Les adresses préférées de Ronan Bouroullec en Bretagne

Les frères Bouroullec, connus pour leur design poétique et épuré, font l’objet d’une quadruple exposition à Rennes. Un projet d’envergure qui n’a rien du hasard. Natif du Finistère voisin, le duo garde un attachement à la région. En particulier Ronan, fan de surf, d’embruns et de crustacés, qui nous livre ses adresses favorites.

Erwan et Ronan Bouroullec
Erwan et Ronan Bouroullec© Studio Bouroullec

La Bretagne ? « Si je n’y vais pas, au bout d’un certain temps, je ressens des picotements, comme un alcoolique en manque », avance Ronan Bouroullec d’un ton amusé et d’un air juvénile. Bien que vivant depuis longtemps à Paris, le Français de 45 ans qui forme avec son frère cadet, Erwan, un duo de designers à la réputation bien assise, revient fréquemment dans la péninsule où il a vécu jusqu’à l’âge de 18 ans. « Je suis fasciné par la pointe la plus avancée de la Bretagne, la partie la plus à l’ouest qui correspond au Finistère sud dont nous sommes originaires. »

La Bretagne comble mon besoin de vide et d’horizon. »

Propriétaire depuis peu d’une maison de vacances près de Pont-Aven, à l’intérieur des terres, là où les paysages sont plus fleuris et moins escarpés, Ronan n’hésite pas à pousser la balade jusqu’à la côte pour humer l’air du grand large. « J’aime la force du climat océanique. Bien sûr, ce n’est pas le soleil permanent comme en Méditerranée, c’est moins facile à apprivoiser, plus changeant, plus mélancolique, mais ça me va. S’il y a bien un endroit qui m’apaise malgré la houle et la mer déchaînée, c’est la Bretagne. Elle comble mon besoin de vide et d’horizon. »

Ronan en ermite armoricain, face à l’étendue, le pied posé sur le rocher, comme dans le tableau de Caspar David Friedrich, Le voyageur au-dessus de la mer de nuages ? L’instantané a de quoi surprendre de la part de quelqu’un dont le travail est connecté avec l’ultrabranchitude. Pour rappel, les Bouroullec sont célébrés par les institutions du monde entier, représentés dans les collections permanentes du MoMA à New York et sollicités par des éditeurs contemporains comme Vitra, Magis ou Kreo.

Nos grands-parents et nos cousins sont agriculteurs. Ce sont des gens qui ont une relation fine et sans détour avec les objets. Le superflu a très peu de place.

« Notre inspiration, c’est Google, mais aussi une certaine forme de culture rurale, nuance Ronan. Enfants, nous vivions à 10 kilomètres de Quimper. Nos grands-parents et nos cousins sont agriculteurs. Ce sont des gens qui ont une relation fine et sans détour avec les objets. Le superflu a très peu de place. C’est comme les outils de la mer : leur forme est dictée avant tout par leur fonction. Il faut qu’ils flottent ou qu’ils aient une bonne dynamique. Ils sont sans esbroufe. On est loin du décoratif propre à une certaine bourgeoisie française. Dans ce sens, je suis attiré par une esthétique du dépouillement. »

17 screens
17 screens© Studio Bouroullec

En ce printemps, c’est un retour à la case bretonne pour Ronan et Erwan. Pas moins de quatre expositions leur sont consacrées à Rennes jusqu’au 28 août. Le Frac Bretagne fait ainsi coup double avec une rétrospective autour de leur production domestique, conçue depuis vingt ans pour les plus grandes marques, tandis que dans la grande galerie, l’installation 17 Screens, déjà montrée à Tel-Aviv, se présente comme une variation libre autour des cloisons. Un objet d’étude récurrent chez les Bouroullec. Que ce soit les modules Algues (2004) imaginés pour Vitra ou les tuiles textiles Clouds (2009) pour Kvadrat, les parois structurantes, entre opacité et transparence, sont une de leurs grandes préoccupations. Dans la cour du Parlement de Bretagne, on pourra également découvrir leur Kiosque, un prototype de plate-forme en métal et verre qui se monte en trois heures. Elle est destinée aux manifestations éphémères et la simplicité du trait rappelle l’économie visuelle propre au duo français.

