Les tendances food qui feront swinguer vos assiettes en 2024
Puntarelle, koji, pizza slice, doggy bottle… 2024 nous réserve bien des nouveautés sur la planète food, et il nous tarde de nous en régaler… ou pas.
Le « vin naturel » rebaptisé
Le terme « vin naturel » polarise, avec d’un côté, ses ardents défenseurs, de l’autre ses fervents détracteurs. « Je n’utilise plus cette terminologie car elle suscite des réactions extrêmes, confie le sommelier Yanick Dehandschutter qui officie au Sir Kwinten. Je préfère parler de vins purs, soit des nectars qui sont élaborés avec le moins possible d’arômes ajoutés et d’additifs inutiles et qui reflètent leur terroir. Les gens recherchent avant tout la finesse que l’on trouve souvent dans un vin naturel, pas les saveurs funky ou levurées qu’on leur sert parfois. »
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Céréales d’antan
Les céréales anciennes connaissent un succès croissant depuis plusieurs années, et l’offre des artisans boulangers suit la tendance. « Ce ne sont pas seulement les saveurs originales et le caractère local qui séduisent les clients, avance le pâtissier et chocolatier Joost Arijs, mais aussi le fait que beaucoup de ces variétés d’antan, comme le petit épeautre, ont une teneur en gluten remarquablement faible. S’il est difficile d’obtenir une pâte ferme, le pain est en revanche beaucoup plus facile à digérer. » Et alors que de nombreux consommateurs se sont tournés vers une alimentation sans gluten, nous constatons un regain d’intérêt pour le pain… et bien pour ces variétés à faible teneur en gluten et très savoureuses.
L’omniprésence des cocktails
Le temps où l’on ne pouvait siroter un cocktail que dans un bar spécialisé est révolu. Aujourd’hui, on les retrouve aussi bien dans une brasserie qu’aux tables étoilées. Ainsi, même les adresses réputées pour leur carte des vins se mettent à servir un cocktail signature au lieu du traditionnel verre de bulles. Ne pensez pas pour autant qu’il soit question d’un simple gin-tonic : les restaurants font désormais appel à des mixologues, qui leur proposent un séduisant breuvage correspondant à l’esprit des plats servis.
Ainsi par exemple de Groseille, à Schaerbeek, une toute nouvelle adresse de cuisine française centrée sur le végétal emmenée par la cheffe Camille Cosnefroy. Pour les cocktails, elle a recruté Romain Vervoort, mixologue à qui l’on doit Ethylo, une table désormais fermée. Il a entre autres imaginé une jolie création à base de vodka infusée aux feuilles de nori.
La part belle à la puntarelle
En raison du réchauffement climatique, les agriculteurs locaux expérimentent toujours plus de nouvelles cultures. Avec comme résultat l’apparition de produits inhabituels, comme la puntarelle. Un légume amer typiquement italien qu’on pourrait qualifier de petite sœur délicate du chicon. Délicieuse en ragoût avec de l’ail et quelques anchois ou crue avec un peu de citron et de sel pour les plus audacieux.
Le bien-nommé plantbased
Alors que, depuis un moment, nous voyons apparaître un substitut de viande ou de poisson après l’autre sous la forme de dérivés de soja ultratransformés, il y a désormais une demande croissante de cuisine végétale naturelle dans laquelle les légumes tiennent le premier rôle. On trouve par exemple dans certains supermarchés, comme Albert Heijn, de la betterave rouge « dry aged », un morceau de betterave séchée et salée que l’on peut faire revenir à la poêle. Les produits riches en protéines à base de noix, de champignons et de légumes secs vont eux aussi gagner en popularité
Koji en cuisine
Ce champignon culinaire est utilisé depuis des siècles dans la cuisine japonaise pour faire fermenter le riz, qui est lui-même ensuite mélangé à des graines de soja afin de produire des exhausteurs de goût populaires tels que la sauce soja et le miso. De plus en plus, les chefs commencent à expérimenter le koji, en l’employant également pour fermenter la viande, le poisson et les légumes, donnant ainsi des saveurs particulièrement relevées. Son apparition dans des pralines serait elle aussi imminente !
