Soleil d’hiver: à la découverte de la Sardaigne en basse saison, loin de la foule déchainée

Sardaigne
© Sebastiaan Bedaux

La Sardaigne a deux visages. Bondée, onéreuse et brûlante d’avril à octobre. Calme et charmante de novembre à mars. Nous l’avons traversée en janvier, le temps d’un road trip régénérant en forme de rose des vents.

Pour être honnêtes, nous n’avions pas prévu de partir en Sardaigne. Mais la vie est pleine de surprises. Nous étions à l’aéroport, un billet pour le Japon dans notre sac. Juste avant le départ, la compagnie aérienne nous informe que l’un de nos trois vols a été annulé et qu’il est impossible de nous replacer à court terme. Panique totale. Et grosse déception. Mais au lieu de rentrer à la maison, on choisit de réserver rapidement une place sur le vol le moins cher ce jour-là: un aller-retour pour Cagliari. La réflexion arrive plus tard: la Sardaigne en janvier, est-ce vraiment judicieux? Disons qu’après l’avoir précédemment visitée à la haute saison, l’île italienne n’avait pas du tout répondu à nos attentes… et toute destination mérite une seconde chance.

Ainsi débute notre road trip improvisé, sous le soleil de Cagliari, la capitale et unique métropole de la Sardaigne. Depuis l’aéroport, il y a un arrêt de train – ou 10 minutes de marche – jusqu’au très séduisant centre-ville. La balade jusqu’à notre B&B (IoAMoCagliari, moins de 50 euros la nuit l’hiver dernier) est très agréable.

On est loin du conte de fées japonais enneigé, mais il n’y a pas grand-chose à redire. De l’autre côté de la rue, une ancienne forteresse nous attend dans le Quartiere Castello, le plus ancien quartier de Cagliari construit sur l’une de ses sept collines. La grandeur sarde et le flair italien flottent dans les ruelles, offrant aux visiteurs une véritable expérience de voyage dans le temps. Au pied de la Bastione di Saint Remy, l’imposante porte d’entrée du Castello, nous découvrons l’Antico, le plus ancien café de Sardaigne, ouvert en 1855. Pas de saké à la carte, nous nous contenterons d’un limoncello bien corsé.

La capitale

«Jusqu’à il y a une semaine ou deux, il faisait encore 24°C», nous affirme le barman du Caffè Svizzero le lendemain matin, en nous apportant nos cappuccinos et nos croissants. Le serveur, en tenue classique, travaille dans le plus beau «grand café» qu’il nous ait été donné de voir depuis des années: un intérieur Art nouveau magnifique, des tables élégantes et des arcades somptueuses.

Dehors, il fait 17°C, une température fraîche pour le Sarde moyen, mais presque estivale pour quelqu’un qui a mis des sous-vêtements thermiques dans sa valise la veille. C’est le jour idéal pour explorer les parcs, les jardins, les criques et les plages de Cagliari. A commencer par le fleuron vert de la capitale sarde: l’Orto Botanico, l’un des jardins botaniques les plus célèbres d’Italie, avec pas moins de 2.000 espèces de plantes sommeillant sur cinq hectares en plein centre-ville, juste à côté de l’amphithéâtre romain. 

Peu après, à 20 minutes en bus exactement, nous travaillons notre cardio et usons nos souliers dans le quartier de Calamosca, où de nombreux sentiers redoutables mènent à la Sella del Diavolo (la selle du diable). La vue est digne d’une carte postale: la ville médiévale à gauche, la Spiaggia del Poetto, l’immense plage de sable de Cagliari (8 km), à droite, avec une réserve naturelle remplie de flamants roses juste derrière. Nous admirons longtemps le décor, heureux que Cagliari, avec ses cafés traditionnels, ses piazzas en ruine, ses calas azur et ses spiaggias d’une blancheur éclatante, apaise doucement notre deuil du Japon.

Le sud 

Le lendemain, nous louons une voiture – une Fiat blanche démodée – à l’aéroport afin de nous diriger vers le sud. Nous visitons d’abord les ruines de Nora – la toute première ville de Sardaigne, datant du VIIIe siècle avant J.-C., – avant de nous attaquer à la Strada Panoramica della Costa del Sud – SP71 en abrégé. A la radio, l’inévitable Zucchero accompagne notre échappée sur une route de 25 km qui longe la fabuleuse côte sud. La concentration est maximale: ce serait dommage de finir sa course dans les eaux azurées.

A une vitesse d’escargot – il n’y a heureusement personne d’autre sur la route en cette saison –, nous longeons des plages de sable et des falaises, des forêts et des flancs de montagne spectaculaires. Quelques heures plus tard, nous arrivons à Sant’Antioco, une île encore largement méconnue, riche d’une nature intacte, d’une lagune azur et d’une poignée de villages de pêcheurs. Seul pépin: trouver un restaurant ou un hôtel ouvert en janvier n’est pas une mince affaire. La Sardaigne semble déserte de bout en bout…

L’ouest

Au programme – toujours improvisé – du lendemain: la côte ouest de l’île, généralement très prisée, avec pour première étape Porto Flavia, une attraction touristique fascinante qu’il convient de réserver longtemps à l’avance… pendant la saison estivale. En hiver, il suffit de s’y rendre en voiture et de se joindre à la visite guidée qui s’aventure à travers l’ancienne mine de minéraux. Ce jour-là, nous sommes les seuls visiteurs. Porto Flavia est considérée comme l’une des merveilles de la Sardaigne, un monument extraordinaire d’archéologie industrielle qui se dresse de manière spectaculaire au-dessus de la mer. Notre drone fait des heures supplémentaires pour en immortaliser la structure. 

