Objets transitionnels

anne.francoise.moyson@levif.be © KAREL DUERINCKX

Il n’y a pas qu’un objet à penser, à détourner, il y en a une foultitude, quelle chance. Une plume, un boulon brut, une fleur qui va inexorablement sur sa déliquescence, un clou recourbé mais coulé d’or, une épingle à nourrice qui dit son rapport au monde, une chevalière réinventée sur le lobe d’une oreille. Depuis que l’être humain arpente cette terre, il s’ingénie à se parer le corps et l’âme. Afin de faire le lien intime et visible entre la réalité intérieure et la réalité extérieure. Il est de ces jardins secrets que l’on aime arborer en 3D – nul besoin pour autant de les traduire en mots, en manifeste. Même si parfois ils font office de tonitruantes déclarations de guerre. Ou d’amour. Quand Stephen Jones, modiste de son état, se retrousse les manches, il est à peine sorti de l’adolescence. Dans cette Angleterre caressée dans le sens contraire du poil par les New Romantics, il se met à créer des chapeaux pour faire la nique à l’establishment –  » un acte de rébellion  » qu’il affiche pour aller danser underground. Si la rage est bien là, l’humour aussi. C’est lui qui interdit à ses bibis de prendre une seule ride. Et c’est lui aussi qui guide joyeusement Stéphanie D’heygere, créatrice belge d’accessoires basée à Paris. La fille spirituelle des deux Marcel, Broodthaers et Duchamp, a le chic pour transcender l’esthétisme rampant. Tant mieux. D’autant que les objets transitionnels n’ont jamais rien d’un caprice puisqu’ils procurent l’unicité du moi, petit miracle.

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