Le Noël qui a tout changé: “Je me suis offert le plaisir d’un réveillon loin de mes proches”
Synonyme de cadeaux, dinde rôtie ou encore de rassemblements en famille, la Noël a une image plutôt joyeuse dans l’imaginaire collectif. Mais elle peut aussi être le cadre de bouleversements, ainsi qu’en témoignent ces récits de fêtes résolument pas comme les autres. À l’image du témoignage de Paul, 40 ans, qui a décidé de s’offrir le seul cadeau dont il rêvait vraiment: de la distance.
« Je viens d’une famille en apparence parfaite. Les parents toujours aussi amoureux après plus de 40 ans ensemble, les deux enfants accomplis, avec diplômes à rallonge et carrières qui en jettent… Ajoutez à ça la maison de campagne avec feu ouvert et le brave Golden Retriever qui bave un peu mais qu’on adore et vous avez l’image d’épinal du cercle familial idéal, le genre dont rêvent toutes celles et ceux qui n’ont personne avec qui passer la Noël. Sauf qu’il ne faut pas se fier aux apparences, tout le monde le sait, et derrière le vernis impeccable et les nombreuses photos partagées par ma mère sur les réseaux, la réalité est toute autre.
Mon petit frère, le brillant magistrat? Il n’a jamais pardonné à mes parents de nous avoir toujours poussés à nous dépasser, et il les blâme pour tous ses problèmes, quels qu’ils soient. Le mariage parfait de mes parents? Ma mère est la bonniche de mon père, et je ne pourrais pas jurer que ce dernier lui ait toujours été d’une fidélité sans faille. Sous couvert de « s’inquièter », ils sont une source constante de critiques, chacun de mes choix de vie étant passé au crible et considéré comme peu judicieux. Un environnement toxique que j’ai enduré en silence durant des années, soucieux de ne pas briser l’illusion de la famille parfaite, jusqu’à ce que je n’en puisse plus et que je décide de donner une bonne raison à mes parents de se plaindre de mes décisions ».
Un bonheur de façade
« L’hiver dernier, j’ai réalisé que plus on se rapprochait du réveillon, plus j’angoissais. La perspective de passer une nouvelle soirée pris entre la colère froide de mon frère, la joie forcée de ma mère et le détachement de mon père me semblait insoutenable, à tel point que j’ai fini par m’effondrer en larmes quand ma femme m’a demandé ce qu’on leur offrirait bien sous le sapin. Pourtant pas dupe de tous les problèmes inhérents à ma famille, et bien consciente que j’en souffrais, elle a halluciné en découvrant la profondeur de mon mal-être. Et elle a eu des mots qui peuvent sembler évidents, mais que j’avais besoin d’entendre: elle m’a dit que j’avais le droit de m’écouter. Et que rien ne nous obligeait à passer le réveillon chez mes parents juste parce que « c’est ce qui se fait ». D’un coup, c’est comme si un poids énorme avait été enlevé de ma poitrine, et j’ai immédiatement décidé que cette fois, j’allais passer une Noël joyeuse. C’est à dire à mille lieues de la « parfaite » maison de campagne de mes parents et de son ambiance glaciale qu’aucun feu ouvert ne pourra jamais réchauffer.
Première étape: décider avec ma femme de ce qui nous ferait vraiment plaisir. On est partis dans toutes les directions, en mode Noël sous les tropiques, visite de la Finlande pour vivre la magie au plus près, et puis finalement, on a réalisé qu’aller sur une plage perdue en mer du Nord avec une cargaison de livres et des vêtements en pilou était notre idée de la pause parfaite. On a donc trouvé in extremis une chambre dans une pension charmante en bord de mer du Nord. Deuxième étape? Prévenir mes parents, qui l’ont, comme prévu, très mal pris ».
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Petits toasts et pyjamas
« Ma mère a pleuré, m’a demandé ce qu’ils avaient bien pu faire pour que je prenne une décision pareille… Mais aussi, ce que ses amis allaient en dire. Parce que dans ma famille, ce sont les apparences qui comptent avant tout, et pour elle, rien ne fait plus mauvais genre qu’une « tribu » qui ne passe pas la Noël ensemble. Mon frère, lui, a eu des mots très durs, m’a accusé de le laisser tomber et de le trahir, mais j’ai tenu bon. Après des années de thérapie, et grâce au soutien sans faille de ma femme, je commence enfin à réaliser que j’ai le droit de me choisir moi, et de prendre mes décisions en fonction de mes besoins et de mes envies.
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Loin du huis clos faussement tendre du réveillon dans la demeure parentale, j’ai passé un Noël doux et heureux comme jamais. Mieux, je me suis retrouvé comme un gosse, à trépigner de joie à l’approche du réveillon parce que je savais ce qui m’attendait. Ce qui ne devait être qu’une parenthèse dans la tradition familiale est d’ailleurs devenu une tradition, mais qui n’appartient qu’à ma femme et moi cette fois: le réveillon, désormais, c’est en tête-à-tête, où le cœur nous en dit, et exactement comme on en a envie. Cette année, après des mois éprouvants sur le plan professionnel, et pas mal de fatigue accumulée, on a donc décidé de se faire un 24 décembre en pyjama, à la lueur de notre sapin ultra kitsch. Au menu? 0 foie gras, pas de homard, aucune préparation alambiquée, mais bien une orgie de petits toasts, notre moment préféré à tous les deux de chaque repas de fêtes. Ma mère m’a dit que si on changeait d’avis, on était les bienvenus. Je me suis retenu de répondre que ça ne risquait pas d’arriver, parce que même s’ils sont ultra dysfonctionnels et parfois carrément pénibles, Noël n’est pas la période où blesser ceux qu’on aime ».
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