Safari… aux Pays-Bas

Le parc national De Maasduinen © BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

Pas besoin d’un vol long-courrier pour s’offrir une aventure en terre exotique. Deux journalistes néerlandais l’ont prouvé en racontant leur incroyable expédition… au fond de leur jardin, ou presque.

Personne ne parlait encore du Covid-19, des frontières fermées et des avions cloués au sol lorsque Bas van Oort et Dirk Wijnand de Jong ont eu une drôle d’idée : apprendre à mieux connaître leur terre d’origine en sillonnant les Pays-Bas de part en part, durant une année entière. De la plage de Katwijk aux bruyères de la Posbank, des quais de Rotterdam aux canaux de Frise, ils ont ainsi bravé ruminants redoutables et pieds mouillés pour dévoiler leur pays dans toute sa tranquillité et sa force, mais aussi sa féerie et sa formidable beauté.

Ces deux journalistes spécialisés dans le tourisme expliquent d’une seule voix :  » Ces dix dernières années, notre métier nous a surtout amenés à découvrir le reste du monde. Il n’était pas rare que nous passions plus de temps loin d’ici qu’aux Pays-Bas. Jusqu’au jour où nous nous sommes demandé si finalement, nous connaissions vraiment notre pays et s’il n’y avait pas des aventures tout aussi belles à vivre sans devoir passer la frontière. En plus, dans un contexte de bouleversement climatique et de quête de durabilité, montrer l’exemple nous semblait un acte important. Nous avons donc pris le chemin du parc national de Groote Peel, des Loonse en Drunense Duinen ou encore des Alde Feanen, autant d’endroits où nous n’avions jamais mis les pieds alors qu’ils se trouvent pratiquement à notre porte, et dont le décor est bien loin de l’image que l’on se fait généralement des Pays-Bas. Une exploration menée en mode  » globe-trotteur « , que nous partagions en direct sur Instagram (@expeditieachtertuin) et qui trouve aujourd’hui sa continuité dans un livre ( NDLR : Expeditie Achtertuin, éditions ANWB, mais disponible uniquement en néerlandais) qui explique les bienfaits d’un voyage d’extrême proximité.  »

Les lacs de Frise
Les lacs de Frise© BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

Le parc national De Maasduinen

 » C’est dans le nord du Limbourg, tout près de la frontière allemande, que s’étend la plus longue ceinture de dunes fluviales du pays, façonnée par l’eau et le vent au fil des millénaires, à une époque où la Meuse n’était encore qu’un affluent du Rhin. On y trouve notamment des dunes paraboliques en forme de fer à cheval pouvant atteindre 15 à 25 mètres de hauteur, des forêts de feuillus et de conifères, et même des bruyères que les moutons, les chèvres et les vaches se chargent de protéger de la prolifération de plantes comme la molinie bleue ou les ronces.  »

Les lacs de Frise

 » Du lac de l’IJssel à Lauwersoog, les plans et cours d’eau de Frise sont tous reliés entre eux, ce qui signifie qu’il est possible, au départ de Lemmer, de rallier la côte de la mer des Wadden à hauteur de Schiermonnikoog par les voies intérieures. En cours de route, on croise une foule de petits villages – comme celui de Gaastmeer – qui ne comptent pas plus d’une poignée de maisons, une église en bois et un petit port de plaisance. Le bon pain frais de l’unique boulanger des environs, une péniche qui flotte sur l’eau dormante… En Frise, que demander de plus ?

Si sa dernière édition remonte déjà à un quart de siècle, météo oblige, le Elfstedentocht – littéralement  » le tour des onze villes  » – est un marathon de patinage qui reste l’un des symboles forts de la province. En son absence, les Frisons se consolent avec l’événement de l’été, le Skûtsjesilen, la plus grande régate historique du pays. Les  » skûtsjes  » sont des voiliers en bois datant du XVIIIe siècle, spécialement conçus pour transporter des cargaisons importantes dans une mer peu profonde. Leur fonction a disparu avec le temps, mais la tradition a survécu et, aujourd’hui encore, seuls les descendants des capitaines de jadis ont le droit de participer à la course. Chaque année, quatorze embarcations s’affrontent au fil de onze compétitions pour remporter une coupe d’argent… et la gloire éternelle dans leur province.  »