Les épices font leur révolution
Longtemps, les épices sont passées sous le radar de la durabilité. Bien que nous nous soyons frénétiquement convertis au bio et au local, nous saupoudrions, mine de rien, du paprika et du cumin à tout va. En 2024, ces assaisonnements connaîtront leur heure de gloire. Cette tendance est déjà perceptible à l’étranger, à l’instar de The Good Spice aux Pays-Bas, où les épices sont achetées directement à l’agriculteur. Il en résulte non seulement un produit plus équitable, mais aussi une herbe beaucoup plus fraîche et donc plus puissante.
Certains chefs font, eux, en revanche, le pari de se passer d’épices. Chez Klok, à Bruxelles, Florent Ladeyn s’est engagé dans une voie « terroiriste » assez radicale. Toutes les préparations font l’impasse sur le poivre, la vanille, la noix de muscade… Le café est ici remplacé par la chicorée de nos régions.
Boissons sans alcool… Hors catégorie
Si les boissons sans alcool sont en plein essor depuis plusieurs années, pour Karoline Vlk de la boutique et du bar à cocktails bruxellois LIB (Life is Beautiful), la Belgique francophone a un train de retard sur ce créneau. « Les références qui voient le jour renvoient presque immanquablement à un genre alcoolisé répertorié, souvent le gin d’ailleurs, mais il y a tout à parier que la montée en puissance de la demande, qui se constate notamment au nord du pays, engendre sous peu des références affranchies des marqueurs habituels. »
En lieu et place d’un gin ou d’un vin non alcoolisé, on a déjà ainsi pu goûter aux bulles d’Ambijus, un mélange de pommes fermentées infusées avec des herbes et des aiguilles de pin du Grand Nord.
L’année du rhum
« C’est devenu une sorte de running gag parmi les barmans, s’amuse Nicolas Oorts du bar à cocktails Marigold, mais chaque année, on prédit que la prochaine sera celle du rhum. Je pense pourtant que ce sera vraiment le cas cette année (rires). Une certitude en revanche : la tendance est à la consommation du rhum comme un alcool à siroter, pur ou avec quelques glaçons, et non pas enfoui dans un long drink. C’est ainsi que l’on voit apparaître sur le marché des bouteilles inhabituelles, dans lesquelles le terroir est essentiel. Comme pour le vin, l’origine de la canne à sucre est mentionnée. On trouve même des flacons où toute la canne à sucre provient d’une plantation spécifique, ce qui permet de comparer le goût du terroir.
La biodiversité dans l’assiette
Pour faire la différence dans la préservation de la planète, il est temps d’accélérer la restauration de la biodiversité. Des recherches menées par le Fonds mondial pour la nature montrent que les deux tiers de ce que nous mangeons peuvent être ramenés à neuf matières premières, ce qui est loin d’être diversifié. Dans l’évolution vers une alimentation plus variée, les chefs semblent montrer la voie. Plusieurs restaurants à l’international, par exemple, misent sur les forêts nourricières pour trouver des ingrédients rares. L’établissement londonien Silo a même organisé un dîner au cours duquel seules des espèces invasives ont été consommées.
Pizza slice
Entre les pizzas napolitaines et leurs cousines romaines, façon « al taglio » ou « pinsa », on pensait que les célèbres roues italiennes avaient épuisé leur crédit en Belgique – alléchées par une rentabilité élevée (on parle d’un rapport compris entre 3 et 5) en raison d’une différence significative entre le coût de fabrication et le prix de vente, on ne comptait plus le nombre d’enseignes ouvertes depuis 2020.
C’est sans compter le talent de limier de Lakhdar Hamina-Lakhdar, éminence grise de la scène food bruxelloise, qui a relancé le genre avec le tout nouveau Fight Club. Pour ce faire, il a exhumé une création de la fin des années 70, la « New York–style pizza », rendue célèbre par l’enseigne Joe’s Pizza, possédant la particularité d’être vendue en « slices », comprendre « tranches, portions », de 99 cents. Ultrarégressive, cette pizza à la pâte molle se déguste sans couverts, en la pliant simplement avec les doigts. Economiques, antigaspis, juteuses, festives, Instagrammables… rien ne s’oppose à la prolifération de ce type d’enseignes.
Les vins les plus chers au verre
« Les clients sont de plus en plus nombreux à ne souhaiter qu’un ou deux verres de vin pour accompagner leur repas, constate le sommelier Yanick Dehandschutter. Alors qu’il était autrefois presque habituel de commander une bouteille, on est aujourd’hui plus enclin à demander un vin au verre. C’est aussi pour cette raison que j’ose plus facilement sortir un flacon coûteux de notre cave et l’ouvrir pour le service. Les convives sont partants pour un verre à 25 euros s’il s’agit d’un nectar spécial qu’ils ne pourraient pas goûter autrement. Je remarque également cette tendance avec le champagne, avec des verres plus chers issus de bouteilles exclusives figurant sur la carte des apéritifs.»
