Lounge attitude version outdoor

Cet été, le design passe au jardin. Grandes marques et créateurs présentent des collections chics et hype qui se plaisent autant dehors que dedans. Décodage de cette nouvelle manière de prendre l’air avec panache.

De loin, on les dirait tressés dans de la paille de Vienne, comme ces paniers d’autrefois que l’on emmenait au jardin – déjà… – pour y ramasser les fruits du verger. Sur la nasse très large, on a posé des coussins épais, habillés d’un imprimé chiné au dessin joliment vintage. Pour alléger l’assise, on a pris soin de percer dans le dossier de larges orifices qui laissent sur le sol une ombre élégante et mouvante lorsque le soleil s’en mêle… Avec la collection Canasta qu’elle signe ici pour B&B Italia, Patricia Urquiola – dont on avait déjà aimé les élégantes chaises longues pour Gandia Blasco – n’en est pas à son coup d’essai dans l’univers de plus en plus trendy du meuble de jardin. Cette fois, la créatrice espagnole avait reçu pour seule mission d’utiliser un matériau de plus en plus prisé pour les meubles outdoor, ce faux jonc de polyéthylène réputé pour sa résistance et sa grande légèreté.

 » A priori, c’est un matériau que je n’aime pas trop, nous confiait la créatrice espagnole, en septembre dernier lors du salon Maison & Objet, à Paris, qui consacrait pour la première fois un pavillon entier à l’aménagement du jardin. De loin, il donne le change mais quand on s’en approche, il a l’air faux. Je voulais trouver le moyen de lui redonner une certaine dignité. Alors, au lieu de reproduire le canevas du rotin tressé, je me suis inspirée d’un panier en feuilles de bananier que j’avais chez moi.  » Le résultat est à mille lieues des classiques du genre. Et s’apparente plutôt aux canapés indoor proposés d’ordinaire par la marque italienne.

 » Pour moi, les frontières entre intérieur et extérieur sont une vision abstraite, justifie Patricia Urquiola. Le mobilier dit  » outdoor  » doit être conçu tant pour vivre dehors que dedans, selon les envies. Le meuble doit juste être compatible avec les conditions extérieures, il doit être à la fois résistant à la pluie et au rayonnement solaire. Un problème purement technique, qui n’a rien à voir avec un langage de formes ou l’interprétation d’une façon de vivre. « 

A l’image de la cuisine qui s’est ouverte sur le salon et la salle de bains sur la chambre à coucher, le jardin à son tour devient une pièce à vivre et se pare de meubles raffinés, qui viennent compléter la déco de l’intérieur de la maison. Dehors, la table et les chaises ne suffisent plus. Confort et élégance sont de mise. Des luminaires, des tapis, des coussins, des petites tables viennent étoffer l’offre de base. Et l’on retrouve, dehors, comme dedans, les codes design en vogue en ce moment.

En témoigne l’émergence d’assises larges et profondes, comme les coussins galets de Smarin ou le canapé Flow du Belge Xavier Lust pour Indera. Un fauteuil dont l’armature est composée de poudre d’aluminium et les coussins fabriqués dans une matière résistante aux caprices du temps. Les frères Erwan et Ronan Bouroullec ont, quant à eux, développé la collection Pebble pour Tectona. De grandes assises au tressage souple, qui sont comme des palets, aux formes simples et aux proportions justes, compagnons rêvés pour une discussion ou un moment de tranquillité. La vague rétro se retrouve elle également en bonne place au jardin. Ainsi, la collection Re-Trouvé conçue elle aussi par Patricia Urquiola, s’est inspirée des fauteuils en fer des années 1950, aux dossiers tout en boucles et arabesques.

 » L’extérieur, c’est-à-dire le jardin, la terrasse, la terrasse urbaine, est le prolongement de la maison, bien plus qu’un simple coin de verdure, déclarait en septembre dernier le designer Jean-Marie Massaud aux organisateurs du salon Maison & Objets. Il faut apprendre à vivre en phase avec le jardin. Et non pas le coloniser de mobilier sans avoir un projet de vie.  » Pour le nouveau directeur artistique de la marque allemande Dedon, ce secteur en plein boom doit encore entrer dans le raffinement, le confort, sans exclure pour autant l’idée d’usage, de qualité et de service.  » A nous, architectes et designers, de proposer des éléments permettant à chacun de composer son univers « , ajoute-t-il.

En ajoutant au mobilier, par exemple, de l’éclairage ou des solutions design pour les abris de jardin ou les abords des piscines, tout en mêlant ludique et esthétique comme en témoigne cette douche, imaginée par le Belge Danny Venlet pour Viteo, dont les jets d’eau jaillissent des côtés du support grâce au poids du corps, puis retombent vers le centre en un nuage de pluie. Chez Slide, Marcel Wanders propose une version outdoor de sa Crochet Chair : le fauteuil Chubby et le pouf Chubby low – aux formes rondes et lisses pour s’y lover dans toutes les positions – sont de véritables sculptures. Oublié aussi le parasol standard. Stéphanie Marin (Smarin), la géniale créatrice des coussins en forme de galets géants, a conçu Mobileshadows, des éléments en pur voile de lin à suspendre – dehors ou dedans – pour filtrer la lumière.

 » Maintenant que les gens ont goûté au plaisir d’aménager leur jardin, ils vont avoir de plus en plus envie de concevoir les espaces extérieurs comme ils ont déjà pu le faire pour l’intérieur et d’y consacrer des budgets de plus en plus significatifs, souligne Denis Castaing, le cofondateur de la société Sabz, un nouveau showroom dédié au design d’extérieur, qui a ouvert ses portes début avril à Paris. Les Belges d’ailleurs ne s’y trompent pas puisque, selon une étude réalisée par la Fedis, ils dépensent chaque année entre 100 et 300 euros en articles outdoor.  » Toutefois, il faut encore apprendre à penser « extérieur », poursuit Denis Castaing. Autrement dit, en fonction de la place dont on dispose, on va essayer de composer différents espaces, avec par exemple un coin détente puis un espace pour les repas et une zone pour les jeux des enfants. Toujours avec cette idée de créer des espaces de vie. « 

Cocooning au jardin ou garden-parties endiablées, tout est permis. La Belge Laurence Humier attrape la balle au bond et propose d’ailleurs une assise de taille variable : un assemblage de 2, 3 jusqu’à 10 chaises repliables. Pile-poil dans la tendance  » meuble modulable pour espace modulable  » qui sied si bien à nos terrasses de ville. Une autre belle envie du moment…

Carnet d’adresses en page 116.

Sophie Marlet et Isabelle Willot

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