Nicolas Balmet

Au singulier de l’impératif

Nicolas Balmet Journaliste

Attention, nous allons écrire le mot «Covid», ne fuyez pas tout de suite, ça va juste piquer un peu… mais c’est plutôt positif. En effet, en préparant ce numéro spécial voyage, nous avons dressé un étrange constat: le virus a probablement laissé plus de traces qu’on ne l’imagine dans nos esprits et nos jambes. A l’heure où la plupart des restrictions de voyage sont levées dans le monde entier, il est fort probable que nos envies aient légèrement évolué. Certes, le coût des billets d’avion s’est envolé, et le fameux «modèle Ryanair» – dont on savait la fragilité sans savoir à quel moment il flancherait – nous empêche désormais d’aller faire un selfie avec la petite sirène de Copenhague sur un coup de tête. Oui, les voitures de location restent encore très onéreuses, même si ça va un peu mieux après deux années scandaleusement dingues. Et bien sûr, le train nous fait clairement de l’œil, bien aidé par une campagne de promotion massive menée conjointement par les sociétés ferroviaires et les experts du voyage – «vive le slow tourisme!», qu’ils nous martèlent.

Une sorte d’urgence imperceptible est en train de tracer nos routes.

Mais il y a autre chose. Des comportements qui ne sont pas forcément liés à des facteurs financiers ou écologiques, et qui nous poussent à croire qu’un monde touristique post-Covid existe bel et bien. Une sorte d’urgence imperceptible qui est en train de tracer nos routes, comme s’il fallait rattraper le temps, intensifier nos retrouvailles avec l’ailleurs ou s’épanouir là, maintenant, tout de suite, avant qu’un autre malheur n’arrive – après tout, l’épée climatique s’apprête à nous fendre. Ainsi, Booking ou Airbnb dévoilaient récemment des études montrant que le «voyage en solo» n’avait jamais été autant plébiscité qu’aujourd’hui. Une tendance qui raconte beaucoup de choses: au-delà du besoin de se retrouver soi-même, c’est une manière de s’en aller sans attendre quoi que ce soit de quiconque. On pense d’abord à ses propres envies, tout en revendiquant sa propre liberté. On n’attend plus d’être en couple pour rêver de Paris ou de Californie. On veut tel voyage, et on le prend.

Cette urgence, on la ressent dans le récit de notre journaliste qui, plus loin dans ces pages, avoue qu’elle a réservé un ticket pour Séoul à l’instant même où la Corée du Sud a rouvert ses frontières. C’est aussi ce que murmure le livre Les 50 voyages à faire dans sa vie qui célèbrent le demi-siècle du Guide du Routard: évadez-vous vite, offrez sans traîner à votre existence la beauté du globe. C’est encore ce que dit Isabel Del Real dans son roman graphique où, à l’aquarelle, elle a retracé une année d’escapade à vélo en Europe… en solitaire, tiens donc. La bonne nouvelle? Si tout cela pourrait ressembler à une volonté féroce de tête-à-tête avec soi-même, chaque récit se révèle un point de départ menant à des rencontres improbables qui, elles-mêmes, ont donné vie à des histoires formidables. Merci qui, ou plutôt, merci quoi?

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