Couple à la scène comme à la ville, Charlotte Maison et David Baboulis forment Soldout, la révélation électro-rock de l’année. En exclusivité pour notre magazine, le duo se dévoile sans détour et se prête au jeu d’une production de mode. Action !

Soldout,  » Stop Talking « , chez Bang ! En concert notamment le 8 octobre à la Soundstation de Liège, le 9 octobre à la Maison de la Culture de Namur et le 16 octobre au Riff’n’Bips Festival de Mons. Internet : www.soldout.be

Pour les non-initiés, leur musique semble facile et répétitive. Pourtant, l’univers de Soldout est bel et bien subtil, frais, sexy, énergique, complexe et jouissif. Derrière ce nom bizarre qui leur a déjà joué bien des tours (en anglais,  » sold out  » veut dire complet !) se cachent en vérité Charlotte Maison (21 ans) et David Baboulis (30 ans), deux Bruxellois solidement ancrés dans leur époque. En exclusivité pour Weekend Le Vif/L’Express, le duo électronique auteur du fameux  » I don’t want to have sex with you  » a gentiment accepté de poser sous les feux de la mode ( voir pages 60 à 63) et de se confier en toute simplicité. Coups de flashs sur un couple décoiffant qui fait joliment rimer fausse agressivité et vraie spontanéité.

Weekend Le Vif/L’Express : Quels souvenirs gardez-vous de cette production de mode pour notre magazine ?

Charlotte : C’était amusant ! Nous nous sommes vraiment prêtés au jeu parce que, dans la vie de tous les jours, nous sommes nettement moins sophistiqués. Il suffit de nous regarder ( rires) ! Même avant de monter sur scène, on ne réfléchit pas pendant une heure à ce qu’on va bien pouvoir mettre. On se dit toujours qu’on préfère rester naturel. Mais cette séance de photos de mode était une expérience intéressante. Nous avons découvert des créateurs que nous ne connaissions pas. D’ailleurs, si un styliste veut nous habiller pour un concert, pourquoi pas ?

David : Si cela correspond à notre style…

Charlotte : Oui. On ne veut rien forcer. On veut que tout se fasse le plus naturellement du monde.

Vous n’êtes donc pas des mordus de mode…

Charlotte : Non, mais la mode nous intéresse. On aime regarder les belles choses…

David : Mais nous nous sentons nettement moins impliqués dans la mode que dans la musique.

Charlotte : Nous ne sommes pas des connaisseurs mais nous y sommes tout de même sensibles. Par exemple, j’aime bien le travail de Valeria Siniouchkina ( NDLR : une jeune créatrice belge qui a remporté le Prix Henri Bendel au Festival international des arts de la Mode de Hyères en 2002).

La pochette de votre album est tout de même très  » tendance « …

Charlotte : Oui, mais c’est plus un reflet de la musique qu’un reflet de nous deux. En fait, nous ne voulions pas apparaître sur la pochette. Nous voulions faire passer quelque chose de très simple, de naïf et de spontané. C’est une image assez directe, un peu sale aussi, mais quand même assez tendance. Parce que notre musique est aussi un peu tendance. L’image devait donc être dans l’air du temps.

Vos rares détracteurs reprochent effectivement le côté un peu  » trop mode  » de votre musique. Selon eux, Soldout risque d’être éphémère…

David : Dans un article, on nous a même reproché de faire de la musique pour les moins de 30 ans. C’est complètement faux ! Il y a énormément de gens de plus de 30 ans qui sont dans ce courant musical-là…

Charlotte : D’ailleurs, on le voit en concert : il y a pas mal de trentenaires !

David : Ce n’est vraiment pas une question d’âge. C’est plutôt un état d’esprit. On peut avoir 40 ans et aimer Soldout !

Charlotte : Et puis, nous ne faisons pas de la musique pour être à la mode. C’est d’ailleurs le message caché derrière le titre de notre album  » Stop Talking  » ( NDLR :  » Arrêtez de parler « ) : Soldout, c’est la musique pour la musique. Pas la musique pour vendre des disques. Pas la musique pour être célèbre. Nous faisons de la musique par besoin et on ne parle de rien d’autre !

