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Le pigeon est-il le nouveau chien? DR Weekend Canva

Le pigeon va-t-il voler la vedette aux animaux de compagnie traditionnels?

Kathleen Wuyard-Jadot
Kathleen Wuyard-Jadot Journaliste & Coordinatrice web

23, 33, 43, 53 ans: voit-on forcément la vie autrement avec (plusieurs fois) dix ans d’écart ? Positionnés chacun dans une décennie différente, nos journalistes confrontent chaque vendredi leurs points de vue en débattant des sujets dont tout le monde a parlé lors de la semaine écoulée.

Appartenant respectivement aux générations Z, Millenial et X, Thibault Dejace, Kathleen Wuyard, Nicolas Balmet et Nathalie Le Blanc confrontent leurs points de vue sur le buzz du moment dans notre chronique « 10 ans d’écart ». Le sujet de la semaine?

Le passage du pigeon de vermine à animal de compagnie

Oui, le pigeon. Celui-là même qui hier encore, semblait condamné à errer d’un air un peu morne dans les métropoles à l’affût de quelques miettes égarées, aussitôt transformées en une opulence de trainées blanches et nauséabondes sur la moindre surface. Voire même, pour les moins chanceux, sur leur veste ou leur tête.

@percy.the.pigeon

Idk why Percy has such a hard time picking up his feathers. 😭😩 #pigeontok #tiktokpigeon #fyp #tiktokpets #petsoftiktok #birdtok #funnyanimals #OscarsAtHome #fypシ #adoptdontshop #rescuepigeon #petpigeon #pet #pigeon

♬ Avidi Kadivi – WanderingAndLost
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Le pigeon, donc. Passé contre toute attente du statut de nuisible à celui d’animal de compagnie grâce à l’enthousiasme de jeunes TikTokeurs (what else?) qui sont toujours plus nombreux à capturer des volatiles sauvages en ville pour en faire un compagnon à domicile – et grossir les rangs des vidéos estampillés #PigeonTok, lesquelles rassemblent plus de 133 millions de vues à l’heure d’écrire ces lignes. Mais qu’en pensent nos journalistes?

Thibault, 23 ans « Loin de moi les pigeons ! »

Attendez. Deux minutes. Vous êtes vraiment en train de me dire que le pigeon devient LE nouvel animal de compagnie ? Et qu’en plus il a même un hashtag désigné sur TikTok ? Et que ce fameux #pigeontok recense plus de 133 millions de vues ? Heureusement que je suis assis, parque les bras m’en tombent.

Désolé, mais il se passe quoi là ? C’est un coup monté ? Une farce ? À en croire le compte percy.the.pigeon pas vraiment. Mais moi, j’ai vraiment du mal à suivre. Comment peut-on se dire que c’est une bonne idée ?

A l’heure d’écrire ces quelques lignes, je suis confortablement installé chez moi, mon démon adorable chat sur les genoux. Après une brève conversation, on a décidé d’un commun accord de ne jamais céder à cette tendance. Déjà parce que Léon, mon chat, m’a dit ne pas être certain de pouvoir contrôler ses instincts de chasseur. Ensuite parce que je dois déjà ramasser ses crottes à lui, et c’est assez comme ça.

Non mais. Un pigeon. Chez soi. Je veux bien que la tentation du buzz soit alléchante. Que ma génération veuille casser les codes. Qu’elle s’imagine avant-gardiste. Mais là, on dépasse les bornes. Les pigeons dans la rues ! Pas chez soi. Pour reprendre une chanson, « Ouvrez ouvrez la cage aux pigeons, regardez les s’envoler c’est beau », alors loin de moi les pigeons. Shooooo !

Kathleen, 33 ans: « Je préfère encore un cloporte »

Aussi amoureuse des animaux que Brigitte Bardot (sans les tendances fascisantes), j’ai dû au gré des années (rêver de) posséder la quasi totalité de l’arche de Noé. Exception faite des cloportes et des pigeons.

Et pourtant, peut-être parce que je suis plus iconoclaste que je n’en ai conscience, j’ai récemment fait l’acquisition de plusieurs spécimens de Columbidae pile au moment où la tendance décollait. Et quand je dis « fait l’acquisition », je veux dire que trois de ces salopiafs ont établi leur domicile sur l’appui de fenêtre au dessus de ma porte d’entrée, laquelle est désormais ornée d’un double tapis. Un en intérieur, pour s’essuyer les pieds avant de rentrer, et un en extérieur, constitué de fientes produites avec une cadence et dans une quantité qui feraient pâlir Stakhanov d’envie.

Si je devais qualifier le potentiel « animal de compagnie » du pigeon, je dirais donc platement que c’est de la crotte. Et que je préfère encore un cloporte.

Nicolas, 43 ans : « Pourquoi ? »

Trois choses me viennent en tête à l’évocation du mot « pigeon » : la chanson de Jean-Jacques Goldman où une demoiselle met du vieux pain sur son balcon (que vous aurez désormais en tête pour le restant de la journée), la croustillante tirade de Benoît Poelvoorde dans C’est arrivé près de chez vous, et la réplique de Paul Newman dans le film L’Arnaque qui raconte qu’à une table de poker, si tu n’as pas compris qui était le pigeon après 30 minutes, c’est probablement toi le pigeon.

Voilà. Trois choses, et pas une de plus. Bizarrement, rien ne me vient en tête à propos du pigeon en tant qu’animal de compagnie. Un mystère… qui s’explique : ce joli oiseau à la grise robe qui, dans l’enfer des villes, à mon regard, se dérobe, n’a pas la moindre chance d’atterrir un jour dans mon salon.

Et si par malheur, c’était le cas, il serait probablement très vite décimé par le premier objet contondant qui me passerait par la main – je serais même capable de recourir à l’une des piques me servant à tremper mes bouts de pain dans ma fondue savoyarde, c’est dire si je suis prêt à tout. Inutile, bien sûr, de convoquer les associations de protection des animaux ailés, puisque je plaisante. Non, en vrai, je crois que là, maintenant, tout de suite, pour être tout à fait honnête, j’ai envie d’inviter chez moi le propriétaire d’un pigeon domestique, de lui offrir un café et de lui poser une question très simple : pourquoi ?

Et s’il me répond que c’est parce que le pigeon « est vréément le plus agile », je veux bien ne pas verser d’arsenic dans sa tasse.

Nathalie, 53 ans : « Je laisse aux jeunes ces images un peu floues »

Its a no from me. Un non ferme et catégorique, même.

Enfant, notre voisin avait un pigeonnier, et il passait souvent des heures à inspecter le ciel quand ses pigeons étaient en vadrouille, tandis que ma grand-mère, elle, passait ce laps de temps à faire la grimace parce que ces volatiles avaient une fois de plus souillé le linge qu’elle avait mis sécher.

Le roucoulement des pigeons a beau avoir quelque chose de très nostalgique façon Madeleine de Proust auditive, je ne suis pas fan. Je crois que ça a quelque chose à voir avec le mouvement de leur tête quand ils marchent. Et ils marchent souvent, alors même qu’ils peuvent voler. Sur les places dans les parcs, sur les marchés et surtout sur mon balcon, ils se dandinent partout.

Parfois, je suis tranquillement en train de travailler et puis un de ces rats volants s’installe juste en face de mon bureau. J’ai beau savoir que ce sont des animaux intelligents, je les trouve un peu effrayants, peut-être justement à cause de leur intelligence. Ça et leurs petits yeux de bille aussi. Sincèrement, l’existence du #pigeontok est une raison suffisante pour me tenir loin de la plateforme chinoise.

 

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