Les oeuvres diaboliques de Jérôme Bosch de retour dans sa ville natale pour une expo exceptionnelle

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Des monstres festoyant d’âmes perdues, des démons torturant des pécheurs tordus de douleur, des squelettes souriants attendant les morts : 20 oeuvres du « diabolique » Jérôme Bosch seront réunies dans sa ville natale aux Pays-Bas en février pour une exposition exceptionnelle.

Ses visions cauchemardesques, saturées d’illusions et d’hallucinations, de créatures fantastiques et de métamorphoses, de galipettes jubilatoires et de déboyautages, ont terrifié et inspiré pendant des siècles. Pour les 500 ans de son décès, un petit musée de Bois-Le-Duc (‘s-Hertogenbosch ou Den Bosch en néerlandais) a réussi à convaincre les plus grands musées du monde de lui prêter leurs toiles de celui qui fut surnommé « le peintre du diable ».

Le Noordbrabants Museum, dont l’exposition Visions d’un génie se tiendra de février à mai, a tablé sur un programme de recherche exceptionnel débuté il y a neuf ans pour pouvoir rassembler ces toiles, dont le célèbre Chariot de foin. Selon le musée, cette toile est l’un des premiers tableaux dans l’histoire de l’art à représenter la vie quotidienne et montre un cortège de gens suivant un chariot de foin, métaphore du matérialisme, qui se dirige tout droit vers l’enfer. Propriété du musée du Prado de Madrid, elle a quitté l’Espagne pour la première fois en 450 ans pour Rotterdam, où elle est exposée depuis un mois, et rejoindra en février Bois-le-Duc, où l’artiste a vécu toute sa vie et dont il porte le nom.

Het Noordbrabants Museum
Het Noordbrabants Museum© DR

L’exposition marquera également le début d’une année d’événements dans cette petite ville médiévale du centre des Pays-Bas : parades, expositions, concerts, spectacles de danse… Grâce à des projections 3D, habitants et touristes pourront même observer les créatures diaboliques du peintre flâner dans les rues pavées.

Gare au diable

Les oeuvres diaboliques de Jérôme Bosch de retour dans sa ville natale pour une expo exceptionnelle
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Malgré le petit nombre de tableaux ayant survécu aux siècles, et les goûts changeants des âges, les toiles de Jérôme Bosch n’ont jamais cessé de fasciner. « Il a créé son propre langage imaginaire », affirme à l’AFP le directeur du musée, Charles de Mooij. « Toutes ses peintures ont une approche moraliste, ce message qu’il faut être conscient du diable au cours de sa vie », assure-t-il.

Bosch était un homme bien de son temps, celui d’un bas Moyen-Age où la vie populaire, le gothique et l’art sacré flamboient, avant que n’émerge une culture plus citadine, bourgeoise, aux règles morales plus codifiées.

Son imagerie carnavalesque sonne comme le credo de cette nouvelle morale bourgeoise à laquelle il souscrit : malheur au débauché, au paresseux, au gaspilleur, à l’avare, à l’étourdi, car il ira en enfer.

L’une de ses toiles les plus célèbres, Le Jardin des délices, ne sera néanmoins pas exposée : « C’est dommage mais compréhensible », assure M. De Mooij. « Est-ce que le Rijksmuseum prêterait la Ronde de nuit ? » demande-t-il, évoquant la célèbre toile de Rembrandt, exposée à Amsterdam. « Évidemment que non. » Le triptyque, également exposé à Madrid (Philippe II d’Espagne était un admirateur inconditionnel), représente Adam et Eve en compagnie de Dieu dans le paradis terrestre, un jardin délicieux et les tourments de l’enfer.

La Nef des fous (du Louvre à Paris), La Mort de l’avare (de Washington) et « Visions de l’au-delà » (de Venise) seront, elles, de la fête.

Nouvelle oeuvre attribuée

Jérôme Bosch, de son vrai nom Jheronimus Van Acken, est né vers 1450 dans une famille de peintres. Il rejoint l’atelier familial sur la place du marché, un bâtiment aujourd’hui transformé en magasin de souvenirs. Alors que sa réputation grandit, il prend le nom de sa ville natale afin d’être aisément retrouvé par les riches commanditaires. De l’autre côté de la place, la maison blanche à trois étages où il vécu avec son épouse abrite aujourd’hui un magasin de chaussures.

Décédé en août 1516 d’une cause inconnue, Jérôme Bosch est enterré dans la cathédrale de la ville, dont les gargouilles démoniaques ont inspiré bon nombre de ses créatures. Il n’a néanmoins laissé aucun carnet de notes et très peu est connu sur son inspiration. C’est pourquoi le musée a lancé son programme de recherche, dont les résultats seront publiés sur 1.000 pages en janvier.

Douze de ses panneaux sur bois ont été restaurés et une équipe d’historiens de l’art a réussi à déterminer qu’un dessin, Scènes de l’enfer, était bien de sa main.

Sociologues, psychologues, psychanalystes, ou surréalistes se sont cassé les dents à tenter d’interpréter l’extraordinaire profusion de ses monstres issus d’univers marins, célestes ou terrestres.

Quelques jours après les attentats de Paris, que dirait Bosch des scènes macabres de notre temps ? Selon le directeur du musée, le message du peintre a toujours été clair. « Je pense qu’il dirait : le diable est partout et vous le rencontrerez tous les jours, dans les petites choses mais aussi dans les grandes. »

Jheronimus Bosch, Visions de Génie, à voir 13 février au 8 mai 2016 inclus, au musée Noordbrabants de Bois-le-Duc . www.hetnoordbrabantsmuseum.nl

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