Rouge Tomate à l’assaut de Big Apple
Ce mardi 28 octobre sera un jour à marquer d’une pierre blanche pour la scène food belge : le restaurant bruxellois Rouge Tomate a ouvert une nouvelle enseigne… au cour de New York. Weekend s’est glissé, en exclusivité, dans les coulisses de ce projet ambitieux. Récit.
Rouge Tomate s’affiche depuis plusieurs années déjà comme une adresse bruxelloise de référence en matière de restauration. Installé dans le cadre d’une harmonieuse maison de maître, dans la prestigieuse avenue Louise, cette enseigne s’est fait connaître au grand public en misant sur une nourriture saine et équilibrée. Mais derrière ses codes couleurs énergisants et sa scénographie dominée par les matières naturelles, elle cache bien plus qu’elle ne montre…
Rouge Tomate bouillonne à la façon d’un laboratoire d’idées en échafaudant un projet aux ramifications multiples. Derrière celui-ci, une véritable stratégie de conquête du marché gastronomique initiée par Emmanuel Verstraeten et matérialisée par les trois lettres de l’acronyme SPE. A la fois charte nutritionnelle et label qualitatif, SPE – » Sanitas Per Escam » en latin, soit » la santé par la nourriture » – est la clé de voûte de la démarche visant à » repenser le rapport au restaurant en évitant lourdeurs et aberrations diététiques « .
En phase avec une démarche sans frontière, le groupe Rouge Tomate intègre aussi un bureau de développement, à Paris. C’est là qu’une équipe de collaborateurs internationaux spécialisés se charge de finaliser le » concept » à travers tous ses métiers. C’est donc depuis Bruxelles et Paris que le premier jalon international du groupe a été élaboré : l’ouverture, ce 28 octobre, d’un restaurant à New York. Une étape cruciale qu’Emmanuel Verstraeten justifie en citant Frank Sinatra dans sa célèbre chanson New York New York : » If I can make it there, I’ll make it anywhere » – » Si je peux réussir ici, je pourrai réussir partout « . Sur l’échiquier Rouge Tomate, New York se positionne, en effet, comme le red carpet en vue de s’offrir une vitrine internationale.
Ouvrir un restaurant à New York n’est pas une mince affaire. Sur place, les projets mégalomaniaques rivalisent de strass et de paillettes et, courtisés comme ils le sont, les New-Yorkais constituent un public exigeant avide de nouveauté. Raison pour laquelle, Rouge Tomate a pensé jusqu’au moindre détail pour frapper un grand coup. Si la charte SPE est un élément important de différenciation – grâce à son contenu mais aussi en raison d’une validation effectuée par un conseil scientifique indépendant -, elle ne constitue pas pour autant le seul maître atout.
Une mise en scène spectaculaire
Pour ce qui est du bâtiment – à deux pas de Central Park et du Cube Apple, sur la 60e Avenue entre la Fifth et Madison Avenue – Rouge Tomate a investi un lieu culte : le Copacabana, un club des années 1930 qui a servi de speakeasy aux gangsters durant les années de la prohibition. L’espace qui se décline sur deux niveaux a de quoi impressionner. Il s’agit d’un parallélépipède de 1 600 m2 dont la capacité s’élève à 271 places assises. A certains endroits de la salle, à travers les deux niveaux, il offre une perspective de plus de 20 mètres de hauteur.
A espace exceptionnel, bureau d’architectes hors du commun. Rouge Tomate a choisi Bentel & Bentel, un cabinet atypique situé à Long Island. Low profile mais ultraprisé, il est réputé pour avoir signé entre autres The Modern – le restaurant du Moma, une adresse élue en 2006 meilleur restaurant du monde par le magazine britannique Wallpaper* -, mais également des endroits incontournables à New York tels que la Gramercy Tavern ou le Craft. Sans oublier Plane Food, le restaurant du chef britannique Gordon Ramsay situé dans le Terminal 5 de l’aéroport londonien de Heathrow.
» Venir chez Rouge Tomate doit s’apparenter à une séance de bien-être durant laquelle on oublie l’agitation extérieure, explique l’une des architectes, Carol Bentel. On doit sortir de ce havre de paix à la fois heureux et ayant fait le plein d’énergie. » Dans les faits, cette approche se traduit par une mise en scène qui ne ménage pas ses effets avec pas moins de sept atmosphères différentes. » On entrera par un pont à côté duquel se dressera une grande tour en bois figurant le logo au moyen de 16 tomates bien réelles, d’herbes fraîches ainsi que d’autres éléments végétaux. Pièce centrale du rez-de-chaussée, le Juice Bar – qui réalisera cocktails et mocktails (des cocktails sans alcool) – se verra aussi drapé dans le bois. Il livrera l’esprit ressourçant du restaurant. Une série de tables composera la partie lounge tandis que des alcôves suspendues défieront le vide en offrant davantage d’intimité. L’étage inférieur, quant à lui, recèlera une cuisine ouverte de 600 m2. Les proportions de celle-ci respecteront le nombre d’or, référence universelle en matière d’équilibre des formes. Ce niveau fera également place à une piscine – la Cranberry Pool à l’intérieur de laquelle pousseront des airelles -, à une série de tables et à une Private Dining Room – PDR – pour des repas plus exclusifs. Sans oublier quatre wine racks – dont un de 20 mètres de longueur – qui conféreront un effet de monumentalité à l’ensemble. «
Le goût du détail
Les pros se sont bousculés sur le chantier. Pour l’acoustique, il a ainsi été fait appel à Ted Rothstein, monstre sacré réputé pour avoir sonorisé les studios d’enregistrement du groupe Pink Floyd. Le tout s’inscrivant dans le » Sustainability « , le développement durable.
Au total, c’est une brigade de 225 personnes qui se démènera tant en coulisses qu’en salle. Aux fourneaux : Jeremy Bearman, un chef de 32 ans qui a grandi dans les faubourgs de New York. S’il a fait ses preuves avec Daniel Boulud et Joël Robuchon, ce talent – qui a également un background universitaire de management hôtelier – a été choisi pour sa maîtrise du métier, son inventivité, sa réceptivité à l’esprit SPE et sa connaissance des fournisseurs locaux. Il travaille selon le principe en vogue du » farm to table » qui garantit aux convives une gastronomie fondée sur la proximité et la saisonnalité des produits. Grâce aussi à des techniques de conservation et de cuisson dernier cri. Absolument fabuleux !
Carnet d’adresses en page 102.
Michel Verlinden
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