Toujours plus piquant
Nous avons assisté ces dernières années à une résurgence des sauces piquantes artisanales fabriquées en Belgique. Cette tendance se poursuivra et s’amplifiera en 2024, avec un marché plus varié, des sauces épicées à l’extrême, une attention portée à l’origine du produit, des variétés de piment inconnues et d’amusantes combinaisons avec des fruits et des légumes. Dans nos boissons aussi, nous goûterons davantage de piquant, à l’image du kombucha infusé au piment.
Les femmes créatrices de saveurs
De plus en plus de femmes accèdent à des postes de cadre sur la scène culinaire, et cette percée sera encore confirmée en 2024. Celles-ci apportent une solide impulsion verte en se concentrant davantage sur les thèmes sociaux et environnementaux qui permettront au secteur d’être à l’épreuve du temps. Une avancée indéniable certes, mais qu’il reste encore à instiller dans la tête de certains indécrottables masculinistes des fourneaux. Il y a peu, le conseil des prud’hommes de Paris écrivait dans une décision rendue publique que des propos comme « je sais que tu ne portes pas de culotte aujourd’hui » ou « c’est le moment où jamais si tu veux passer à l’acte » étaient « habituels dans les cuisines des restaurants ». Le chemin menant à la fin des violences, au respect et à l’égalité des traitements est encore long…
Petits (cocktails) mais costauds
Pendant longtemps, les cocktails populaires étaient ceux dans lesquels on ne sentait pas l’alcool. Il y a toutefois du changement dans l’air puisque nous abandonnons peu à peu les long drinks au profit de cocktails toujours plus forts dont les spiritueux n’ont pas été dilués, prédit Nicolas Oorts. Pensez aux classiques tels l’Old Fashioned (du whisky avec un peu de sirop de sucre et des bitters) ou le Dry Martini (gin ou vodka avec du vermouth) : de puissants élixirs que l’on sert dans un petit verre.
Concentré de café
L’alimentation fonctionnelle séduit de plus en plus, avec ses mets ou boissons auxquels on a ajouté des vitamines ou des plantes, histoire de se donner un coup de fouet ou au contraire de se relaxer. Le marché où cette tendance est en plein essor est celui du café. Parmi les marques à avoir ouvert la voie, le Mushcafé néerlandais et le Upraising britannique. En France, le label Inners propose un « supercafé » dit « Focus ». Cette mouture 100% biologique associe un délicieux arabica instantané au lion’s mane, appelé également hericium, un champignon identifié pour ses effets sur la concentration.
Après le doggy bag, la doggy bottle
« Au restaurant, lorsque l’on commande du vin au verre, la bouteille ne se vide pas forcément. Nous ne voyons pas d’inconvénients à ce que ce flacon accompagne le client à la maison, explique le sommelier Yanick Dehandschutter. De cette façon, les gens peuvent encore le déguster le lendemain, lorsque le vin est souvent plus ouvert et acquiert un autre profil gustatif. Je remarque que nos hôtes sont un peu mal à l’aise lorsque je leur propose, mais cela se fera de plus en plus. On peut ainsi toujours associer une consommation raisonnée d’alcool avec la commande d’une bouteille et s’amuser par la suite. Selon moi, la doggy bottle sera de plus en plus courante. »
A livre ouvert
Les livres de cuisine dédiés aux chefs connaissent un regain de popularité, en particulier ceux qui racontent une histoire. Ainsi de Autodidacte Cuisine sensible et bienveillante, par Julien Sebbag, Pierre Gagnaire – Une vie en cuisine, signé Julien Fouin ou encore Dans la tête de Glenn Viel, sous la plume d’Anne Garabedian. Les lecteurs ne recherchent plus nécessairement un recueil de recettes, mais se veulent avant tout associés à un récit.
Textures d’envergure
Après avoir adopté les saveurs asiatiques, et même ajouté certains arômes à notre répertoire standard, comme l’huile pimentée croustillante ou le miso, place à l’étape suivante avec… les textures, prédit Saskia Neirinckx, observatrice des tendances. Les consistances spongieuses, glissantes et élastiques que nous, Occidentaux, ne recherchons pas spontanément, font leur joyeuse entrée dans nos assiettes.