Le dernier volet du quadriptyque, visible à l’établissement rennais Les Champs Libres, s’intitule Rêveries urbaines et aborde frontalement l’espace public. Un territoire jusqu’ici inédit pour les deux designers, même si leurs réflexions autour des différents « motifs » pour reprendre leurs mots (banc, pergola, kiosque…) en sont encore au stade de recherches. Une phase cruciale et poétique qui précède toujours la technique chez les frères. Le résultat est une cinquantaine de maquettes, assemblées tout en finesse par de délicates ramifications végétales. Une expérience plus sensorielle que pragmatique. « On ne parle pas de la ville en termes de flux ou de solutions techniques fonctionnelles, reconnaît Ronan. Notre approche est plus douce, plus surprenante et de l’ordre de l’enchantement. » Une envolée qui trouve néanmoins des prolongements bien concrets : les villes de Aarhus au Danemark et de Miami viennent de demander aux Bouroullec de plancher sur leur futur mobilier urbain.

4 expositions, trois lieux. Jusqu’au 28 août prochain à Rennes.

Rétrospective et 17 Screens, Frac Bretagne, 19, avenue André Mussat.

Rêveries urbaines, Les Champs Libres, 10, cours des Alliés.

Kiosque, Parlement de Bretagne, place du Parlement.

LE SENTIER DES DOUANIERS

Le sentier des Douaniers.
Le sentier des Douaniers.© GUILLIAMS LAURENT

« C’est une voie magnifique de près de 2 000 kilomètres qui longe le littoral breton du nord au sud. Elle a été créée sous la Révolution pour surveiller les contrebandiers. C’est devenu un sentier de randonnée. Les passages sont parfois étroits d’une cinquantaine de centimètres. Si je devais en choisir une partie, ce serait le trajet entre Douarnenez et la pointe du Raz, ponctué de gîtes d’étapes. J’en connais les moindres recoins. On peut marcher trois jours, trois heures ou un quart d’heure. Il y a de multiples entrées qui permettent d’interrompre la marche à tout moment. Le paysage côtier se découvre au bord de falaises grandioses. »

LE MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE QUIMPER

Les adresses préférées de Ronan Bouroullec en Bretagne
© DR

« Un lieu de jeunesse : c’est en partie dans les salles du musée de Quimper que j’ai découvert mon attrait pour la peinture. Je pense à la très intéressante collection consacrée à l’école de Pont-Aven. Dans le sillage de Gauguin, à la fin du XIXe siècle, de nombreux artistes se sont installés dans la région et ont peint la Bretagne de manière assez vibrante. Le travail de peintres comme Sérusier ou Emile Bernard m’a marqué. Moi qui m’embêtais tellement à l’école, ça me plaisait. »

Le musée des Beaux-Arts de Quimper.
Le musée des Beaux-Arts de Quimper.© PPP

40, place Saint-Corentin, à 29000 Quimper.

LA PLAGE DES TRÉPASSÉS

La plage des Trépassés
La plage des Trépassés© Yannick Le Gal

« Depuis que j’ai 15 ans, je viens y faire du surf. Je suis nul mais j’adore ça ! La plage, qui fait 600 mètres de longueur, est un spot idéal pour s’initier ou pour contenter les surfeurs moyens comme moi. Les vagues ne sont pas trop difficiles. Je pratique toute l’année, dès que j’en ai le temps. Le nom charmant des lieux (rire) vient des courants maritimes violents du détroit. D’après la légende, ils faisaient échouer les bateaux et charriaient les noyés sur la plage. »

La plage des Trépassés, route de la Baie, à 29770 Plogoff.