David : En fait, nous avons fait quelque chose de très spontané. Alors, si notre musique correspond à l’air du temps, tant mieux ! Mais rien n’est calculé.

Justement, comment expliquez-vous votre succès ?

Charlotte : Franchement, on ne s’y attendait pas. On n’en revient toujours pas.

David : Oui, c’est très gai !

Charlotte : D’abord, je pense qu’on a bénéficié de l’intérêt porté par les médias sur la nouvelle scène musicale belge. Nous sommes arrivés au bon moment et, en plus, avec un album qui est dans l’air du temps. Nous avons aussi été bien soutenus par Pure FM. Donc, oui, ça marche, mais nous gardons la tête froide. Moi, je suis toujours étudiante en quatrième année à l’ERG (NDLR : l’Ecole de Recherche graphique de Bruxelles). J’adore les études que je fais et je ne pourrai jamais abandonner le graphisme, même si, à terme, j’ai envie de réussir dans la musique.

Les refrains de vos chansons sont obsédants et vos textes souvent agressifs, voire sadiques. Par exemple :  » I want to kill you, I’ll do it slow  » (  » Je veux te tuer. Je le ferai lentement « ). Le décalage est grand avec l’image de jeune fille sage que l’on a de Charlotte…

Charlotte : C’est vrai qu’on m’a souvent dit :  » Ah bon, c’est toi qui chante  » I don’t want to have sex with you  » ? C’est dingue, le décalage !  » J’avoue qu’avec mes petites lunettes, je fais très sérieuse ( rires) ! D’ailleurs, je ne suis jamais aussi agressive dans la vie quotidienne. C’est une de mes facettes cachées que j’exploite également en concert. Sur scène, j’ai même l’impression d’être carrément prête à cracher par terre en disant un truc qui m’énerve. Je pense vraiment à ce que je chante. Cela dit, je ne vise personne en particulier. Ce sont généralement des phrases que je trouve comme ça, spontanément, sans penser à personne. C’est complètement anecdotique. Ce n’est pas du vécu ! Cela dit, même si les textes sont souvent légers, les sujets, à la base, ne le sont pas. C’est con de dire ça, mais le monde ne va pas bien du tout et c’est ce que je veux faire passer dans nos chansons, de manière légère et anecdotique. C’est plus un état d’esprit, un ras-le-bol, un énervement vis-à-vis de tous les gens qui ne devraient pas exister. Soldout, c’est le reflet plus sombre de ma personnalité.

D’où vient votre passion pour la musique ?

Charlotte : Pour moi, la musique a toujours été une évidence. Il est vrai que j’ai commencé très tôt. A 5 ans, je suivais déjà des cours de solfège et, donc, il était tout à fait normal que je continue à en faire. Si je me suis inscrite à l’ERG plutôt qu’au Conservatoire, c’est parce que je n’avais pas envie de faire de la musique classique. D’ailleurs, à 13 ans, j’avais arrêté le piano pour faire de la guitare. Je pense que c’est cela qui m’a ensuite amenée au rock. Et puis, à 17 ans, j’ai eu l’opportunité de partir un an à San Francisco et j’ai adoré ! Normalement, à cet âge-là, je ne pouvais pas entrer dans les bars, mais j’ai trouvé des boîtes de jazz plutôt cool où je pouvais aller sans problème. Et comme là-bas, tout le monde joue avec tout le monde et que j’avais rencontré pas mal de musiciens, j’ai commencé à chanter dans des groupes de jazz.

