Remplacer le sucre par du sel dans son café, une fausse bonne idée

café sel
Le café au sel, une fausse bonne idée? DR
Kathleen Wuyard
Kathleen Wuyard Journaliste & Coordinatrice web

Après la tendance des cafés aux fruits, place désormais à celle du café… Au sel. Une hérésie gustative? Selon les convertis, cela permettrait d’adoucir l’amertume du breuvage. N’écoutant que leur courage, nos chroniqueurs ont mis la promesse à l’épreuve.

Appartenant respectivement aux générations Z, Millenial et X, Thibault Dejace, Kathleen Wuyard, Nicolas Balmet et Nathalie Le Blanc confrontent leurs points de vue sur le buzz du moment dans notre chronique « 10 ans d’écart ». Le sujet de la semaine: le café au sel.

Thibault, 23 ans: « Le café au sel est tout bonnement immonde »

Quand Nico nous a soufflé l’idée de sujet de cette semaine, à savoir mettre du sel à la place du sucre dans son café, et qu’il a renchéri en me suggérant de tester le piment d’Espelette, j’ai su que j’étais foutu. Mais aussi que le monde allait mal. Très mal. Je le savais déjà, mais ça, c’est le pompon sur la Garonne. Le début de la fin.

C’est qu’au grand dam de mon partenaire, je suis un aficionado du café. J’adore son goût, son odeur. Le fait de le préparer. Du café noir à la french press, en passant par mon café du dimanche après-midi préparé à la Chemex, sans oublier le rapide flat white matinal au lait d’avoine pris avant d’arriver au bureau, le café et moi c’est une grande histoire d’amour. Et jamais le sel n’a été invité dans notre duo.

Mais pour le bien de cette chronique – qu’est-ce que je ne ferais pas pour vous chers lecteurs- et parce que Nico (!) et Nathalie se sont lâchement débinés à grand coup de « je n’aime pas le café », ne restaient qu’à Kathleen et moi de faire l’expérience du café salé. C’est ainsi que je me suis retrouvé ce matin, dans mon bed&breakfast écossais (mes aventures dans le pays du Chardon seront bien sûr relatées par ici, promis) à verser misérablement un sachet de sel dans mon café matinal.

Eh bien ne le faites pas. C’est tout simplement immonde (un immondice, même) et ça ruine votre café. Allez, j’vous laisse. Je fonce crapahuter dans mes Highlands. Avec un vrai coffee cette fois.

Kathleen, 33 ans: « Comme un espresso dilué à l’eau de mer »

« Déjà, je suis contre », affirme d’emblée le buveur de café de la famille quand je lui annonce qu’il va devoir ajouter un peu de sel dans son espresso. Raisons évoquées: « C’est justement l’amertume qui est délicieuse » et « le sel, c’est pas franchement meilleur que le sucre pour la santé ». Certes. Mais ainsi que je le lui rappelle gentiment (et fermement), être marié à une journaliste implique, outre les devoirs conjugaux traditionnels, d’accepter parfois de jouer les cobayes. C’est ainsi qu’il se retrouve, bon gré mal gré, à touiller un peu de sel dans sa tasse d’un air dubitatif.

Lequel est rapidement remplacé par une pantomime allant de la surprise au dégoût en passant par l’incompréhension une fois la première gorgée avalée. Verdict de ce testeur bien marri?

« Militant pour un café non sucré, je suis catégoriquement opposé à son adaptation salée, qui dénature complètement l’expérience et donne l’impression de boire un espresso dilué à l’eau de mer. Accompagner mon café d’un petit biscotti ou d’un pouce? Avec plaisir. Du sel? Plus jamais »

Et de verser de manière théâtrale le reste de sa tasse dans l’évier, mais pas avant que votre dévouée, justement pas super fan du café en raison de son amertume, n’y ait goûté. Verdict, bis: c’est bien la mer à boire, au propre comme au figuré. Et franchement, c’est pas super.

