Au sud d’Haïti, les plages de l’Ile à Vache attendent les touristes

© AFP/Clement Sabourin

Pas de Casques bleus, pas de routes, des villages pittoresques et des plages paradisiaques: l’Ile à Vache constitue une exception en Haïti. A tel point qu’un tourisme de luxe avait commencé à s’y développer. Mais depuis le séisme, les clients ont disparu.

Comme tout le sud-ouest du pays, ce territoire de 50 km2, situé à une demi-heure de bateau de la ville des Cayes, a été totalement épargné par le tremblement du terre du 12 janvier. Les enfants n’ont jamais arrêté l’école, les cultures n’ont pas été perdues et les plages de sable blanc n’ont connu aucun débarquement de sinistrés fuyant le chaos de Port-au-Prince. Et les 15.000 habitants, descendants d’esclaves ou de Noirs américains venus s’installer au XIXe siècle à l’initiative du président Abraham Lincoln, ont continué à vivre au rythme des couchers de soleil sur la mer des Caraïbes, des combats de coqs et des chants de mainates.

Mais cette île idyllique, présentée comme la dernière totalement vierge des Antilles, a malgré tout été une victime indirecte de la catastrophe qui a fait entre 250.000 et 300.000 morts selon l’ONU.
« Aucun touriste n’est venu pendant les deux mois qui ont suivi le séisme. On a perdu 47.000 dollars », raconte Didier Boulard, un Français qui a ouvert il y a neuf ans un hôtel de 20 chambres construit sur les hauteurs d’une petite baie qui servait de refuge aux pirates aux XVIe et XVIIe siècles. Avec une cinquantaine d’associés, ce natif du Mans a investi 2,8 millions de dollars pour ouvrir le premier établissement touristique de l’île. Pour entretenir la longue piscine à l’eau de mer et les chambres luxueuses installées dans des cases créoles, le complexe emploie d’ordinaire 40 personnes. Ils ne sont désormais plus que 25.
« Avant le tremblement de terre, on commençait à équilibrer le budget. Pour la première fois l’année dernière on a fait un petit bénéfice », poursuit-il. Ce week-end, il n’a reçu que huit personnes: cadres de l’ONU, travailleurs humanitaires ou journalistes. « Ca reprend un peu », se console M. Boulard.

Symbole de ce redémarrage timide, l’hôtel accueille pendant une semaine une « vraie » touriste: une retraitée venue de la banlieue de Montréal après avoir vu un reportage de la télévision publique Radio-Canada. « C’est du tourisme solidaire. Je suis venue ici pour dépenser mes devises étrangères dans un pays qui en a bien besoin », confie Francine Leclerc, avouant que tous ses proches voient d’un très mauvais oeil son séjour en Haïti. Avec ses coups d’états à répétitions et ses catastrophes naturelles, le pays le plus pauvre des Amériques souffrait déjà d’une bien mauvaise presse et seuls de rares guides de voyage lui consacraient quelques pages. Alors avec le séisme, tous les efforts pour en faire la promotion ont été anéantis. Pourtant, se persuade M. Boulard, « le potentiel du tourisme en Haïti est colossal: les pays voisins accueillent 10 millions de touristes chaque année. (…) 40.000 chambres pourraient être construites dans le pays, c’est le chantier du siècle! ».

Mais toutes les infrastructures font défaut. A commencer, pour l’Ile à Vache, la présence d’un aéroport international aux Cayes. Dans l’immédiat, l’homme d’affaires lorgne la manne financière que représentent les milliers d’expatriés envoyés en Haïti par l’ONU et les ONG après le séisme. Mais en raison des règles de sécurité leur interdisant de prendre leurs semaines de repos en Haïti, ils vont dépenser leurs devises dans les îles voisines, telles la République dominicaine, la Guadeloupe ou la Martinique.

Par Le VifWeekend.be, avec AFP.

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