L’Ecole de Surf de Bretagne. www.esb-audierne.com

Hôtel de la Baie des Trépassés (2-étoiles), à 29770 Plogoff. www.hotelfinistere.com

LA PRESQU’ÎLE DU CROZON

La Tour Vauban à Crozon
La Tour Vauban à Crozon© E.Berthier

« Je suis fasciné par le côté sauvage et naturel de la Bretagne. La presqu’île de Crozon est un éperon central, en face de Brest, qui a été épargné par l’urbanisation, peut-être parce que l’endroit est moins facile d’accès que d’autres destinations locales. C’est le bout du monde. On y trouve la ville de Camaret-sur-Mer, qui est surprenante. Elle est construite autour d’une baie entourée de fortifications, avec notamment une très belle tour polygonale de Vauban. »

Tour Vauban, quai Gustave Toudouze, à 29570 Camaret-sur-Mer.

Office de tourisme de Camaret-sur-Mer, 15, quai Kléber.

« LA COTRIADE » À AUDIERNE

La Cotriade, à Audierne.
La Cotriade, à Audierne.© JOB NICOLAS

« J’adore les crustacés. Et j’apprécie particulièrement les produits des Halles d’Audierne, qui abritent une fameuse poissonnerie – La Cotriade, tenue par Marc Moullec – où les poissons côtiers arrivent tous les matins durant les saisons du printemps et de l’été. On y propose des bars exceptionnels, ramenés par les pêcheurs-ligneurs locaux qui affrontent les courants violents du Raz de Sein. »

Halles de Audierne, 2 place de la Liberté, à 29770 Audierne. www.poissonnerie-lacotriade.com

LE PORT-MUSÉE DE DOUARNENEZ

Le port-musée de Douarnenez.
Le port-musée de Douarnenez.© VALÉRIE FILLON

« Douarnenez est une ancienne ville ouvrière liée au commerce de la pêche. Elle ne possède pas de plage, du coup, on l’oublie parfois sur la carte touristique, mais elle a du charme et son architecture est très réussie. Et puis, il y a le port-musée de la ville qui rassemble d’anciennes constructions maritimes dont la plupart sont en bois. Le musée a une extension dans le port, en eaux profondes, avec des bateaux pompiers et des bateaux-phares qui servaient à guider les navires. »

Port-musée, place de l’Enfer, à 29100 Douarnenez. www.port-musee.org

LES TRANSMUSICALES

Les Transmusicales.
Les Transmusicales.© Diaphane/EllProd

« Je n’y suis plus retourné depuis mon adolescence, mais je garde de très bons souvenirs des Transmusicales de Rennes. J’y suis allé deux fois et j’ai participé à ce qui devait être la première rave-party de la ville… Mais j’ai quand même échoué à être là au bon endroit au bon moment car j’ai loupé tous les concerts mythiques des Trans, dont celui de Nirvana en 1991. »

RENNES, VERSION TERROIR

Les adresses préférées de Ronan Bouroullec en Bretagne
© DR

Où manger à Rennes ? Ronan Bouroullec recommande deux adresses. Chez Paul, une discrète enseigne 100 % troquet avec zinc élimé, sol en mosaïque et chaises en bois, ouverte en 2011 par Paul Béranger. On y cultive le goût de l’authentique (filet de dorade, tête de veau, blanquette, poêlée d’encornets…), servi par une sélection éclairée de vins nature. Autre ambiance avec Léon le cochon, que Ronan a pointé pour nous. A deux pas des halles, cette cantine chic et rustique qui voit grand – 600 m2 et trois autres établissements homonymes dans la ville – est une institution qui traverse les époques. On y vient, on s’en doute, pour s’adonner aux joies de la cochonnaille, grande spécialité roborative de la maison, dirigée depuis 1994 par le food-entrepreneur Yann Paigier.

Chez Paul, 30, rue Poullain Duparc.

Léon le cochon, 6, rue du Pré Botté.

Par Antoine Moreno

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