Nicolas, 43 ans: « Je me vois très mal remplacer le sucre par du sel. »

Je le répète régulièrement : ici, dans cette rubrique, on ne se cache rien. Voici donc ma nouvelle confession : je ne bois plus de café depuis une éternité. Je ne sais plus trop à quel moment de ma vie ça s’est passé, puisque pendant très longtemps, c’était avec un vrai bonheur que je faisais chauffer ma tasse d’eau au micro-ondes, que j’y versais le contenu d’un petit sachet de Nescafé, puis que j’y ajoutais une généreuse cuillère de… sucre. Ma faiblesse ? C’était du café décaféiné, ce que beaucoup de mes proches considéraient comme un blasphème. « M’enfin ! A quoi bon boire du café si tu ne t’inocules pas la dose de caféine qui va avec ! Autant boire de l’eau du robinet ! Imbécile ! »

Bon, je ne suis pas certain pour le « imbécile », peut-être que c’est juste mon cerveau qui interprétait les choses de cette manière. Mais soit. Un jour, donc, j’ai troqué mon café contre du thé. Du thé vert, dans lequel j’ajoute un peu de jus de citron et du miel. Le café est ainsi devenu une sorte de souvenir de jeunesse qui, d’ailleurs, s’entendait à merveille avec un autre souvenir nommé Nico Tine, mais disons que c’est une autre histoire (et j’ai arrêté depuis plus de trois ans, au cas où vous vous intéresseriez à ma petite santé, là, j’avoue que je souffre un peu des allergies, mais c’est la saison, on n’y peut rien).

Néanmoins, pour être complètement transparent, je dois dire qu’il m’arrive, de façon encore plus occasionnelle qu’un mardi matin sans embouteillage sur le Ring, de boire une petite tasse de café quand l’hiver assaille chaque recoin de mon corps et que j’ai besoin d’un réconfort aux effluves d’antan. Mais vraiment, pour les quelques fois où ça se produit, je me vois très mal remplacer le sucre par du sel. Non pas que j’aie peur de me faire mal au papilles, non non : je suis surtout effrayé à l’idée que mes proches me traitent de crétin fini, car je ne crois plus avoir l’âge d’être tolérant.

Nathalie, 53 ans: « Tant que je n’ai pas à en boire, je suis pour »

Je n’aime pas le café. J’irais même jusqu’à affirmer qu’il s’agit d’un des ingrédients les plus trompeurs qui soient, parce que ça sent bon mais le goût est horrible. Je ne le bois que lorsqu’il est dilué avec une généreuse éclaboussure de lait et trop de sucre. Ou bien sous forme de crème glacée ou de milkshake.

Mon aversion est telle que je n’ai même pas de cafetière à la maison, ce qui m’a empêchée de tester cette nouvelle tendance. Mais en théorie, je suis fan de l’idée, parce que j’ai tendance à me réjouir de la présence du sel là où on ne l’attend pas. J’étais déjà une inconditionnelle de caramel salé avant que Nigella Lawson ne commence à chanter ses louanges dans le monde entier, car la combinaison du sucré et du salé est spectaculaire et le souvenir de la superbe mousse au chocolat décorée de quelques gouttes d’huile d’olive et de gros cristaux de sel que j’ai savourée récemment m’a suivie pendant des jours.

Si on utilise bien le sel en bordure d’un verre Margherita pour équilibrer l’acidité des citrons verts, pourquoi cela ne pourrait-il pas fonctionner avec l’amertume du café? Quand j’ai évoqué ce drôle de mélange à un ami buveur de whisky, il a acquiescé avec enthousiasme. Lui-même ajoute une pincée de sel dans son verre lorsqu’il sirote son whisky le plus amer, car le sel tempère l’amertume et modifie la sensation en bouche mais pas l’arôme. Tant que je n’ai pas à en boire, je suis donc tout à fait favorable à l’idée du sel dans le café.

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23, 33, 43, 53 ans: voit-on forcément la vie autrement avec (plusieurs fois) dix ans d’écart ? Positionnés chacun dans une décennie différente, nos journalistes confrontent chaque vendredi leurs points de vue en débattant des sujets dont tout le monde a parlé lors de la semaine écoulée.

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