Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Le café, c’est branché ! Un engouement qui génère ses nouvelles stars : les baristas, des spécialistes passés maîtres dans la préparation de délicieuses recettes à base de café. Démonstration par Fritz Storm, l’un des plus talentueux.

Délice séculaire, le café est aujourd’hui un véritable phénomène planétaire. Depuis peu, il se complexifie et gagne en qualité. Face à la mondialisation des denrées et des savoirs, les consommateurs sont devenus plus exigeants. Les professionnels du secteur, eux aussi, ont largement contribué à la vulgarisation du produit. A l’image de la marque italienne Illy qui s’impose à présent comme l’un des meilleurs cafés industriels au monde.

Née en 1933, Illy n’a cessé d’£uvrer pour l’amélioration du café, qu’il s’agisse du stockage ou de la torréfaction. A l’heure où de nouvelles tendances émergent, la société de Trieste est plus active que jamais. Pour preuve, elle confie aux baristas les plus en vue l’élaboration de mélanges produisants des cafés savoureux issus d’une véritable  » mixologie « .

Barista ? Venu d’Italie – seul pays où cette profession est institutionnalisée -, le terme désigne les spécialistes de la préparation du café. Au sud des Alpes, on ne plaisante pas avec l’expresso ou le cappuccino. Dans ce pays, à l’image du thé en Extrême-Orient, faire du café s’apparente à un culte. Avec ses rites et ses gestes codifiés. Les vrais pros du café le servent au degré et au centilitre près.

Cette tradition italienne a créé une véritable émulation. Ainsi, aux quatre coins du globe se révèlent aujourd’hui de talentueux baristas. La génération montante fait preuve d’une créativité débordante et un championnat mondial des baristas (WBC) a même vu le jour. Avec pour ambition de livrer  » l’expérience ultime en matière de café « , ce concours est devenu la référence du secteur. Loin d’être un événement réservé aux professionnels, il draine une foule d’amateurs. Le principe de la compétition ? Servir un expresso, un cappuccino et un  » signature beverage  » – soit un mélange original et sans alcool ayant l’expresso comme point de départ – à quatre juges différents. A noter : le niveau actuel des baristas serait tel qu’il deviendrait urgent de concevoir une formation adéquate pour les juges dont les compétences ne suffiraient plus.

S’il est un barista surdoué, c’est bien Fritz Storm. En une décennie, ce jeune Danois est devenu une sommité dans le monde du breuvage noir. Comptable de formation, c’est, dès 1994, au Café Europa, l’une des adresses phares de Copenhague, qu’il s’initie à l’art de faire un bon café.  » Certains jours, je préparais jusqu’à 1 000 expressos, il n’y a pas mieux pour se faire la main « , précise ce trentenaire trendy. En 2002, il concourt avec succès au World Barista Championship : il est sacré champion du monde.  » A l’époque, j’étais techniquement très au point, confie-t-il, Mais grâce à mon titre, j’ai pu aller dans différentes plantations à travers le monde, au Brésil notamment. C’est là que je me suis vraiment formé, en acquérant une connaissance concrète. Quand on se rend compte qu’il faut 5 000 grains pour 1 kilo de café, on réfléchit à deux fois avant de gaspiller le moindre grain. Un vrai barista est celui qui a pu faire le chemin entre la plantation et la tasse de café. « 

Fritz Storm a aujourd’hui créé sa propre société de consulting. Il aide ainsi les bars et les restaurants désirant proposer à leurs clients un café préparé dans les règles de l’art. Sa société propose aussi des ateliers permettant aux sociétés et aux particuliers d’acquérir un vrai savoir sur ce produit. Notre barista travaille également pour les grandes marques de café. Illy mise beaucoup sur son savoir-faire, non seulement pour former son personnel mais également pour développer de nouvelles associations de saveurs. Le Danois compose ainsi de multiples recettes où il s’amuse à prospecter toutes les qualités gustatives du café. Dans son  » laboratoire « , il expérimente des recettes… de la forme du contenant aux harmonies possibles avec la nourriture.

L’autre facette des talents de Fritz Storm réside dans son habilité technique. Il faut voir les magnifiques motifs qu’il dessine à même la mousse d’un cappuccino. Cela grâce à une gestuelle savamment étudiée. Paysages dans la brume ou compositions végétales, la maestria du barista s’essaie du côté des estampes japonaises.

 » Un bon café est un équilibre : une juste proportion entre acidité et amertume, martèle Fritz Storm. De même, il doit entièrement tapisser la bouche… La technique de l’expresso, elle, doit être maîtrisée à la perfection pour pouvoir progresser.  » Au passage, on peut en profiter pour tordre le coup à certains préjugés : servir un expresso dans une grande tasse est un sacrilège, de même qu’il est particulièrement barbare d’ajouter du citron pour contrer son amertume. Certains affirment par ailleurs que plus un grain torréfié est sombre meilleur sera l’expresso. Faux. Lorsqu’un grain est presque noir, c’est-à-dire trop torréfié, il perd ses arômes complexes. Idem pour tous ceux qui croient qu’il est bon de conserver le café à expresso au congélateur. Lorsqu’il est congelé, les huiles contenues dans la fève coagulent. Ce sont précisément ces dernières qui doivent s’émulsifier pour exprimer toute la saveur productrice du goût. « 

La réussite passe par la formule des 4M :  » Mélange, Mouture, Machine et Main de Maître « . Le mélange concerne un choix en amont : se procurer un excellent café. La mouture, quant à elle, doit être suffisamment fine. Côté machine, il suffit de voir le soin maniaque avec lequel Fritz Storm entretient la sienne. Quant à la main de maître, c’est  » ce qui fait toute la différence « , lâche Fritz Storm amusé. Là aussi, pas de secret, c’est la répétition des mêmes gestes et la rigueur qui finissent par payer.

Quatre recettes de Fritz Storm, en page 50.

Michel Verlinden

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content