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Cuisine africaine
Pendant longtemps, les plats africains sont restés très discrets sous nos latitudes. Nous connaissons à peine le classique congolais, le poulet moambe, mais cela s’arrête malheureusement là. Pourvu que le changement, ce soit maintenant.
En Wallonie, les premières secousses de cette révolution de palais attendue commencent à se faire sentir. On pense à Utamu Coffee’n pastries, dans la Cité ardente, une adresse dédiée aux cafés éthiopiens. La bonne surprise vient des pâtisseries signées par la Rwandaise Clarisse Umutoni. Le pitch : des classiques revisités du répertoire français – notamment une Tatin à la banane plantain – et anglo-saxon – entre autres des cookies aux arachides -, ainsi que des souvenirs d’enfance comme les « amandazi », beignets traditionnels du Rwanda.
Il reste que l’évènement majeur de 2024 consistera en l’ouverture à Waterloo de O’Kongo de la très prometteuse Naomi Nsungu, cheffe repérée chez Rebel (Ixelles) et au Lombric (Forest). Aux environs de mars-avril, la jeune femme y signera un menu unique créatif nourri par une fusion afro-européenne dont elle a le secret en plus d’une carte déroulant les plats traditionnels congolais. Le plus ? Des produits qualitatifs sourcés auprès d’une sélection de fermes locales dont la production est à la hauteur de la richesse des terroirs congolais.
Le juste prix
« Nous constatons que le prix des cocktails signature a beaucoup augmenté, avance Nicolas Oorts du bar Marigold. Ces breuvages spéciaux, qui combinent des jus frais, des boissons fermentées, des spiritueux infusés et des sirops faits maison, nécessitent un travail de recherche considérable. Nous travaillons souvent 50 à 60 heures sur une création afin de la perfectionner. Le résultat s’élève ensuite rapidement à 18 ou 20 euros en raison de l’augmentation des coûts de la main-d’œuvre. Nous remarquons qu’avec cette augmentation de prix, un simple gin-tonic dans un bar local est également proposé à un tarif disproportionné. Cette évolution est liée à notre faible connaissance en mixologie ; dans une ville experte comme Londres, par exemple, ça ne se passerait pas comme ça. J’espère donc voir les prix des cocktails simples qui ne nécessitent pas de Research & Development baisser à nouveau. »
Tarte rétro
La nostalgie infusera toutes les créations pâtissières de cette nouvelle année. Nous verrons ainsi de plus en plus de gâteaux rétro apparaître, de la tarte à la banane à la crème au beurre pulvérisée avec art, en passant par le merveilleux. Une touche de kitsch n’est pas exclue.
La camomille en fleur
Pendant longtemps, l’humble fleur blanche à l’arôme délicat n’a pas joué un rôle prépondérant dans le paysage gustatif. Elle pouvait certes se glisser dans une tasse de thé apaisante, mais ne brillait guère par ailleurs. L’ère est au changement : la floralité subtile de la camomille se retrouve dans les desserts crémeux, les boissons sans alcool raffinées et les sauces exaltantes. D’autres saveurs florales comme le chèvrefeuille et la rose lui emboîtent le pas.
Moins d’alcool dans son vin
« Avec l’engouement croissant pour les boissons faiblement alcoolisées, les vins titrant à 14 ou 15 degrés perdent en popularité, affirme le sommelier Yanick Dehandschutter. Il est probable que les viticulteurs tiendront davantage compte de cette préférence et les vins légers seront toujours plus nombreux sur le marché. Techniquement, c’est un défi, car avec le réchauffement climatique et les étés chauds, les raisins mûrissent plus vite, ce qui entraîne une augmentation de l’alcool. »
Elégant thé glacé
Qui dit « thé glacé » pense sucré et industriel, ou artisanal et fade. Cette année promet du changement. Grâce à l’explosion des boissons non alcoolisées, l’iced-tea prend une toute nouvelle dimension. On trouve ainsi de jolies bouteilles de champagne remplies de ce breuvage aux perles douces qui se prêtent parfaitement à un dîner raffiné. La preuve avec la brasserie scandinave Far & Son, qui produit des thés pétillants à base d’hibiscus ou de basilic thaï.
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