Le parc national De Groote Peel
Le parc national De Groote Peel© BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

Le parc national De Groote Peel

 » Ici, on ne s’étonnerait pas de voir une girafe surgir de derrière un arbre, des singes sauter de branche en branche, ou des flamants roses s’envoler à tire-d’aile, tant le parcours entre les fougères et les hautes herbes a des allures de safari. A chaque marigot à moitié desséché, je ressens même une irrépressible bouffée d’angoisse avant de me souvenir que, non, je ne croiserai pas de crocodile, malgré un décor qui fait songer à l’Afrique ou aux Everglades de Floride. C’est à la frontière du Limbourg néerlandais et du Brabant septentrional que s’étend la zone marécageuse de 1400 hectares qui constitue le parc national De Groote Peel, l’un des rares endroits du pays où l’on rencontre encore des tourbières… qui faisaient autrefois sa réputation. Aujourd’hui, cette réserve naturelle protégée abrite des centaines d’espèces d’oiseaux qui viennent y nicher ou y faire une halte migratoire, dont le busard des roseaux, le gorge-bleue à miroir, la pie-grièche et même la grue. Sur ses sentiers de promenade et ses caillebottis flanqués de broussailles, on se sent rapidement bien loin du monde habité…  »

Les Marker Wadden
Les Marker Wadden© BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

Les Marker Wadden

 » Le temps est à l’orage et le bateau qui nous emmène aux Marker Wadden ne cesse de bondir sur la crête des vagues avant de replonger. Sur la table, ma tasse de soupe instantanée se mélange sans mon aide et glisse de droite à gauche à chaque embardée. On n’a rien sans rien et quand on veut jouer à l’explorateur, il faut aussi aimer l’aventure. Les Marker Wadden ne sont d’ailleurs pas des îles comme les autres, mais bien un nouvel archipel créé de toutes pièces avec la boue du lac de Marken… et jusqu’ici largement inexploré.  »

Les Oostvaardersplassen

 » Un bout de nature vierge à un endroit qui était encore, il y a un demi-siècle, une simple étendue d’eau : ce sont les humides Oostvaardersplassen, nichées au coeur d’un polder asséché à 45 minutes à l’est d’Amsterdam. Un monde merveilleux où une faune abondante vole, se bat, s’ébat, creuse, chasse, aime, apprend, convoite et, surtout, fascine. Intégré au parc national Nieuw Land, il constitue indéniablement la région la plus sauvage des Pays-Bas. La faune y est tellement nombreuse que son quotidien s’apparente à une lutte incessante pour la survie, entre les plus forts, les plus endurants ou les plus malins. Des heures durant, nous arpentons les marécages et les bois nimbés de brume et de vapeur jusqu’à ce qu’enfin, les derniers mètres du sentier se dessinent à nouveau devant nous.  »

Les Oostvaardersplassen
Les Oostvaardersplassen© BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

Le parc national Weerribben-Wieden

 » Sous un ciel d’un rose électrique, nous nous faufilons dans un labyrinthe d’anciennes tourbières parsemées de ruisseaux qui se terminent en impasse, de tremblants tourbeux, de fossés remplis de grenouillette ou d’aloès d’eau et de champs de roseaux impénétrables d’où s’enfuit de temps à autre un oiseau apeuré. On raconte qu’il s’y cache des créatures fantastiques comme le héron pourpre, le butor étoilé, le phragmite des joncs, le loriot, la spatule blanche, le renard, la couleuvre et même la loutre, tellement exigeante qu’elle ne fréquente que les eaux les plus pures. Aujourd’hui, hélas, elle ne se montre pas, et nous devons nous contenter de trois chevreuils qui fixent d’un regard curieux ces drôles d’humains dans leur kayak rouge, avant de filer en exhibant un instant leur miroir blanc.  »

Le parc national Weerribben-Wieden
Le parc national Weerribben-Wieden© BAS VAN OORT ET DIRK WIJNAND DE JONG

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