Sculpteur de silhouette, cette pièce phare de la garde-robe hivernale est le mantra des créateurs, qui le déclinent sous toutes les formes : cocon, fifties, duffle-coat ou cape.

« On avait envie de manteaux qui aient l’aspect de la ouate que l’on gratte à la main comme un Demak’Up, d’une ambiance de cocon avec des matières au-delà du tissu, liées à l’émotion « , expliquait Guillaume Henry à l’issue du défilé Carven de l’automne-hiver 13-14. Aussi roses et généreux qu’une barbe à papa, ces habitacles moelleux taillés pour la caresse sont aussi capables d’amortir n’importe quel choc venu de l’extérieur…

Cette saison, le manteau pousse sa fonction de protection à des degrés de raffinement et d’individualisme extrêmes. Un parfait remède pour lutter contre les hivers à rallonge et le contexte de crise économique. Les créateurs l’ont bien compris qui l’érigent en must-have. Best-seller maison, le modèle oversize de Céline s’offrait ainsi sur le podium une quinzaine de variantes. Tandis que MaxMara, qui a fait de cette pièce son fer de lance, jouait, dans un esprit Bauhaus, sur la pureté de ses constructions souvent monumentales et sur la volupté de matières comme l’angora ou le mohair. Pas de doute, le manteau est devenu aujourd’hui la cathédrale du luxe. Un juste retour à ses origines. Car ce vêtement protecteur fut d’abord réservé aux puissants. Ainsi, dans la Rome antique, l’homme libre enroulait sa toge pour se différencier des esclaves ; de même, au Moyen Age, seuls les nobles avaient le droit de porter la houppelande. Démocratisé depuis, le manteau féminin affiche son élitisme à travers ses coupes et ses matières, empruntées à l’univers… masculin. Par exemple, les modèles de notables en laine grise ou à carreaux, volés aux hommes dans les années 40, donnent de la carrure aux femmes de pouvoir, sans pour autant nier leur nature : chez Louis Vuitton, on les porte sur une nuisette ou rebrodés de paillettes. Et, à l’autre bout de la décennie, les lignes chères au New Look de Dior – petites épaules, taille ajustée et jupe longue – exacerbent une féminité classique, remise au goût du jour par son successeur Raf Simons. Sans oublier la nostalgie collégienne et unisexe du duffle-coat, dont Hedi Slimane a su exploiter, pour Saint Laurent, la fibre rock et rebelle, ou de la cape. Pas de doute : cet hiver, le manteau transcende les genres et les styles.

OVERSIZE MASCULIN

L’origine. La masculinisation des manteaux ne date pas d’aujourd’hui, preuve en est cet épais manteau que l’actrice Louise Brooks portait dans le film de Howard Hawks Une fille dans chaque port (1928). Le pardessus d’homme pour femme ? Une vieille histoire d’amour et gage d’un réchauffement climatique entre les genres, jusqu’au fameux  » j’ai piqué la veste de mon homme « .

La version hiver 13-14. On augmente les niveaux… et les volumes. Le manteau se veut XXL, de forme ovoïde, en fourrure ou en mohair gratté, avec des épaules démesurées.

Comment le porter. Objectif : jouer le contraste. Sous l’épaisseur de ces modèles colorés au pourcentage de cachemire assumé, on optera pour une silhouette plus sensuelle. Un décolleté, une chemise ouverte ou un col roulé près du corps. Sous la glace, le feu.

DUFFLE-COAT COLLÉGIENNE

L’origine. Ce manteau à capuche en laine fermé par des brandebourgs entre en 1863 dans l’uniforme de la Royal Navy. Le modèle préféré du maréchal Montgomery deviendra vite un fétiche B.C.B.G., puis rock grâce à des groupes comme Oasis ou Franz Ferdinand.

La version hiver 13-14. Chez Saint Laurent, il clame haut et fort la nostalgie pour les années collège, en version laine grise traditionnelle. Chez Givenchy, patchs de cuir et attaches métalliques lui donnent une touche de sauvagerie empruntée aux bikers.

Comment le porter. On n’hésite pas à jouer les contrastes en l’associant à des minirobes en mousseline et des boots de motards, dans un esprit très grunge Château Marmont.

CAPE & CAFTAN ÉPURÉS

L’origine. Elsa Schiaparelli impose la cape dans ses collections jusqu’à la décorer des ors de Versailles. En premier fan de la créatrice, Yves Saint Laurent l’enrichit de broderies et de passementeries, le tout venu des contrées du Levant.

La version hiver 13-14. Elle est caftan en cachemire ultraluxe chez Hermès pour bourgeoise chabrolienne, ou très retour de Marrakech, en burnous blanc immaculé chez Valentino.

Comment les porter. En soirée, sur une blouse en soie blanche, et en journée, avec un pull à col roulé et des bottes cavalières. Une amazone 2014.

CINTRÉ FIFTIES

L’origine. Voilà un ami fidèle qui n’est pas né de la dernière pluie. Sa victoire historique se règle au pas du New Look, quand Christian Dior accentue la taille à outrance avec toute la nostalgie qui le caractérise dès 1947.

La version hiver 13-14. Cette saison, le manteau cintré version fifties, sublimé par les dessins de René Gruau pour la maison Dior, fait son come-back. Il se pique également d’une pointe d’esprit 1980, période Gaultier Junior. Les manteaux zippés de Miu Miu évoquent aussi un esprit plus rock.

Comment le porter. Ne pas hésiter, toutefois, à le rattacher à ses premières amours : des talons à bouts pointus, un pull en cachemire près du corps, digne de la plus vénale des secrétaires de Mad Men, et un brin de rouge à lèvres. Le tour est joué : vous êtes une Jolie Madame.

PAR CHARLOTTE BRUNEL ET FABRICE PAINEAU

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