaires soucieux de soigner leurs marges, les producteurs amortissent plus justement le surcoût qu’induit une production de qualité biologique.
Une offre calibréeà
Les concepteurs des paniers bio nouvelle génération ont aussi compris qu’il fallait se calquer sur les modes de vie actuels. A quoi bon un panier bio si c’est pour en jeter la moitié ou ne pas savoir comment cuisiner certains légumes oubliés ? L’offre se doit d’être pensée, variée mais également simple et rapide à préparer.
Serge Deloos, le fondateur de la Belle Verte, livre son point de vue : » On a lancé nos paniers il y a un an. L’idée était de jouer les intermédiaires entre des familles soucieuses de se nourrir sainement et des maraîchers dont nous apprécions le travail. Comme cela faisait quelques années que nous suivions le concept, nous avons voulu nous démarquer. On a constaté qu’il était contreproductif de laisser les gens seuls face à leur livraison. Il fallait apporter quelque chose de plus qui leur permette d’en tirer tout le bénéfice. Nous avons contacté un médecin-nutritionniste pour qu’il élabore des recettes qui accompagnent les paniers. Aujourd’hui nous avons la confiance de 200 familles qui accèdent à leur panier grâce à un numéro de code au travers d’un réseau de points de collecte implanté chez des particuliers. «
Mais les paniers bio surfent aussi sur les dernières tendances en matière de communication et de réseaux sociaux. Cookitude livre des packages classiques mais propose également chaque semaine une nouvelle recette assortie d’un panier » deux personnes » via Facebook ou même par SMS. Le procédé est simple : après s’être inscrit, on est tenu au courant chaque mercredi de la recette hebdomadaire. Séduit par l’une d’entre elles ? On se rend sur le site Cookitude et on effectue sa commande en ligne avant 11 heures. Fin d’après-midi, le » panier à cuisiner » – écolo et de saison – est alors déposé dans le point d’enlèvement le plus proche. Ici, ce sont clairement les trentenaires actifs qui sont dans la ligne de mire. Ceux-là mêmes qui un soir mangent chez eux, le lendemain au restaurant et le surlendemain chez des amis. D’une grande liberté, la formule libère de la contrainte du panier hebdomadaire et permet d’évaluer en un clin d’£il le temps que l’on pourra éventuellement consacrer au repas du soir.
Bio4you, quant à lui, est un concept qui se présente comme une » plate-forme de livraison directe du producteur au consommateur en toute transparence « . Les paniers se nomment ici » BioBox « . Le plus ? Une série de recettes élaborées par Sophie Millot, chef ayant travaillé chez Georges Blanc et Yves Mattagne, références en la matière. Par l’intermédiaire d’un blog, elle livre un large panel d’idées gourmandes, entre piperade basque et nouilles chinoises aux scampis. Mieux, elle concocte des paniers à thème, les BoxMenu – par exemple autour des légumes oubliés -, soit une démarche qui concerne davantage les gastronomes en herbe qui se font une fête de la préparation d’un repasà et dont le temps est moins compté.
D’autres concepts, comme Mandala Organic Growers, flirtent avec les limites du genre. Inspirée par le mouvement Slow Food – qui prône le respect des saisons en matière d’alimentation -, cette approche s’appuie sur un réseau de producteurs italiens et britanniques. Le résultat ? Des paniers 100 % écolo avec plus de variété – ce qui est bienvenu pour des consommateurs habitués aux vastes rayonnages des supermarchés – mais dans lesquels l’idée d’un circuit alimentaire court perd de sa force.
Carnet d’adresses en page 40.
Michel Verlinden
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