Un peu plus au nord, à Oristano, la troisième ville de l’île, nous déjeunons sur la pittoresque Piazza Eleonora. Puis nous emmenons nos yeux s’émerveiller face au village de pêcheurs de Bosa et son labyrinthe coloré de ruelles escarpées qui mènent toutes au Castello Malaspina, d’où la vue sur la Méditerranée est étourdissante.

La Sardaigne dépasse déjà toutes nos attentes en termes d’attrait visuel, et nous n’avons pas encore vu Alghero, la perle autoproclamée de la côte ouest. Après une journée de route, nous arrivons dans ce cœur névralgique du tourisme sarde. Nous nous promenons seuls sur le célèbre lungomare, la promenade du front de mer, habituellement très animée. Même dans ce bastion touristique, trouver de quoi se nourrir et se loger s’avère une tâche ardue. Autant le savoir: en janvier, on a l’île rien que pour soi, mais il vaut mieux connaître quelques bons plans… ou rencontrer les bonnes personnes.

Le nord

Nouveau jour, nouvelle brise, cette fois-ci dans le nord subtropical de la Sardaigne, où la route côtière serpente de Porto Torres vers la Costa Smeralda (Côte d’Emeraude). Le trajet semble interminable, mais c’est peut-être parce que nous nous arrêtons tous les cinq kilomètres pour prendre une photo. A gauche, la mer – avec au loin les contours impressionnants de la Corse – à droite, les vallées fertiles du nord de la Sicile, où les vignobles et les vergers se succèdent à un rythme effréné. A Santa Teresa Gallura, nous prenons le temps de déjeuner et de profiter de la célèbre plage de Rena Bianca, avant d’explorer la péninsule de Capo Testa, qui abrite une succession de petites baies idylliques. 

Le clou du spectacle: La Maddalena, un archipel d’une beauté étincelante, envahi par des hordes de touristes durant les mois d’été, mais qui, aujourd’hui, se montre sous son jour le plus séduisant. A Palau, nous garons notre voiture sur un ferry qui nous emmène en 20 minutes à Isola Maddalena, la plus grande île de l’archipel et l’une des deux seules que l’on peut explorer en véhicule à moteur. Un véritable paradis sur Terre, avec une nature pure et intacte entourée de l’eau de mer la plus claire que nous ayons jamais vue. Le surnom des lieux est plus que justifié: les Caraïbes de l’Europe.

L’est

Après deux nuits à La Maddalena, il nous reste une seule région à découvrir: l’est sauvage… qui deviendra notre préférée. D’Olbia, la «grande» ville du nord-est, à la fabuleuse Orosei, la côte orientale est parsemée de plages et de falaises splendides. Notre suggestion: une halte à Cala Fuili, une petite plage de galets blancs perdue au milieu des montagnes verdoyantes. Justement, ce sont désormais les hauts reliefs qui se profilent devant nous. Au loin, se dessinent les sommets de la chaîne du Gennargentu, dont la Punta La Marmora est le point culminant (1.834 mètres). 

De l’eau de mer subtropicale de Cala Fuili, nous nous retrouvons soudain… dans la neige. Le panorama: des villages colorés sur fond de sommets blancs, des vastes vallées couvertes de forêts, et un joli soleil d’hiver qui embrase le tout. Pendant une heure et demie, nous suivons la chaîne de montagnes, traversant des hameaux tels que Dorgali et Uruzei, avant de retrouver la Méditerranée dans la station balnéaire de Tortoli et de poursuivre notre voyage vers le sud. Le soir venu, notre tour de la Sardaigne touche à sa fin et nous devons bien admettre que nous venons de vivre une semaine exceptionnelle… même si le Japon reste sur notre bucket list.

En pratique

Y aller
Ryanair propose deux vols hebdomadaires entre Charleroi et Cagliari en janvier, trois en février, quatre en mars et cinq à partir d’avril. La compagnie low-cost desservira également Alghero quatre fois par semaine à partir de la fin du mois de mars.

Sur place
Une voiture de location est bien sûr indispensable. La Sardaigne est presque aussi grande que la Belgique, mais elle n’a pratiquement pas d’autoroutes. Pour en faire le tour, il faut compter au moins une semaine, mais de préférence dix jours à deux semaines. sunnycars.be

Se loger et se restaurer
L’hiver n’est pas la période la plus facile pour trouver un hébergement, mais Booking fait l’affaire (bien que le choix soit souvent limité aux pensions et aux maisons d’hôtes). Si vous partez en road trip, optez pour les grandes villes (Cagliari, Oristano, Olbia) et/ou dans les zones les plus populaires (Alghero, La Maddalena). Vous y trouverez plus facilement des restaurants ouverts. Sur la route et dans les petits villages, il est souvent un peu plus difficile de trouver de la nourriture. 

Climat
La température moyenne journalière en janvier est de 15°C, avec très peu de précipitations.

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