David : La musique est venue à moi d’une manière moins imposée, dans la mesure où je n’ai jamais suivi un cours de solfège. En fait, je suis autodidacte. J’ai toujours aimé la musique à la base et j’ai vraiment commencé à composer des morceaux vers 14 ans lorsque j’ai vu un copain chipoter un jour sur un synthé. Je m’y suis intéressé parce que le synthé permettait de reproduire plein de sons différents. A 18 ans, j’ai arrêté mes études et je suis parti de chez moi. J’ai enchaîné les petits boulots tout en continuant à faire de la musique dans mon coin. J’ai participé à l’un ou l’autre groupe, puis j’ai vécu une période  » ermite  » où je suis resté enfermé pendant des années avant de rencontrer Charlotte…

Charlotte : Nous nous sommes rencontrés par l’intermédiaire d’un copain qui avait un projet de compilation et cela a été le coup de foudre ! Nous nous sommes tout de suite bien entendus et l’idée de développer un vrai projet à deux a mûri l’année dernière. Cela a pris la direction de ce qu’on fait aujourd’hui sans qu’on l’ait vraiment décidé. Je pense que ma formation classique et mon côté rock, d’une part, et le côté plus électronique et expérimental de David, d’autre part, ont donné naissance à ce projet à la fois électronique et structuré.

David : On se complète bien en fait.

Est-il aisé d’être à la fois un couple sur scène et à la ville ?

Charlotte : C’est à la fois un avantage et un inconvénient. Un avantage parce que nous sommes tout le temps ensemble et que nous n’avons pas besoin de nous passer dix coups de fil pour nous donner rendez-vous et commencer à travailler. Mais d’un autre côté, on n’en sort pas vraiment ! Même à une heure du matin, il nous arrive souvent d’être préoccupé par Soldout et de commencer à passer en revue tout ce qu’on doit faire le lendemain : les e-mails, la promo, les concerts… C’est infernal !

Comment vous voyez-vous dans les cinq ans à venir ?

Charlotte : Dans cinq ans, je me vois d’office dans un autre appart ! Mais je serai toujours en train de faire de la musique.

David : Ça, c’est clair ! Mais dans quelles conditions ?

Charlotte : En fait, je rêve de bouger, de voyager, d’aller vivre trois mois par ci, de revenir ensuite en Belgique, de repartir trois mois par là…

David : Moi, je rêve de pouvoir faire de la musique sans penser à l’argent. J’aimerais avoir les moyens de faire de la musique sans limite financière et donc de ne plus devoir me dire :  » Oui, mais si je fais ceci avec tel matériel, ça va coûter autant…  »

Charlotte : On s’est dit un jour que notre rêve serait de gagner au Lotto pour pouvoir faire de la musique sans même faire nécessairement d’album. Ce serait vraiment la musique pour la musique ! Même si tout ce qui nous arrive aujourd’hui, nous le voulons !

Dans ce schéma-là, vous arrive-t-il de songer à fonder une famille ?

David : Pas vraiment.

Charlotte : Pour l’instant, je n’en ai pas du tout l’envie. Bon, je n’ai que 21 ans, mais je connais des filles de mon âge qui se voient déjà maman. Moi, je n’ai pas du tout la fibre maternelle. Du moins pour le moment. On verra dans quelques années. Mais parfois quand j’y pense, je me dis :  » A quoi bon ? Pourquoi avoir des enfants dans un monde pareil ? » Non, je n’en ai pas envie. Pas pour l’instant.

David : Tant mieux !

Charlotte : ( Rires) Nous en avons déjà parlé !

David : Non, actuellement, je ne voudrais pas être père.

Charlotte : Oui, mais tu en as quand même un peu envie…

David : Oui, sûrement plus que toi, mais pas maintenant.

Charlotte : Ça tombe bien, parce que j’ai encore facilement quinze à vingt ans devant moi ! Ma mère m’a eue à l’âge de 40 ans, alors… Bon, l’accouchement ne s’est pas super bien passé. Je suis née après seulement sept mois de grossesse, mais je pense que mon goût de l’électronique vient de là. En fait, j’ai passé les deux premiers mois de ma vie dans une machine avec plein de boutons et de bips ( rires) ! Et c’est pour ça que je suis directement tombée amoureuse de David quand je l’ai rencontré…

Frédéric Brébant

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