messages vocaux
L'enfer, ce sont les messages vocaux? DR

Les messages vocaux sont-ils vraiment des poisons?

Kathleen Wuyard Journaliste & Coordinatrice web
Nicolas Balmet Journaliste
Nathalie Le Blanc Journaliste

Les messages vocaux, on les adore ou on les déteste, mais personne n’a rien à dire sur le sujet. Lequel suscite pléthore d’articles négatifs, qui les qualifient tantôt « d’apanage des narcissites », tantôt de « poisons ». Un débat pour lequel nos chroniqueurs ont donné de la voix.

Appartenant respectivement aux générations Z, Millenial et X, Thibault Dejace, Kathleen Wuyard, Nicolas Balmet et Nathalie Le Blanc confrontent leurs points de vue sur le buzz du moment dans notre chronique « 10 ans d’écart ». Le sujet de la semaine: les messages vocaux, bénédiction pour les uns et plaie pour les autres.

Thibault, 23 ans: « J’entretiens une relation d’amour-haine avec les vocaux »

Que cela soit dit d’entrée de jeu : j’entretiens une relation toxique d’amour-haine avec les vocaux. Tantôt fan de ces derniers, tantôt irrité et énervé par l’énième note vocale que mon frère m’envoie à un moment inopportun, mon coeur balance.

Je trouve en effet qu’il n’y a rien de plus abominable que de recevoir soudainement un message vocal alors que la conversation était purement écrite auparavant. C’est encore plus atroce quand ledit vocal fait suite à la discussion. C’est qu’un message vocal est bien plus intrusif qu’un simple message écrit. Il est plus exigeant, demande plus de temps et nécessite aussi plus d’attention (mettre ses écouteurs, ou s’isoler etc etc.)

Mais en même temps, je pourrais écouter des heures durant certains vocaux de mes amis. Ceux qui se transforment presque en podcast. Car la voix, le souffle, l’intonation ainsi transmis permettent de transporter dans leurs sillages pléthore d’émotions et ajoutent comme une dimension un brin plus réelle. Avec ces conversations virtuelles, c’est presque comme si la personne était près de moi.

Et puis faut bien reconnaître le côté pratique des notes vocales, qui permettent en quelques dizaines de secondes de raconter ce qu’une dizaine de minutes de tapotement acharné sur nos écrans aurait nécessité. Au final, les messages vocaux, c’est un peu comme tout, faut toujours le faire avec le consentement de l’autre.

Kathleen, 33 ans: « Du pain béni pour les bavards »

J’ai longtemps eu le même avis sur les messages vocaux que sur la pratique de « recycler » les cadeaux non-désirés en les offrant à quelqu’un d’autre: vachement pratique pour la personne qui s’y adonne, mais beaucoup moins gai pour celui ou celle qui est de l’autre côté. Et puis j’avoue, ma résolution a flanché.

D’abord pour les cadeaux, parce que j’ai dans mon entourage une personne spécialiste du délestage des présents pourris, qui filent désormais directement sur mon Vinted. Et puis pour les vocaux, parce que pour une bavarde comme moi, qui se retrouve parfois à écrire des messages longs comme une page de roman (avec autant de rebondissements), c’est du pain béni. En cas de sujet sensible, cela me permet en outre de m’assurer que ma voix ne laisse aucune place aux mauvaises interprétations du ton, mais aussi, qu’aucune capture d’écran de mes propos n’est possible.

Méfiante, moi? Je préfère prévoyante. Raison pour laquelle j’ai toujours désormais une paire d’écouteurs sur moi, en cas d’arrivée de messages vocaux impromptus. Parce que si l’adage veut que la parole s’envole tandis que les écrits restent, si on écoute les messages vocaux de quelqu’un d’autre en en faisant profiter son entourage, on est sur la mauvaise voix.

Nicolas, 43 ans: « Je n’échangerais pour rien au monde ma plume contre ma voix »

C’est amusant que les messages vocaux soient justement le sujet de la semaine. Pas plus tard qu’hier, c’était mon anniversaire, et j’ai donc reçu un véritable déluge de messages tellement je suis populaire (je déconne : même ma propre grand-mère m’a oublié). Vous connaissez tous l’étrange tradition qui squatte la planète virtuelle depuis des lustres : les messages d’anniversaire, dans 99,9% des cas, se résument à « joyeux anniversaire ! ».

Sauf, bien sûr, quand ils proviennent de gens qui aiment la cocasserie et la galéjade, et qui n’hésitent pas à ajouter des petits commentaires sur le fait que je deviens hyper-vieux et/ou que je vais forcément finir avec la tête dans la caniveau tellement je vais picoler. Bref ! Je vais bien, merci, ça a été, j’ai juste bu de la bière et du vin, mais je suis frais comme un Apéricube.

Et donc, parmi ces messages, il y avait un… vocal. Mais pas n’importe quel vocal : un vocal qui disait « joyeux anniversaire ! » – fin de citation. Franchement, sur ce coup-là, je me suis quand même demandé si la tendance ne venait pas déjà d’avoir atteint ses limites. Après, je ne sais pas : peut-être que cette personne a soigneusement calculé le temps précis entre les deux techniques. Entre le temps d’écriture et le temps de dictée, il y a potentiellement des micro-millièmes de secondes qui ont fait pencher la balance vers telle ou telle décision. C’est possible. Je n’ai pas de compas dans l’œil, ni de chronomètre dans l’oreille. Tout ça pour dire que, personnellement, j’adore écrire et que je n’échangerais pour rien au monde ma plume contre ma voix… surtout que je fais partie de ceux qui aiment la cocasserie et la galéjade. A ce propos, je rigolais quand je disais que ma grand-mère ne m’avait rien souhaité : elle est décédée depuis un bail, LOL.

Nathalie, 53 ans: « La voix est intensément personnelle »

Quand j’avais dix ans, nous avons installé un téléphone à la maison. Un de ceux où il fallait composer le numéro, avec un fil enroulé entre le récepteur et l’appareil, et un autre fil au mur. D’emblée, je suis devenue accro, parce que je n’aimais déjà rien tant que babiller à l’époque. Et des années plus tard, quand les téléphones portables sont arrivés sur le marché, je me suis dit qu’ils seraient utiles pour communiquer des infos telles que l’adresse où se retrouver, par exemple.

Mais il n’en fût rien, et au gré des années, on est passés du tout au texto à pire, tant et si bien que les jeunes d’aujourd’hui ne voient même plus leurs téléphones comme un moyen de communiquer oralement avec d’autres personnes. Quand j’appelle un des jeunes adultes de mon entourage, ils répondent toujours avec surprise – quand ils répondent.

Pour moi, c’est une honte, car la voix est intensément personnelle, et quand vous parlez à quelqu’un, la manière dont l’autre dit quelque chose vous permet d’évaluer en simultané ce qu’il ou elle pense ou ressent. Rien ne fait battre mon coeur comme entendre la voix des gens que j’aime, et même s’il s’agit d’une personne qui me laisse indifférente, je préfère de loin lui parler plutôt que déchiffrer des lettres sur un écran. Vive les messages vocaux!

Découvrez les chroniques 10 ans d’écart, où les générations confrontent leurs points de vue

23, 33, 43, 53 ans: voit-on forcément la vie autrement avec (plusieurs fois) dix ans d’écart ? Positionnés chacun dans une décennie différente, nos journalistes confrontent chaque vendredi leurs points de vue en débattant des sujets dont tout le monde a parlé lors de la semaine écoulée.

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